Cour des comptes - Emprunts toxiques des collectivités : une sortie de crise à 3 milliards d'euros
Le fonds de soutien créé pour neutraliser les emprunts risqués des collectivités locales s'est révélé efficace, selon l'institution de la rue Cambon. Mais le coût de l'opération atteint 3 milliard d'euros pour les finances publiques, souligne-t-elle.
La sortie des emprunts toxiques souscrits par les collectivités territoriales dans les années 2000 a été "une opération techniquement réussie", mais pour un coût "élevé de 3 milliards d'euros pour les finances publiques, considère la Cour des comptes dans un des chapitres du rapport annuel 2018 qu'elle a rendu public, ce 7 février (voir ce chapitre).
Sur 850 collectivités détentrices d'emprunts à risque, 676 ont déposé un dossier auprès du fonds de soutien initié en 2013 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, rappelle la cour. 579 d'entre elles ont finalement bénéficié de l'aide de ce dispositif.
"Une répartition des aides plutôt favorable aux plus petites communes"
Si l'on excepte le cas particulier des deux régions aidées par le fonds (à hauteur de 66%), il apparaît que les communes de moins de 10.000 habitants ont été les plus favorisées par le fonds, avec un taux moyen d'aide de 62%. Les grandes collectivités territoriales ont obtenu des aides moins généreuses en proportion des indemnités de sortie qu'elles ont eu à verser. Mais elles figurent en bonne place dans la liste des plus gros bénéficiaires en volume. Une liste qui fait apparaître un trio de tête composé du conseil départemental du Rhône, de la collectivité territoriale de Corse et de la métropole de Lyon. Ces collectivités ont perçu des montants d'aide s'élevant respectivement à 127 millions, 104 millions et 101 millions d'euros (en sachant que la métropole de Lyon a bénéficié de l'aide pour avoir hérité à sa création en 2015 d'un emprunt contracté par le conseil départemental du Rhône).
Au 30 septembre 2017, le fonds de soutien a favorisé la "désensibilisation" d'un encours de dette toxique de 4,7 milliards d'euros. "L’objectif de faire sortir des emprunts les plus risqués a été atteint", se félicitent les magistrats. Certes, ajoutent-ils, un encours de dette estimé à 2 milliards d'euros reste totalement en dehors de l'action du fonds de soutien. Mais "pour une grande part, les prêts concernés sont peu sensibles ou proches de l’échéance ou concernent des collectivités dont la situation financière permet d’assurer le service de la dette en l’état". Au total, seulement une douzaine de collectivités, majoritairement des petites communes ayant fait le choix dès le départ de ne pas demander l'aide du fonds de soutien, se trouverait "dans une situation délicate".
Un impact durable sur le budget des petites collectivités
Une ombre figure quand même au tableau, selon la cour : les emprunts toxiques "continueront de peser durablement sur la dette et les capacités d’investissement des plus petites collectivités au cours des quinze prochaines années".
Au total, 2,6 milliards d'euros d'aides ont été versés aux collectivités. Le "coût de prise en charge par le fonds de soutien" a donc été inférieur de 400 millions d'euros "par rapport aux estimations initiales" qui s'élevaient à 3 milliards d'euros, indique la cour. Mais, selon le ministre de l'Economie et des Finances, le chiffre exact serait plus proche de 330 millions d'euros.
Le "coût de sortie" des emprunts toxiques a malgré tout été "élevé pour les finances publiques", selon la cour. "A la fin de l’année 2017, le coût pour les finances publiques de la sortie des emprunts à risque dépasse 3 milliards d'euros, dont près d’1 milliard d'euros pour l’Etat et 2 milliards d'euros pour les collectivités locales concernées", écrit-elle.