Une PPL pour favoriser le remplacement des enseignants absents par des professeurs retraités
Une proposition de loi veut instaurer une "réserve opérationnelle" d'enseignants à la retraite pour répondre à certains besoins de remplacements dans les établissements scolaires. Un vœu que partage déjà le ministère de l'Éducation nationale.

© Nicolas TAVERNIER/REA
Créer une réserve d'enseignants à la retraite susceptibles d'assurer des remplacements dans les établissements scolaires en cas d'absence d'enseignants en poste, c'est l'idée défendue par la sénatrice des Ardennes Else Joseph à travers une proposition parlementaire de loi (PPL) déposée le 28 mai 2024.
Cette PPL arrive alors que l'année scolaire qui s'achève a été marquée par de nombreuses actions autour de cette question. Douze maires de Seine-Saint-Denis ont pris des arrêtés mettant l'État en demeure d'appliquer un "plan d'urgence" pour l'éducation, avant que ces textes ne soient invalidés par le tribunal administratif de Montreuil en avril. Le même mois, à la suite de la plainte d'un collectif de parents d'élèves, l'État a été condamné par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise pour les "heures perdues" par des élèves en raison du non-remplacement de professeurs (lire notre article du 2 mai).
Près de 10% d'heures perdues
À combien s'élèvent ces pertes d'heures causées par des absences d'enseignants non remplacés ? Selon la direction de l'évaluation, de la performance et de la prospective (Depp) du ministère de l'Éducation nationale, 8,8% des 175 millions d'heures dispensées dans le second degré (collèges et lycées) en 2020-21 n'ont pas été assurées, soit 15,4 millions d'heures. Dans un rapport de 2021, la Cour des comptes évaluait à près de 10% les heures de cours "perdues" en 2018-2019 dans le secondaire.
Avec sa PPL, Else Joseph entend faire face à l'"absence de disponibilité immédiate des enseignants" qui "ne peut être assurée, en si peu de temps, par des recrutements". Selon elle, "des enseignants retraités, dont l'expérience n'est plus à démontrer, se déclarent prêts à enseigner, mais ils ne peuvent le faire parce qu'aucun dispositif ne permet à ce jour leur intervention au sein des établissements scolaires". Ce qui, à ses yeux, "constitue un gâchis en ressources humaines".
Répondre à des situations d'urgence
Son texte vise donc à instituer une réserve opérationnelle d'enseignants au sein des établissements scolaires du premier et du second degré. Il fixe tout d'abord les cas où il pourrait être possible de recourir à une telle réserve. Il s'agit en l'occurrence "de répondre à des situations d'urgence au sein d'un établissement scolaire du premier ou du second degré caractérisées par un besoin immédiat d'assurer un ou plusieurs enseignements". Autrement dit, cette réserve ne pourrait pas être sollicitée pour tout type de remplacement, en particulier ceux liés à des absences dues à des événements prévisibles (formation, maternité, etc.).
Enfin, la réserve opérationnelle d'enseignants serait constituée "d'anciens enseignants retraités qui répondent aux conditions d'expérience requises dans le domaine de l'enseignement". Il reviendra au ministre de l'Éducation nationale de déterminer les conditions d'intégration à cette réserve. Quant aux réservistes, une fois habilités, ils devront souscrire un contrat d'engagement selon des conditions définies, là encore, par le ministre de l'Éducation nationale.
Cette PPL a-t-elle une chance d'aboutir ? Si l'on en croit le "plan de préparation RH de la rentrée scolaire 2024", qui a fuité dans la presse, le ministère aurait déjà prévu de "favoriser le recours aux professeurs retraités", et ce, alors que des retraités de l'Éducation nationale avaient déjà été sollicités pour reprendre du service à l'automne 2021, sans grand succès. Cette fois, afin de "mobiliser ce vivier habituellement peu enclin à se réinvestir", il est précisé que les académies pourront leur proposer "une rémunération attractive".