Chute des DMTO : le fonds de péréquation devrait amortir un peu le choc

Le Comité des finances locales (CFL) a décidé le 11 juillet que l'intégralité de l'enveloppe alimentant, en 2023, le mécanisme national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) – soit 1,91 milliard d'euros – sera utilisée sans délai. Il s'agit de tenir compte du repli en cours du produit de cette taxe, qui pourrait atteindre 15%, voire plus, à la fin de l'année. D'autres sujets étaient à l'ordre du jour de la réunion du CFL, tel un projet de décret sur la rémunération des personnels des centres de santé et un bilan de l'exécution de l'objectif d'évolution de la dépense locale (Odedel).

Pour sa quatrième année d'existence, le fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) qui sont perçus par les départements atteint un montant de 1,91 milliard d'euros, selon des données que la direction générale des collectivités locales (DGCL) a communiquées, mardi 11 juillet, au Comité des finances locales (CFL). Légèrement supérieure à celle de 2022 (1,89 milliard d'euros), la somme équivaut à 12% du produit total des DMTO dont les départements ont bénéficié l'an dernier (16,56 milliards d'euros).

Après avoir bondi en 2021 (+25,7%), ces recettes liées aux transactions immobilières ont encore enregistré une hausse (+1,7%) en 2022. La manne profite toutefois évidemment davantage à certains départements qu'à d'autres. Par exemple, la ville de Paris bénéficie d'un montant de 602 euros par habitant (avant mise en œuvre du fonds de péréquation), contre moins de 8 euros pour Mayotte.

Le CFL a décidé, le 11 juillet, que l'intégralité de l'enveloppe de 1,91 milliard d'euros sera répartie entre les 70 départements "bénéficiaires nets". Ainsi, le CFL n'a pas mis en réserve une partie des recettes qui alimentent le fonds cette année. Un choix lié à la dégradation de la conjoncture immobilière observée par les acteurs du secteur et à la baisse des DMTO qui en résulte dès cette année. Les premières estimations dont dispose Départements de France font état d'une réduction de ces recettes d'"au moins" 15% à la fin de l'année (par rapport à l'an dernier).

Fonds de soutien

Une situation difficile qui a amené l'association à solliciter auprès du gouvernement l'allocation par l'Etat d'un fonds de soutien destiné, dès cette année, aux départements rencontrant les plus grandes difficultés budgétaires. Les discussions entre les élus et l'exécutif sur l'éventualité de ce coup de pouce ont déjà commencé.

L'option retenue par le CFL - l'utilisation intégrale des 1,91 milliard d'euros du prélèvement effectué en 2023 au titre du fonds - est celle que soutenaient les présidents de département. "Dans le cadre de notre demande au gouvernement, nous avons considéré qu'il fallait au préalable utiliser les leviers qui sont à notre disposition", explique Nicolas Fricoteaux, président du conseil départemental de l'Aisne et membre du CFL.

Avec la décision prise mardi par le comité, les versements effectués dans le cadre du dispositif de péréquation des DMTO sont en hausse de 13% par rapport à ceux de l'an dernier. Les perspectives de contraction des DMTO n'ont cependant pas conduit le CFL à toucher à la réserve qui a été constituée par le passé (notamment en 2022) sur les prélèvements destinés au fonds. Cette réserve s'élève donc toujours à près de 249 millions d'euros. Une somme à laquelle le CFL ne sera peut-être pas obligé de recourir en 2024. Dans l'hypothèse d'une baisse de 15% des DMTO, le fonds de péréquation pourrait atteindre, malgré tout, un montant de 1,6 milliard d'euros, selon des estimations dont dispose Départements de France.

Lors de sa séance, le CFL a examiné plusieurs autres points, parmi lesquels :

  • La rémunération des personnels employés dans les centres de santé

Les collectivités et les groupements de communes à fiscalité propre gérant des centres de santé vont recevoir "en 2023" une dotation exceptionnelle de l'Etat pour les aider à allouer une prime exceptionnelle ou une revalorisation de la rémunération des personnels de ces centres. Une mesure du gouvernement, inscrite dans la loi du 1er décembre dernier de finances rectificative pour 2022 (sur les dispositions de cette loi, voir notre article du 7 décembre), prévoit en effet à cette fin une enveloppe de 8 millions d'euros. La dotation sera répartie entre les communes et intercommunalités à fiscalité propre "gérant soit directement, soit par l’intermédiaire d’un centre communal ou intercommunal d’action sociale, un centre de santé", et ce "à due proportion des effectifs (administratifs, paramédicaux ou médicaux) évalués en équivalents temps-pleins travaillés (ETPT) constatés en 2022", précise un projet de décret que le CFL a examiné.
Les centres de santé ne font pas partie des établissements ou services ouvrant droit au complément de traitement indiciaire (CTI) qui a été accordé dans le cadre des accords du Ségur de la santé et de ses suites.

  • L'objectif d'évolution de la dépense locale

A l'ordre du jour du CFL figurait aussi le bilan annuel de l'exécution de l'objectif d'évolution de la dépense locale (Odedel) fixé par la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022. Selon ce bilan réalisé par la direction du Budget, il apparaît que l'objectif (+1,2% d'augmentation annuelle des dépenses réelles de fonctionnement) a été fortement dépassé en 2022. Avec le regain de l'inflation, les dépenses de fonctionnement des collectivités et de leurs groupements ont en effet progressé l'an dernier de 4,8%, par rapport à 2021.

A cause de ce dérapage, l'Odedel - qui n'a qu'une valeur indicative - n'a pas été respecté au cours de la période 2018-2022. L'évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités s'est en effet élevée à 9,8% (contre un objectif de 6,2%). Les intercommunalités à fiscalité propre sont les plus mauvais élèves (avec une hausse de leurs dépenses de fonctionnement de 22,9% par rapport à 2017), alors qu'à l'inverse les départements sont très proches de l'objectif (+6,3%).

Par ailleurs, les collectivités n'ont pas atteint l'objectif de diminution de leur besoin de financement (différence entre les emprunts et les remboursements de dette). En 2022, ce dernier a augmenté de 447 millions d'euros, alors que la loi prévoyait un recul de 2,6 milliards d'euros. Pour rappel, l'objectif avait presque été atteint (-2,5 milliards d'euros) en 2021. Mais un besoin de financement de 4 milliards d'euros s'était creusé l'année précédente, du fait de la crise sanitaire.

Au total, sur la période 2018-2022, le besoin de financement des collectivités a progressé de 1,9 milliard d'euros, alors que l'objectif était une réduction de 13 milliards d'euros.