À Vaour, les décisions sont prises avec les habitants (81)

À une heure de Toulouse, dans le Tarn, Vaour n'est pas un village comme les autres : « Ici, il y a bientôt quarante ans, des bénévoles ont créé un festival culturel, l’Eté de Vaour », explique Jérémie Steil, maire de la commune depuis 2020. Ce festival perdure, il a amené un fort brassage de population, avec un tissu associatif dense, la présence de nombreux corps de métiers dans l'agriculture, l'artisanat, les services... « Notre liste participative élue en 2020 est issue de cette dynamique-là : ici, il y a plus de solidarité qu'ailleurs. »

Un schéma acté en début du mandat

La nouvelle équipe municipale est arrivée aux affaires en ayant acté un schéma de gouvernance participatif. « Nous l'avons travaillé avant l'élection avec Fréquence Commune, une coopérative qui accompagne les élus des communes participatives »¹, indique le maire. Des commissions thématiques sont alors mises en place, ouvertes à tous les habitants volontaires. Leurs travaux sont validés par l'équipe de coordination, organe décisionnaire (11 conseillers municipaux et 9 habitants non élus). « Nous prenons nos décisions au consentement : on fait évoluer la proposition jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'objections pour une décision unanime. » Ces décisions sont ensuite actées par le conseil municipal, qui est, à Vaour, essentiellement une chambre légale d'enregistrement. Un groupe opérationnel, composé du maire, des adjointes et de la secrétaire de mairie, se réunit chaque semaine et règle au quotidien les affaires municipales courantes. « Nous organisons aussi des assemblées citoyennes en conviant toute la population. Des cafés citoyens sont organisés une fois par mois : un sujet est présenté dans la première heure, puis nous écoutons les doléances durant l'heure suivante. »^{2 3}

L'exemple du PLUI : comment décider collectivement ?

Parmi les premiers chantiers de l'équipe municipale : le PLUi. « Nous étions encore en carte communale jusque-là, et bien sûr, ça n'est pas un dossier où nous avons eu toute la main puisqu'il est intercommunal. L’objectif : densifier le bourg et limiter l’extension urbaine dans le respect du Zéro artificialisation nette. » La commission aménagement a été à la manœuvre : « L'adjointe rappelait nos contraintes mais le débat était ouvert sur tout le reste, souligne le maire. Nous avons d'abord organisé une réunion publique puis proposé des zooms par quartier, une dizaine au total. » Les agriculteurs et artisans se voyaient proposer des rencontres individuelles pour traiter leur cas. « Nous avons informé la population par newsletter, avec des tracts distribués en boîte aux lettres pour toucher chaque habitant et des panneaux d'information. » Durant les quatre ans de travail sur le PLUi, deux temps forts de concertation par an ont été proposés, dont des cafés citoyens.

Un travail qui passe en revue chaque parcelle

La mairie a pu étudier le cas de chaque parcelle, en rencontrant les jeunes comme les plus âgés, les nouveaux arrivants comme ceux installés de longue date. « Certes, nous avons toujours rendu notre copie un peu plus tard que les autres communes, reconnaît le maire. Mais ce travail de précision nous a aussi permis d'alerter l’intercommunalité sur des incohérences. Elles ont été corrigées, au bénéfice de tous. » Vaour a aussi obtenu gain de cause sur des demandes spécifiques, comme la création d'une zone communale AUL à aménager en habitat léger, ou la constructibilité mixte habitat/bâtiment d'activité sur une zone artisanale. Du fait du ZAN, plusieurs anciens terrains constructibles seront bientôt inconstructibles, ce qui va limiter la construction neuve à l'avenir. « En même temps, c'est cohérent avec le souhait émis par les habitants de ne pas grossir davantage, note le maire. Notre école n'est pas en danger, des jeunes s'installent, il faudra désormais veiller à ce que les logements qui seront en vente, puissent être rachetés pour garder du dynamisme. »

Décider collectivement, c'est possible

Après quatre ans de gouvernance participative, le maire de Vaour reste convaincu : « Nous prouvons qu'il est possible de décider plus collectivement, en associant la population. On ne fait pas disparaître les clivages, mais nous donnons la parole à celles et ceux qui ont un autre point de vue avec, à la clé, un climat plus apaisé dans le village où le militantisme est fort. » Le maire reconnaît toutefois une erreur d'appréciation récente au sujet de l’implantation d'une antenne 4G. « Considérant que le sujet était trop inflammable, nous avons préféré acter directement le refus de l'antenne en groupe de coordination. Un café citoyen organisé ensuite pour présenter notre décision s'est très mal passé. Nous allons revenir en arrière et organiser prochainement une assemblée citoyenne à ce propos. On sait aussi apprendre de nos erreurs. »

Reste toutefois la lourdeur de la charge municipale dans un petit village : « Être élu est énergivore, notamment pour les membres du groupe opérationnel. Nous tenons grâce à la confiance qui nous est accordée. Ce n'est pas le volet participatif qui est lourd, c'est la mission même d'élu dans une petite commune qui est complexe. Il faut donc renouveler les personnes les plus engagées. » Cela tombe bien, c'est le principe même d'une démocratie participative.

¹ Le site internet de Fréquence Commune

² Les cafés citoyens, présentés sur le site de la commune de Vaour

³ La page du site de la commune de Vaour consacrée aux assemblées citoyennes