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Effectifs de police : l’exécutif toujours sur du donnant-donnant

Alors que le président de la République promet de "mettre du bleu dans la rue", le Premier ministre entend déployer d'ici au 1er septembre ses "contrats de sécurité intégrée" inaugurés le 9 octobre à Toulouse. Des contrats qui reposent sur des engagements réciproques, en particulier en termes d'effectifs.

Le nom n’apparaît pas en toutes lettres dans la longue interview donnée par le chef de l’État au Figaro lundi 19 avril, mais l’esprit y est. "À Montpellier, nous allons créer d’ici fin 2022 cinquante postes de policiers nationaux, la ville en créera quarante de plus en police municipale, sans parler des caméras de rue." Un donnant-donnant qui est bien dans l’esprit des nouveaux contrats de sécurité intégrée (CSI) promus par le Premier ministre, Jean Castex. Et Emmanuel Macron d’ajouter : "En matière de sécurité comme dans d’autres, quand État et communes avancent main dans la main (…), c’est une bonne nouvelle pour les citoyens." Au moment où le président de la République promet de "mettre du bleu dans la rue" pour rassurer les Français et de respecter son engagement de recruter 10.000 policiers et gendarmes d’ici à 2022, une circulaire du Premier ministre du 16 avril, dévoilée ce mercredi par La Gazette des communes, vient préciser les modalités de mise en œuvre de ces contrats de sécurité intégrée. Le premier de ces contrats avait été signé par Jean Castex lui-même, le 9 octobre à Toulouse, avec Jean-Luc Moudenc, maire de la ville et président de Toulouse métropole. "Quatre mois (sic) après ce premier engagement expérimental, il convient de préciser ce que peut être cet engagement commun (…) et la démarche que vous pourrez engager avec les collectivités territoriales", introduit le chef du gouvernement dans cette circulaire, alors que le dispositif est accueilli avec circonspection par les élus du Forum français pour la sécurité urbaine (FFSU) qui y voient une "rupture d’égalité pour la sécurité des citoyens". Or Jean Castex entend déployer son nouveau modèle contractuel et "faire remonter les collectivités volontaires" en vue de signer de nouveaux contrats "au plus tard pour le 1er septembre 2021".

Engagements réciproques

Le contrat repose sur un "diagnostic partagé" comprenant des éléments quantitatifs (niveau de délinquance) et qualitatifs (état des lieux des moyens et des méthodes de coopération) et comporte sept volets : sécurité, justice, prévention de la délinquance, mineurs, éducation nationale, radicalisation/séparatisme (échange d’information avec les collectivités) et transport.

Mais le CSI a aussi "pour objectif prioritaire de clarifier les engagements réciproques et de les inscrire dans une durée qui est celle des mandats municipaux restant à courir (5 ans)". L’apport de moyens supplémentaires de l’État doit s’accompagner d’un "engagement plus fort des collectivités territoriales, par effet de levier". Les fameuses contreparties...

Concrètement, l’État s’engage à apporter plus d’effectifs "et de présence sur la voie publique", plus de moyens (véhicules, matériels et immobilier dans le cadre des plans "poignée de porte" et du plan de relance), à mettre en place des QRR (quartiers de reconquête républicaine)… La liste des engagements des collectivités est plus large. Elle repose sur le nombre de policiers municipaux, leur présence sur la voie publique, l’extension des zones de patrouilles, l’armement, le développement de la vidéoprotection (nombre de caméras, création d’un centre de supervision urbain, extension des heures de visionnage, raccordement aux centres des forces de police et de gendarmerie). En matière de prévention de la délinquance, les collectivités devront plus particulièrement prendre des actions concernant les mineurs (actions éducatives, éducateurs de rue…).

"Détricotage"

Le Premier ministre demande également aux collectivités "d’approfondir leur partenariat" en matière d’immobilier, de logement, de gratuité des transports, de modes de garde des enfants des agents des forces de sécurité, ou encore d’échange d’information dans la lutte contre les trafics de stupéfiants. Il est enfin demandé aux maires de s'engager en faveur des travaux d'intérêt général.

Au-delà des maires, le Premier ministre souhaite que les préfets engagent un dialogue avec les présidents de métropoles et d’établissements publics de coopération intercommunale "des principaux bassins de délinquance", afin de signer des contrats qui couvrent des territoires intercommunaux.

Mais la logique qui sous-tend les CSI fait craindre à certains élus une prime aux communes les plus riches. Fin mars, lors d’un échange avec le secrétaire général du CIPDR (comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation) Christian Gravel, le président du FFSU, Roger Vicot, s’en était vertement pris à ce qu’il considère comme "un détricotage, en douce, par petites touches, de l'État régalien".
 

  • Où iront les renforts policiers en 2021 ?

Dès cette année, 2.000 policiers et gendarmes seront recrutés dont "l'essentiel" ira "directement sur la voie publique", promet le chef de l’Etat. Où iront ces effectifs ? D’après un document de la place Beauvau divulgué par Le Figaro, mardi 20 avril, les communes les mieux loties par les annonces à venir devraient être Besançon (43), Saint-Germain-en-Laye (39) Annecy (35), Nantes (33) ou Avignon (31) ou Chartres (31). Nantes a déjà fait connaître son intention de signer un contrat de sécurité intégrée. Plus surprenante est dans ce peloton de tête la place de Grenoble dont le maire Eric Piolle s’était accroché avec le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin sur les questions de sécurité à l’automne dernier. La ville devrait pourtant recevoir le renfort de 47 policiers cette année. Le document confirme aussi certaines annonces. Toulouse qui a signé un CSI le 9 octobre recevra en tout 98 policiers. Le Premier ministre souhaiterait que toutes les grandes agglomérations aient leur contrat. Elles sont bien servies : Lille reçoit 117 policiers, Lyon 135.  Marseille et Bordeaux où des discussions ont déjà démarré pour signer un CSI attendent respectivement 100 et 70 policiers cette année.

 

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