Ressources humaines - Un député propose de faire basculer 87% des fonctionnaires vers des contrats de droit privé
Le chef de file de députés UMP, Christian Jacob, indiquait mardi 11 janvier qu'il souhaitait "réfléchir à la pertinence de l'emploi à vie des fonctionnaires". Visiblement, la réflexion n'a pas tardé à porter ses premiers fruits : le député Jean-François Mancel (UMP, Oise) a déposé le 13 janvier sur le bureau de l'Assemblée nationale une proposition de loi "visant à réserver le statut de la fonction publique aux agents exerçant une fonction régalienne".
Ce texte, qui a le mérite de la brièveté (3 articles), prévoit une nouvelle rédaction pour les articles 2 et 3 du statut général de la fonction publique (loi du 13 juillet 1983) afin de soumettre l'ensemble des agents de l'Etat et des collectivités territoriales au Code du travail. Ne seraient plus soumis au statut de la fonction publique que les personnes "dont les attributions soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique" (article 5bis de la loi du 13 juillet 1983). Ces dispositions s'appliqueraient à tous les agents recrutés à partir de l'adoption de la loi. Les agents déjà en poste se verraient octroyer le droit de choisir entre le Code du travail et le statut général de la fonction publique.
Dans le livre blanc sur l'avenir de la fonction publique rendu public en 2008, le conseiller d'Etat Jean-Ludovic Silicani estimait à 700.000 le nombre d'emplois dits de puissance publique sur les 5,3 millions d'agents publics (rapport, p.113). Ce conseiller d'Etat, dont le rapport porte la philosophie de la plupart des réformes gouvernementales menées depuis 2007, estimait alors que "retenir le critère des emplois de puissance publique, conduirait à faire basculer 4.600.000 emplois, (soit environ 87% du total) sous le régime du contrat, ce qui n'est manifestement pas envisageable".
Pourquoi soumettre les agents publics au Code du travail ?
Dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi, Jean-François Mancel explique pourquoi le basculement des agents publics vers des contrats de droit privé est nécessaire : premièrement, l'augmentation du nombre d'agents publics ces 25 dernières années "génère des pesanteurs au sein de l'appareil public, dommageables autant à celui-ci qu'aux Français".
Deuxièmement, "la France est aujourd'hui le seul grand pays développé où il existe une séparation totalement étanche entre le statut des fonctionnaires et celui des salariés du privé". Resserrer le statut de la fonction publique autour des fonctions régaliennes "contribuerait à dynamiser les domaines non régaliens", "mieux prendre en compte le mérite" et "assurer une "meilleure gestion des ressources humaines". "Cette nouvelle flexibilité nourrirait une dynamique d'enrichissement réciproque des deux secteurs." Cette mesure permettrait également de "renforcer la volonté de rationalisation des dépenses de l'Etat".
Le parlementaire de l'Oise, à l'Assemblée depuis 1978 (avec quelques interruptions) et ancien élève de l'ENA, conclut ainsi : "Loin de représenter une forme de désengagement de l'Etat, cette proposition de loi s'inscrit dans une logique d'égalité et de réconciliation au sein de la société française à l'heure où les différences entre le secteur public et le secteur privé apparaissent plus que jamais injustes aux yeux de nombre de nos concitoyens, particulièrement suite à la grave crise financière que nous venons de traverser."
La proposition de loi n'est pas encore inscrite à l'agenda de l'Assemblée nationale.