Commande publique - Capacité financière des jeunes entreprises : attention à la nature des documents fournis
Une problématique revient souvent dans les questions parlementaires : faciliter l'accès des PME, y compris les plus jeunes d'entre elles, à la commande publique. Bercy avait par exemple été interrogé l'an dernier par la députée Bérengère Poletti sur le cas des entreprises de création récente. Répondant à cette question écrite, le ministre de l'Economie avait alors rappelé que ces entreprises pouvaient, si elles n'étaient pas en mesure de fournir les déclarations de chiffre d'affaires des trois derniers exercices, le faire "par tout autre moyen". Encore faut-il que ces moyens soient crédibles lorsque ces jeunes sociétés présentent "tout autre document" - car "tout autre document" ne signifie pas "n'importe quel document". Tel est le sens d'une décision rendue par le Conseil d'Etat le 9 mai 2012.
Dans cette affaire, une commune avait lancé un appel d'offres pour un marché à bons de commande relatif à la fourniture de vêtements de travail et d'équipements de protection pour ses agents. Une entreprise écartée avait contesté le choix de la collectivité, estimant que celle-ci avait méconnu le règlement de la consultation en retenant une société qui n'avait pas pu fournir les déclarations de chiffres d'affaires des trois derniers exercices ni de références de prestations similaires exécutées au cours de ces mêmes trois dernières années. En sachant que dans ce cas de figure, le Code des marchés publics prévoit dans son article 45 que ces jeunes sociétés ont la possibilité de se retourner "par tout autre moyen" afin d'attester de leurs capacités professionnelle, technique et financière.
Or, dans l'affaire, ces conditions n'étaient pas réunies, ont estimé les Sages du Palais royal. En effet, la société concernée, pour justifier de sa capacité financière, s'était simplement "bornée à produire une attestation de bonne tenue de compte rédigée sur papier sans en-tête par son conseiller bancaire"... De surcroît, cette attestation indiquait simplement que "les comptes bancaires de la société fonctionnaient normalement, qu'ils n'avaient fait l'objet d'aucun incident de paiement et que la société était à jour de ses engagements contractés auprès de l'établissement bancaire".
Ces éléments trop peu nombreux ne sont pas apparus suffisamment crédibles. Pour le Conseil d'Etat, "une telle attestation ne pouvant suffire à établir la capacité financière de la société à exécuter le marché, cette dernière ne pouvait être regardée par la commune comme ayant justifié de sa capacité financière". Une liste de documents pouvant être demandés aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs a d'ailleurs été fixée par un arrêté du 28 août 2006. Dans cette liste figure notamment la "déclaration appropriée de banque".
L'Apasp
Références : Conseil d'Etat, 9 mai 2012, Commune de Saint-Benoît, n°356455 ; Assemblée nationale, question écrite n°101273 de Bérengère Poletti.