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Urbanisme / Logement - Construction : les députés votent le recours aux ordonnances

L'Assemblée nationale a adopté dans la nuit du 21 au 22 mai 2013 le projet de loi autorisant le gouvernement à recourir à des ordonnances pour accélérer les projets de construction.

C'est à l'issue d'un vote à main levée que les députés ont adopté en première lecture dans la nuit du 21 au 22 mai 2013 le projet de loi défendu par Cécile Duflot "habilitant le gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction". La ministre du Logement  a invoqué à la tribune "l'impérieuse nécessité de construire plus et mieux" pour justifier le recours aux ordonnances, une pratique généralement décriée par la gauche. Au cours des douze derniers mois (avril 2012 à mars 2013), le nombre de mises en chantier de logements (335.800) a plongé de 18% par rapport aux douze mois précédents. Cette évolution pèse sur l'emploi dans le bâtiment (-13.800 postes en 2012, sans parler de l'intérim) mais aggrave aussi considérablement une crise déjà alarmante du logement. "C'est un enjeu social, économique et écologique majeur", a lancé la ministre écologiste. "La pénurie de logements est une menace pour notre cohésion sociale", a-t-elle dit, ajoutant qu'elle "entendait la demande, voire la colère" des Français sur ce sujet. "Pour atteindre l'objectif de 500.000 logements par an, il faut faire sauter des verrous qui ne se justifient plus" a pour sa part souligné la rapporteure du texte, la députée socialiste de Paris Annick Lepetit, dont le groupe a voté le texte.
Bien qu'en accord avec une partie du texte, de nombreux députés UMP s'y sont opposés. Au cours de la discussion générale, Lional Tardy, député UMP de Haute-Savoie, a contesté "la méthode", jugeant que le recours aux ordonnances était un "désaisissement" du Parlement. Un peu plus tôt, Christian Jacob, chef de file des députés UMP, avait annoncé que son groupe voterait contre le texte "par principe, contre le recours aux ordonnances". Benoist Apparu, député UMP de la Marne, avait pourtant dit, en fin de semaine, qu'il n'avait "rien contre ce texte", ayant lui-même défendu plusieurs des mesures préconisées lorsqu'il était ministre du Logement de Nicolas Sarkozy. Les députés Front de gauche se sont abstenus. Leur président, André Chassaigne, a parlé d'"irrespect du Parlement" à propos du recours aux ordonnances même s'il a reconnu que "certaines mesures vont dans le bon sens". "Nous n'avons pas d'opposition pavlovienne sur le recours aux ordonnances", a estimé pour sa part Michel Piron, député UDI du Maine-et-Loire, qui a jugé que "les huit mesures allaient dans le bon sens" même si "elles sont loin de répondre à la crise". Le président de l'UDI, Jean-Louis Borloo, avait expliqué un peu plus tôt que son groupe ne voterait en faveur du texte qu'à la condition que la TVA soit abaissée dans tous les secteurs du logement. Impossible, avait répondu en substance Annick Lepetit, aucune mesure financière ne pouvant être prise dans le cadre d'ordonnances. Le député radical de gauche de l'Aisne Jacques Krabal a expliqué que le procédé des ordonnances devait "rester exceptionnel" mais a apporté son "soutien" à la politique du logement du gouvernement.

Peu d'amendements


Au final, les députés ont peu amendé le texte. Ils ont toutefois voté un article additionnel proposé par Daniel Goldberg, député PS de Seine-Saint-Denis, qui prolonge jusqu'au 31 décembre 2018 l'ouverture de la procédure de conception-réalisation aux organismes HLM censée prendre fin au 31 décembre 2013. Ils ont aussi précisé le contenu du 5° de l'article 1er, qui vise à faciliter la construction de logements en zones tendues en élargissant les possibilités de densification. Ils ont notamment adopté un amendement  déposé par Henri Jibrayel, député PS des Bouches-du-Rhône, qui stipule que "l'utilisation de ce dispositif [tient] compte de la nature du projet et de la zone concernée dans un objectif de mixité sociale". En adoptant un amendement présenté par Jean-Marie Tétart (UMP, Yvelines) , les députés ont par ailleurs étendu la possibilité de déroger aux obligations de création d'aires de stationnement en cas de surélévation d'un immeuble existant "à tous les projets de surélévation", y compris ceux visant à combler les dents creuses. Un sous-amendement défendu par Lionel Tardy a aussi apporté "une précision supplémentaire" à l'article 1er "en mentionnant explicitement" que ces dérogations "ne valent que pour les cas de surélévation". Un autre amendement déposé par Jean-Marie Tétart étend la possibilité de déroger aux règles du Code de la construction et de l'habitation aux projets de surélévation destinés à combler les dents creuses. Là encore, les députés ont voté un sous-amendement déposé par Lionel Tardy précisant que ces dérogations "ne valent que pour les cas de surélévation". 
Concernant le logement intermédiaire, les députés ont adopté un amendement déposé par Michèle Bonneton (EELV, Isère) précisant la notion d'"étanchéité des fonds relevant du logement social", un principe devant s'imposer aux filiales d'organismes HLM dédiées à la construction et à la gestion de logements intermédiaires qui avait été voté lors de l'examen par le commission des affaires économiques. On entend ainsi par "étanchéité des fonds" une séparation "stricte" et l'utilisation "à des fins exclusives de construction et de gestion du parc social" des fonds perçus par l'organisme mère au titre de l'activité de construction et de gestion du parc social, "tels que les fonds propres générés par la gestion du parc social et les subventions et prêts issus de l'épargne réglementée". Et ce, "de telle sorte que, d'une part, l'ensemble des dépenses afférentes à la construction de logements intermédiaires soient assurées par la filiale qui ne bénéficie pour cela d'aucun concours y compris en nature de la maison mère, et, d'autre part, que les personnes assurant la détermination effective de l'orientation de l'activité de ces filiales ne puissent assurer la détermination de l'orientation de l'activité au sein de l'organisme mère".

La commission des affaires économiques du Sénat examinera le projet de loi jeudi 23 mai. La discussion en séance publique aura lieu le 29 mai.