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Insertion - Combien de travailleurs pauvres ?

L'Observatoire des inégalités publie une note sur "les travailleurs pauvres en France". Une question d'actualité, dans la mesure où ceux-ci constituent précisément la cible que le RSA activité ne parvient pas véritablement à atteindre (voir nos articles ci-contre). La note estime que le nombre de travailleurs pauvres est compris entre un et deux millions, selon les définitions. Si l'on tient compte de l'ensemble du ménage (conjoint, enfants...) - et même en prenant la définition la plus restrictive - ce sont ainsi au moins deux millions de personnes appartenant à un foyer comptant un travailleur pauvre qui vivent avec environ 800 euros par mois pour un adulte seul.
La note indique qu'"un million de personnes exercent un emploi mais disposent, après avoir comptabilisé les prestations sociales (primes pour l'emploi, allocations logement, etc.) ou intégré les revenus de leur conjoint, d'un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté, fixé à la moitié du revenu médian". Ce chiffre monte à 1,925 million si l'on prend en compte le seuil à 60% du revenu médian. En dépit de l'ampleur de la crise économique à l'œuvre depuis 2007, le nombre de ces travailleurs pauvres a progressé de façon relativement modérée entre 2003 et 2010 : 83.000 personnes supplémentaires (+9%) au seuil de 50% du revenu médian et 154.000 (+8,7%) à celui de 60%. Si l'on prend en compte l'ensemble du foyer, le nombre de personnes pauvres - chef de ménage, enfants et conjoints - vivant dans un ménage dont le chef de famille exerce un emploi atteint 1,88 million de personnes au seuil de 50% du revenu médian et 3,84 millions à celui de 60%.
L'Observatoire des inégalités explique cette situation et ces évolutions par plusieurs raisons. La plus évidente est "la faiblesse des salaires dans de très nombreux secteurs et notamment du niveau du salaire minimum". Mais d'autres facteurs jouent également, comme le développement du temps partiel, "qui réduit en proportion les niveaux de vie", ou le fractionnement des emplois, avec la multiplication des petits boulots et l'alternance de phases d'emploi et de chômage ou d'inactivité.
La note renvoie à une étude plus ancienne (2008), mais très détaillée, publiée par l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (Onpes), intitulée "Une figure particulière de la pauvreté : les travailleurs pauvres". L'approche est toutefois un peu différente. Ainsi, les "travailleurs pauvres" correspondent aux "personnes qui, tout en ayant travaillé une partie de l'année, vivent dans un ménage dont les revenus ne suffisent pas à offrir à ses membres un niveau de vie supérieur au seuil de pauvreté monétaire". Ceux-ci représentent entre 6 et 7% de l'ensemble des travailleurs. Les hommes constituent 55% de cette population. La majorité de ces travailleurs pauvres ont un emploi en continu sur l'année, mais ils sont plus souvent exposés au temps partiel. Pour leur part, les "travailleurs économiquement pauvres" se définissent au niveau de l'individu et non plus du ménage. Ils représentent environ 15% de l'ensemble des travailleurs et affichent un profil assez différent, puisque les femmes constituent près de 70% des travailleurs économiquement pauvres. En outre, la part de l'emploi à temps partiel et des alternances professionnelles y est plus développée que chez les travailleurs pauvres.