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Avec la notion d'"hyper-industrie", l'ADCF donne une vision moins fataliste de l'industrie française

Si l'industrie traditionnelle perd de l'emploi depuis bon nombre d'années, et notamment depuis la crise de 2008, l'"hyper-industrie", faite à la fois de service et de fabrication très intégrée, en gagne. Dans une note publiée en octobre 2020, l'ADCF décortique ce concept, initié par l'économiste Pierre Veltz, et fait part d'une vision moins fataliste de l'économie industrielle en France, cette hyper-industrie disposant selon l'association d'un "avenir réel" et cela "à peu près partout sur le territoire national".

En France, l'industrie perd du terrain au fil des ans. Mais si on élargit le secteur aux services qu'il génère, la vision est bien différente. Une note réalisée par le Cabinet OPC à la demande de l'ADCF, publiée en octobre 2020, revient sur ce concept d'hyper-industrie, ou péri-industrie, développée par l'économiste Pierre Veltz. Une notion qui consiste à prendre en compte l'hybridation de plus en plus forte entre industrie et services. "Tandis que l'industrie devient de plus en plus servicielle, les services s'industrialisent également fortement de leur côté, détaille la note. Aujourd'hui en France, 83% des entreprises industrielles vendent des services et même 26% d'entre elles ne vendent que du service."

Face à ces données, Pierre Veltz conteste l'idée d'émergence d'une société "post-industrielle", une économie dans laquelle l'industrie n'aurait plus qu'un très faible rôle à jouer. Car le poids de cette hyper-industrie est plus important que l'industrie dans son acception traditionnelle. Son implantation géographique et son évolution face à la crise économique et financière de 2008 sont également très différentes.

Ainsi, en 2008, ces secteurs hyper-industriels tels que définis par Pierre Veltz concentraient 4,7 millions d'emplois salariés privés, contre plus de 3,1 millions pour le secteur industriel classique ; en 2016, ils comptent plus de cinq millions d'emplois salariés privés, soit 28,3% de l'emploi salarié privé total, contre 2,7 millions, soit 15% seulement de l'emploi salarié privé total pour le secteur traditionnel. Non seulement cette hyper-industrie concentre davantage d'emplois que l'industrie classique mais son évolution post-crise est plus que positive, avec presque 350.000 emplois en plus. Dans le même temps, l'industrie traditionnelle en perdait plus de 423.000…

 

"L'hyper-industrie a résisté"

"Son dynamisme a permis de compenser à hauteur de 80% les pertes enregistrées par le secteur industriel sur la même période", précise la note. Seules les intercommunalités de moins de 20.000 habitants ont subi une réduction des effectifs hyper-industriels. De leur côté, les métropoles de plus de 500.000 habitants enregistraient la croissance la plus rapide durant cette période. Cela dit, "nombre de communautés plus modestes ont fait preuve d'un dynamisme exceptionnel et généré d'importants volumes d'emplois", insiste la note, citant notamment les communautés de Jalle-Eau-Bourde (+ 3.724 emplois créés, soit 95,2% de croissance), du Frontonnais (+ 1.450 emplois créés soit 67,7% de croissance) ou du pays de Redon (+ 1.214 emplois, 74,3% de croissance). Et globalement "l'hyper-industrie a résisté et progressé dans un nombre beaucoup plus important d'intercommunalités que l'industrie traditionnelle" indique l'ADCF.

Autre particularité : contrairement à l'industrie, le poids de l'hyper-industrie croît au fur et à mesure que l'on s'élève dans les strates d'intercommunalités. "Alors qu'ils ne représentent que 15,8% de l'emploi dans les communautés de moins de 20.000 habitants, les secteurs hyper-industriels concentrent 36,3% de l'emploi dans les métropoles de plus de 500.000 habitants, soit plus du double", précise l'ADCF. Cela dit, cette hyper-industrie n'est pas que le fait des métropoles : parmi les 20 intercommunalités qui affichent le plus grand ratio d'emplois hyper-industriels, figurent 17 communautés de communes dont 7 ont moins de 20.000 habitants. Il s'agit notamment des communautés de communes de l'Estuaire-Canton de Saint Ciers sur Gironde et du Val d'Eyre en Nouvelle-Aquitaine, de la communauté de communes Tille et Venelle en Bourgogne-Franche-Comté ou encore de celle Pays Fort Sancerrois Val-de-Loire en Centre-Val de Loire.

 

"Cette hyper-industrie dispose d'un avenir réel à peu près partout sur le territoire national"

La cartographie du poids de ces secteurs hyper-industriels est aussi très différente de celle de l'industrie classique. Quelques pôles de ce type de taille significative sont répertoriés autour de métropoles (Rennes, Bordeaux, Toulouse, Lyon, Lille notamment), le long de l'axe rhodanien "étendu", c'est-à-dire de Marseille jusqu'à Dijon, du sillon alpin (de Grenoble à Genève) et du sillon lorrain (de Nancy jusqu'au Luxembourg). On en enregistre aussi en Île-de-France, dans l'Oise, autour de l'agglomération de Pau et du pôle de Lacq ou le long de la Loire, entre Blois et Chambord. "Les terres d'industries traditionnelles que sont la région Grand Est, la Franche-Comté ou dans une moindre mesure l'Orne, la Sarthe et la Mayenne présentent en revanche une très faible orientation hyper-industrielle, précise la note, tandis que le pourtour méditerranéen apparaît beaucoup plus hyper-industriel qu'il n'est industriel."

Cette hyper-industrie "dispose au demeurant d'un avenir réel, à peu près partout sur le territoire national", conclue la note. Plutôt que d'investir pour gagner de nouvelles parts de marché dans les industries manufacturières traditionnelles, l'ADCF propose ainsi de prendre les devants dans la nouvelle industrie 4.0 et cette économie hyper-industrielle, faite à la fois d'activités de services et de fabrication très intégrée.