Cannes veut interdire les navires de croisière polluants

La mairie de Cannes et la chambre de commerce et d'industrie Nice-Côte d'Azur ont élaboré une charte imposant aux navires de croisière d'être moins polluants pour débarquer leurs passagers à compter de 2020. La cité de la côte d'Azur veut ainsi aller plus loin que ne l'exige actuellement la loi pour lutter contre les émissions de soufre des paquebots, qui aggravent la pollution de l'air.

Quatrième port de croisière français après Marseille, Ajaccio et Le Havre, Cannes veut s'attaquer à la pollution générée par les paquebots. Avec la chambre de commerce et d'industrie (CCI) Nice-Côte d'Azur, gestionnaire du Vieux Port, la mairie a élaboré une "Charte croisière" pour que les compagnies maritimes respectent plusieurs engagements environnementaux destinés à préserver sa baie et son écosystème.
Pour réduire les émissions polluantes dans l'air, elle imposera notamment aux navires de croisière de limiter la teneur en soufre de leur carburant à 0,1% - une exigence qui va plus loin que la loi - pour pouvoir débarquer leurs passagers. Le maire David Lisnard (LR) et la CCI ont déjà signé ce 25 juillet une charte en ce sens avec le groupe américain Norwegian Cruise Line Holdings qui représente 40% environ du trafic dans la cité azuréenne. Une autre compagnie doit la parapher incessamment. Les émissions de soufre sont limitées dès l'entrée dans la zone de pilotage, située derrière les îles de Lerins. "Les compagnies refusant de signer cette charte se verront interdites, dès le 1er janvier 2020, de débarquer leurs passagers à Cannes", précise un communiqué.

400.000 touristes en escale

Cannes table sur plus de 400.000 touristes en escale cette année. Les croisiéristes passent en moyenne moins de cinq heures en ville, mais la majorité prévoient de revenir ensuite sur la Côte d'Azur. Les retombées annuelles directes et indirectes sont estimées à quelque 56 millions d'euros. La ville rappelle que pour une compagnie de croisière, le budget carburant représente 40% du coût global d'exploitation du bateau. Cannes applique donc une ristourne, de 0,20 euro par passager sur les droits de port, pour encourager l'application des différents engagements de la charte sur la réduction des pollutions (zéro rejet d’eaux usées traitées en mer, contournement des herbiers de posidonies lors des manœuvres et de l'ancrage, excursions en bus propres,  limitation des rejets d’émissions polluantes à terre…). Le maire de Cannes demande aussi au gouvernement d'amender le projet de loi d'orientation des mobilités (Lom) pour étendre la zone d'application des pouvoirs de police portuaire des maires du littoral à la zone de mouillage, soit au-delà de la zone actuelle située à 300 mètres du rivage.

Cinq ports français pollués par les émissions d'oxydes de soufre des paquebots

Les paquebots de croisière sont régulièrement épinglés pour les nuisances environnementales qu'ils génèrent, à commencer par la pollution de l'air. Selon une étude publiée en juin par le groupement d'ONG européennes Transport&Environment, qui a mesuré la quantité d’oxydes de soufre émis par les paquebots de croisière faisant escale dans les ports européens, cinq ports français font partie des cinquante plus pollués par ce composant toxique. Marseille arrive en tête, avec des émissions de 15 tonnes par an, soit un chiffre quatre fois plus élevé que celui de tous les véhicules circulant dans la cité phocéenne. Le Havre, Nice, Cannes et La Seyne-Sur-Mer sont les autres ports français les plus touchés.
Aujourd'hui, les émissions de soufre sont limitées à 0,1% en mer du Nord, en mer Baltique et en Manche depuis 2015, sous la pression notamment des Scandinaves. Les bateaux utilisent pour respecter cette norme un carburant à la bonne teneur, ou un scrubber ou un système équivalent qui permet de neutraliser les gaz toxiques.

Teneur supérieure au diesel des voitures

En France, la loi a fixé en 2015 la teneur maximale en soufre dans le carburant des navires transportant des passagers à 1,5%, contre 3,5% pour les autres, sauf si l'escale dure plus de deux heures, auquel cas les navires doivent passer au diesel marin à quai (0,1% de soufre). La quantité maximale de soufre dans le carburant des paquebots et ferries devrait encore baisser en 2020, de 1,5% à 0,5%, mais cela reste encore cinquante fois supérieur au diesel d'une voiture (0,01% de soufre).
Lors des débats sur le projet de loi énergie et climat au Sénat, le groupe socialiste a défendu en vain plusieurs amendements pour lutter contre la pollution liée à ces navires dans les ports. Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et des Transports, a assuré partager "tout à fait cette préoccupation" mais s'est opposée aux différents amendements, arguant notamment que de nouvelles normes s'appliqueront au 1er janvier 2020 qui divisent par sept la teneur en soufre des carburants maritimes.

 

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