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Une dotation annuelle d'au moins 500 millions d'euros pour compenser le déficit du service universel postal

Pour compenser le déficit chronique de l'activité courrier du groupe La Poste, l'Etat s'engage à lui verser une dotation de compensation d'au moins 500 millions d'euros par an, en contrepartie d'efforts sur sa productivité et d'une nouvelle gamme de services. La distribution à J+3 devrait devenir la norme.

Promesse tenue : le ministre chargé des Comptes publics Olivier Dussopt s’était engagé auprès du député Gilles Carrez, mi-juin, à ce que l’Etat couvre le déficit du service universel postal (la distribution du courrier et des colis) qui ne cesse de se creuser depuis 2018 du fait de la dégringolade des envois de lettres.
Une solution a été trouvée jeudi 22 juillet, lors du 6e comité de suivi de haut niveau du contrat d'entreprise entre l'Etat et La Poste, présidé par le Premier ministre Jean Castex : l’Etat versera à La Poste une dotation budgétaire annuelle de 500 à 520 millions d’euros, qui sera modulée "en fonction des résultats de qualité de service", a annoncé Matignon, dans un communiqué, jeudi, à l’issue de ce comité. La première dotation sera inscrite dans le projet de loi de finances pour 2022. Son versement interviendra en 2022 "sous réserve que l’aide soit déclarée compatible par la Commission européenne" et "compensera les surcoûts supportés par La Poste au titre de l’année 2021".

Une "nouvelle gamme" de services

En contrepartie, La Poste proposera d’ici à 2023 une "nouvelle gamme", reposant sur la distribution du courrier à J+3, la distribution à J+1 (correspondant actuellement au timbre rouge) sera alors réservée aux situations les plus urgentes. "Ces évolutions seront précisées dans le prochain contrat d’entreprise entre l’Etat et La Poste, qui sera élaboré d’ici la fin de l’année 2022", indique Matignon qui précise s’inspirer du rapport de l’ex-député Jean Launay, remis au gouvernement le 28 mai, qui privilégiait l’option d’une dotation. Selon ce rapport, le courrier traditionnel a chuté de 39% entre 2010 et 2020. Il rappelle aussi que le service universel postal a connu en 2020 un déficit d’1,32 milliard d’euros, bien plus que la compensation envisagée. L’auteur estime que la crise à été un "révélateur" des difficultés structurelles du groupe. Le chiffre d’affaires du courrier a chuté de 13% en 2020 et les volumes de 18%. Ce que le boom des envois de colis (+29%) lié notamment à la fermeture des magasins n’a pas permis de compenser.

Le Sénat se félicite de son côté que le gouvernement ait retenu "plusieurs propositions et orientations du rapport d’information de la commission des affaires économiques de mars 2021" (voir notre article). Il relève que cette compensation sera accordée "sous réserve poursuive ses efforts de productivité, préserve la qualité du maillage territorial et du dialogue social et après évaluation indépendante de l’Arcep et accord de la Commission européenne". Patrick Chaize l’un des co-auteurs de ce rapport a salué "une excellente nouvelle" qui permettra à La Poste de "continuer à se développer et d’éviter une réduction de fait des services publics postaux". Il ne s’agit pour autant pas d’une compensation à l’euro près. Le rapport sénatorial suggérait pour sa part une compensation d’un milliard d’euros reposant sur un système mixte : 270 millions d’euros d’abattement sur la taxe sur les salaires auxquels s’ajouterait une dotation budgétaire de 730 millions d’euros.

"Un service à deux vitesses"

La solution trouvée ne fait pas que des heureux. L'abandon de la distribution du courrier en deux jours, combiné à la hausse du prix du timbre risque de "créer un service à deux vitesses", a ainsi fait valoir à l’AFP Marie Vairon, secrétaire fédérale de SUD-PTT, présente à la réunion.

Le Premier ministre a par ailleurs assuré que le gouvernement serait "prêt à maintenir le niveau de son soutien" à la mission d’aménagement du territoire de La Poste (à savoir le maintien d’un réseau de 17.000 points de contacts) "en contrepartie d’une amélioration de la qualité du service rendu aux Français". Ce sera l’un des enjeux de la négociation du prochain contrat de présence postale territoriale entre La Poste, l’Association des maires de France (AMF) et l’Etat pour la période 2023–2025 qui va s’engager "dès les prochaines semaines".