Une France rouge et orange
Les alertes se sont multipliées ce lundi 30 juin face à des températures ayant incité Météo France à placer 16 départements en vigilance rouge. 78 départements restaient en vigilance orange. Les ministères ont communiqué leurs recommandations respectives (Education, Logement, Santé...), pendant que les collectivités déployaient une batterie de mesures en faveur de leurs administrés. Les employeurs publics ont en outre été invités à veiller sur leurs agents. Après celui du 1er juin, un nouveau décret doit venir renforcer les obligations des employeurs à l'égard de leurs salariés exposés aux fortes chaleurs.

© @Mairie_Niort
Seize départements sont placés en vigilance rouge canicule, dont le Bassin parisien, pour la journée de ce mardi 1er juillet, a annoncé lundi Météo France, et 68 resteront en vigilance orange. Dans le détail, tous les départements de l'Île-de-France, le Cher, le Loiret, l'Indre, le Loir-et-Cher, l'Indre-et-Loire, l'Aube, l'Yonne et la Vienne font l'objet d'une vigilance rouge à partir de midi. La dernière vigilance de ce type pour la France remonte au mois d'août 2023. En Île-de-France, c'est la première fois depuis cinq ans (7 au 12 août 2020) que le niveau est atteint, selon Météo France.
Le pic caniculaire sur le Bassin parisien sera très fort ce mardi et la nuit de mardi à mercredi" avec une chaleur "particulièrement éprouvante". Mardi sera la journée la plus chaude de cet épisode avec des minimales très élevées, comprises entre 20 et 24°C voire un peu plus très localement, et des maximales atteignant 36 à 40°C avec quelques pointes à 41°C dans les départements en vigilance rouge.
Soixante-huit départements sont par ailleurs maintenus en vigilance orange et seuls les départements proches de la Manche et des frontières belges conserveront des températures inférieures à 34°C. Une baisse sensible s'amorcera mercredi matin sur les régions proches de la Manche et la façade atlantique, prémices d'un probable rafraîchissement mercredi soir sur le Bassin parisien.
La vigilance rouge pour canicule est le niveau le plus élevé du "plan national canicule" (après jaune et orange) et correspond à la fois à un événement météorologique exceptionnel et à une alerte sanitaire justifiant une "mobilisation maximale". "Le niveau de vigilance rouge correspond à une canicule extrême, exceptionnelle par sa durée, son intensité, son extension géographique, et présente un fort impact sanitaire pour l'ensemble de la population et des impacts sociétaux (sécheresse, approvisionnement en eau potable, aménagement ou arrêt de certaines activités, etc.)", précise Météo France. Le niveau de vigilance rouge est déclenché par Météo France en concertation avec les autorités sanitaires.
Le niveau de vigilance rouge a des impacts sur l'ensemble de la population, avec des conséquences sur nombre d'activités, notamment en plein air. Les préfets des départements placés en vigilance rouge peuvent interdire ou limiter l'ampleur de certains événements comme des manifestations sportives ou des festivals. Des consignes peuvent également être diffusées aux crèches, aux centres de loisirs et aux organismes accueillant des séjours de vacances pour annuler les sorties, les activités sportives et les événements festifs. Certains établissements peuvent être amenés à fermer si la température dans leurs locaux est trop élevée.
Les conseils de comportement sont les mêmes que pour les départements en vigilance orange, mais avec une insistance sur le fait qu'ils s'appliquent même pour les sujets en bonne santé.
Attention aux plus fragiles
Y compris dans les départements en vigilance orange, pour tenter de soulager leurs administrés, les collectivités ont déployé tout un arsenal de mesures : cartes indiquant les endroits climatisés, gratuité des piscines ou des musées, parcs.
Le Premier ministre, François Bayrou, a reporté un déplacement prévu ce mardi 1er juillet pour suivre la situation au plus près. La veille au soir, une réunion interministérielle de crise s'est tenue à Beauvau afin de "repasser toutes les consignes" notamment en matière de "santé", selon le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau.
À son issue, la ministre de l'Éducation, Élisabeth Borne, a rappelé les mesures à prendre dans les écoles, pouvant aller jusqu'à l'autorisation de garder les enfants à domicile. Quelque 200 écoles publiques, sur 45.000, font l'objet d'une fermeture partielle ou totale jusqu'à mercredi. "Nous allons nous assurer qu'il y a bien un accueil pour les familles qui en ont besoin", a-t-elle précisé (voir notre article de ce jour dédié à la question des établissements scolaires).
