Habitat - Foncière Logement : la mixité dans tous les sens mais pour combien de temps encore ?

Foncière Logement produit des logements conventionnés pour les ménages modestes dans les communes SRU et des logements pour les ménages au-dessus des plafonds HLM dans les quartiers prioritaires. Mais le modèle économique est à bout. Non partenaire du Nouveau Programme national pour la rénovation urbaine, pris dans la tourmente de la refonte d'Action Logement, Foncière Logement pense toutefois poursuivre sa mission de mixité sociale sous une forme ou sous une autre.

A en croire Foncière Logement, le meilleur avocat de leur action en faveur de la mixité sociale serait la feue Anpeec (Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction). Dans un rapport finalisé en septembre 2014 et rendu public en décembre, l'Anpeec aboutit à la conclusion que "l'activité de l'Association Foncière Logement améliore globalement la mixité sociale".
Une mixité sociale qui repose sur deux investissements complémentaires : les logements "en DI" (dans les communes SRU) et ceux en "RU" (dans les quartiers Anru). Des pauvres dans les communes riches et des cadres sup dans les cités. "Nous sommes les seuls à réaliser cette double mixité", se félicite Bruno Lucas, président (Medef) de Foncière Logement.
Et l'Association a tenu bon. Lorsque les logements "RU" ont eu du mal à se remplir, "nous n'avons pas cédé à la facilité de les convertir en logements HLM, nous avons préféré les laisser vacants durant six mois". Pour gentrifier les quartiers Anru, ajoute Christian Chevé, secrétaire général (CGT) de Foncière Logement.

Plus de 6.000 logements "RU" dans les quartiers Anru du PNRU 1

Le "RU" (pour "renouvellement urbain") propose des logements en loyers libres dans des quartiers Anru de première génération (PNRU 1) où le logement social est "l'offre quasi unique". A fin 2014, 6.202 logements "RU" étaient réalisés par Foncière Logement ou en cours de travaux, sur les 10.000 à réaliser à terme.
En 2014, une feuille de route établie avec l'Etat et l'Anru pour relancer l'activité de la Foncière fixait à 5.200 les logements encore à réaliser entre 2014 et 2018 dans 168 programmes Anru. Mais ce n'est qu'en décembre de cette même année que Foncière Logement et l'Etat ont trouvé un accord sur les modalités de financement, suite à la signature de la convention du 2 décembre 2014 entre l'Etat et l'UESL qui a permis d'assurer le plan de financement d'un milliard d'euros pour construire les 5.200 logements exigés : 200 millions d'euros de prêts bancaires, 276 millions d'euros de PLI auprès de la Caisse des Dépôts (avec la garantie de l'Etat) et 524 millions d'euros de prêts UESL-Action Logement.

Près de 25.000 logements "DI" dans les communes SRU

Le "DI" (pour "développement immobilier") propose aux ménages les plus modestes un logement conventionné dans les villes assujetties à la loi SRU dans lesquelles la pression immobilière est forte et les loyers élevés. A fin 2014, 24.756 logements "DI" conventionnés étaient réalisés par Foncière Logement ou en cours de travaux.
80% d'entre eux se situent dans les zones tendues (A-B1). Les logements ont souvent été acquis en co-propriété dans des programmes en Vefa (vente en l'état futur d'achèvement). L'attribution des logements est réalisée selon la règle des 3 tiers en fonction des ressources des locataires (*).
Le patrimoine existant s'élève ainsi à presque 31.000 logements, pour un l'objectif de 35.200 logements à fin 2018 (dont 10.200 logements dans les quartiers Anru et 25.000 en communes SRU). Un patrimoine, qui, rappelons-le, est destiné à être transmis, gratuitement à terme, aux caisses AGIRC-ARCCO pour contribuer au financement des retraites des salariés.

Et après 2018 ?

Mais après 2018, l'activité de Foncière Logement ne sera plus garantie. Alors que dans le cadre du Programme national de rénovation urbaine (PNRU 1), chaque projet Anru devait obligatoirement comprendre une convention avec Foncière Logement (25% en moyenne des droits à construire lui étaient réservés et chaque terrain était cédé à l'euro symbolique), ce n'est plus le cas pour les 500 quartiers du Nouveau Programme national de renouvellement urbain (PNRU 2), au grand dam de Christian Chevé convaincu que "si la mixité n'est pas imposée, elle ne se fera pas".
Et de rappeler qu'Action Logement, "maison-mère" de Foncière Logement, finance largement le NPNRU en contrepartie de 25% en moyenne des droits à construire sur les opérations (voir notre article du 2 décembre 2014) mais, cette fois, "pour produire quel type de logements ?" Aujourd'hui, c'est de la qualité (les appartements sont grands, la qualité architecturale et du bâti est une exigence...) et c'est surtout destiné à des salariés de la classe moyenne +. Mais demain ?

Foncière Logement dans la refonte d'Action Logement

Bruno Lucas veut croire, quant à lui, que "si demain l'ensemble des partenaires sociaux décidaient qu'on doit s'investir dans la mixité sociale, Foncière Logement serait un outil" ; sans cacher que le nœud du problème reste à trouver les modes de financement. Bernard Gaud, président d'Action Logement, convient qu'il est "hasardeux et prématuré de dire ce qui se passera" dans un contexte où "l'ensemble du système Action Logement est dans une refonte complète". Il lâche toutefois : "la place qu'occupe Foncière Logement s'intégrera sûrement dans la refonte d'Action Logement. Après, sous quelle forme ? Quelle structure ?" Il assure que "l'objectif de mixité sociale qui a été atteint perdurera, avec des logements de qualité".
Bruno Lucas envisage quant à lui : "Et si les ESH disent 'on a envie et on a la capacité de le faire' on les aidera d'une manière ou d'une autre. "

Valérie Liquet

(*) 1/3 des locataires avec des revenus inférieurs à 60% des plafonds de logements sociaux, 1/3 des revenus compris entre 60% et 100% des plafonds sociaux (PLUS), 1/3 des ménages entre 100% et 130 % (PLS).