Logement - Après la loi Macron, première opération de Vefa inversée pour un organisme HLM

Le 7 décembre, Paris Habitat - principal bailleur social parisien avec 123.000 logements gérés sur la capitale et la proche banlieue - lance la première opération en France de Vefa inversée (vente en l'état futur d'achèvement). Contrairement à la Vefa classique - dans laquelle un bailleur social achète sur plan à un promoteur privé de futurs logements sociaux -, la Vefa inversée consiste, pour un organisme HLM, à vendre des logements non sociaux à un promoteur privé, dans le cadre d'une opération mixte comportant en majorité des logements sociaux.

Une expérimentation non aboutie avec la loi Alur...

La consultation lancée par Paris Habitat porte sur 132 logements destinés à une occupation locative à loyer libre, s'inscrivant dans le cadre de l'aménagement de l'ancienne caserne de Reuilly (12e arrondissement), qui porte sur un ensemble de 580 logements. Bien que concernant un seul grand bâtiment, l'opération de Vefa inversée est proposée en deux lots de 53 et 79 logements, qui peuvent être acquis conjointement ou séparément.
Le principe de la Vefa inversée répond à une demande de l'Union sociale pour l'habitat (USH), et plus particulièrement de son ancien président Jean-Louis Dumont (voir notre article ci-contre du 23 septembre 2013). L'objectif était à la fois de mieux solvabiliser les opérations et de favoriser la mixité sociale.
Après diverses péripéties, la mesure a finalement été intégrée sous la forme d'un amendement à la loi Alur (pour l'accès au logement et un urbanisme rénové) du 24 mars 2014 (voir nos articles ci-contre du 28 octobre 2013 et du 27 mars 2014). Il s'agissait alors d'une simple expérimentation, mais - comme d'autres dispositions de la loi Alur - celle-ci n'a pas été mise en œuvre faute du décret d'application fixant la part maximale d'une opération de Vefa inversée au sein d'un programme mené par un bailleur social. Par ailleurs, la loi Alur restreignait la mise en œuvre de la Vefa inversée à un champ très limité.

... mais une mesure généralisée et élargie avec la loi Macron

La mesure a donc été pérennisée et élargie par l'article 98 de la loi Macron du 6 août 2015 (loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques). La nouvelle rédaction de l'article L.433-2 du Code de la construction et de l'habitation (CCH) prévoit ainsi qu'"un organisme d'habitations à loyer modéré peut également [...] vendre des logements à une personne privée, dès lors que ces logements font partie d'un programme de construction composé majoritairement de logements sociaux, dans la limite de 30% de ce programme".
Contrairement à la loi Alur qui renvoyait à un décret pour la fixation de ce plafond, la limite de 30% a donc été fixée directement dans la loi Macron. Cette dernière a également étendu le champ de la Vefa inversée. Jusqu'alors limitée aux terrains acquis dans le cadre de la décote dite "logement social", celle-ci est désormais possible sur tous les terrains situés en zones tendues, autrement dit sur le territoire des communes où s'applique la taxe sur les logements vacants (dont la liste est fixée par le décret n°2013-392 du 10 mai 2013).
Autre contrainte, qui explique que la première opération a été un peu longue à émerger : le bailleur social qui décide de lancer une opération de Vefa inversée doit mettre en place une comptabilité séparée, permettant de distinguer les opérations relevant - selon la définition européenne - du service d'intérêt économique général (autrement dit les logements sociaux) de celles qui n'en relèvent pas (les logements privés). Au-delà de la première revendiquée par Paris Habitat, il reste maintenant à savoir si le recours à la Vefa inversée va se banaliser ou rester d'un usage exceptionnel.