Valérie Létard, la ministre chargée du logement, a de son côté rappelé "la mobilisation totale de l’État et notamment des préfectures, aux côtés des collectivités territoriales et des acteurs associatifs, pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables : sans-abri, personnes vivant en habitat précaire (squats, bidonvilles, aires d’accueil), en hébergement ou en logement-foyer". Outre la diffusion de recommandations de vigilance aux acteurs de terrain, cela implique entre autres le renforcement et l'élargissement des horaires des maraudes pour les personnes à la rue, la prolongation des horaires des accueils de jour, l'ouverture de places temporaires par exemple en gymnases… Et le ministère de rappeler l'existence de Canicule Info Service joignable au 0800 06 66 66 (de 9h à 19h).
Yannick Neuder, le ministre en charge de la santé, a pour sa part encouragé les personnes de plus de 65 ans à s'inscrire sur les registres mis en place par les communes pour lister les personnes vulnérables aux vagues de chaleur, ce qui leur permet d'être régulièrement contactées par les services municipaux pour s'assurer de leur bonne santé.
Salariés et agents sous haute protection
Un "plan canicule" sera actionné à compter du même jour dans les services publics, a annoncé ce 30 juin le ministre de la Fonction publique. "Nos agents publics se mobilisent pour garantir la continuité de nos services publics, (…) en dépit de conditions de chaleur intense. (...) Nous sommes à leurs côtés pour les protéger et prévenir les risques", a déclaré Laurent Marcangeli dans un communiqué publié en fin d'après-midi.
"Fournir au minimum trois litres d'eau par jour à chaque agent", "préserver un accès garanti à l'eau potable et fraîche", "mettre à disposition un local ou un espace rafraîchi", "aménager les postes ou les horaires de travail, dès lors que cela est possible", "redoubler de vigilance pour les travailleurs en extérieur", "porter encore plus d'attention aux agents dont l'âge ou l'état de santé les rend plus vulnérables"... Le ministre rappelle dans ce communiqué les règles auxquelles les employeurs publics doivent prêter attention en cette période.
Ces mesures figurent pour certaines dans un décret paru il y a tout juste un mois et qui entre en vigueur précisément ce 1er juillet. Entre autres dispositions, ce texte "renforce les dispositions de prévention (...) pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs face à la chaleur, en particulier lors des épisodes de chaleur intense", expliquait le ministère du Travail dans une instruction du 5 juin.
Les employeurs sont notamment tenus d'évaluer les risques liés à l'exposition des travailleurs à la chaleur intense, "en intérieur ou en extérieur". Si un risque est identifié pour leur santé et leur sécurité, des mesures doivent être définies (adaptation de l'organisation du travail, moyens techniques, équipements de travail, information et formation...).
Ce décret concerne les employeurs des secteurs privé et public, donc les employeurs territoriaux. Car si les règles en matière d'hygiène et de sécurité au travail dans la fonction publique territoriale sont régies par un décret du 10 juin 1985, elles sont avant tout alignées sur le code du travail.
Mais face à l'ampleur inédite de la canicule, le gouvernement a déjà envisagé de nouvelles mesures, comme l'a annoncé la ministre du Travail, Catherine Vautrin. Le gouvernement publiera au Journal officiel, ce 1er juillet, un nouveau décret renforçant les obligations des employeurs à l'égard de leurs salariés exposés aux fortes chaleurs. "Nous venons de sortir un nouveau décret, il est signé, il est publié au Journal officiel de demain", a déclaré la ministre ce 30 juin, à l'issue du comité interministériel de crise animé par le ministre de l'Intérieur et auquel participait le directeur de cabinet du Premier ministre. "Vous avez celles et ceux qui ont la possibilité du télétravail. Pour les autres, il faut adapter : c'est le sens du décret qui sera publié demain", a-t-elle dit à la presse lors d'un "micro tendu" retransmis par BFMTV. Le texte "donne cette obligation aux entreprises d'adapter les positions de travail, d'adapter les horaires". Avec les nouvelles dispositions, "on a franchi un cap supplémentaire pour guider les entreprises et pour leur demander d'être plus vigilantes sur ces moments de très forte canicule", a estimé Catherine Vautrin.
Impact environnemental
Outre la santé des Français, la vague de chaleur nationale impacte l'environnement : 26 départements étaient ce lundi en vigilance pour la sécheresse, et 10 au niveau de crise, entraînant des restrictions importantes des usages.
Ce contexte est propice aux incendies : dans l'Aude, 400 hectares de forêt ont brûlé dans le massif des Corbières en raison d'un barbecue mal éteint. Plus de 600 pompiers ont dû être déployés pour maîtriser les flammes. Dans l'Indre, pour prévenir tout départ de feu, les massifs forestiers sont interdits aux particuliers. Les travaux agricoles, notamment les moissons et la fauche, sont également interdits en plaine lundi après-midi, tout comme les travaux forestiers, selon la préfecture.
Une pollution de l'air est également en train de s'installer pour l'ozone, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes ou sur les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse. Des restrictions de circulation ont été décidées en Île-de-France.