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Hébergement / Social - Grand froid : le dispositif d'hébergement déjà à bout de souffle

Il y a quelques semaines, la Fnars (Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion) mettait en garde contre "la situation explosive que s'apprêtent à vivre les personnes sans abri cet hiver" (voir notre article ci-contre du 31 octobre 2014). A l'époque, la Fnars indiquait déjà que de nombreuses demandes d'hébergement restaient sans réponse à Paris (en moyenne, 205 demandes d'hébergement de personnes en famille non satisfaites chaque jour), Bordeaux, Lyon, Toulouse, Nantes... Ce cri d'alarme, relayé par d'autres associations, se situait pourtant dans une période à la météo particulièrement clémente.

Les grandes villes de province particulièrement touchées

La subite vague de froid depuis quelques jours semble avoir précipité la crise. Selon la Fnars, la situation serait désormais critique, tout particulièrement dans des grandes villes de province. Ainsi, à Toulouse, 250 personnes sont à la rue sans solution chaque jour, avec un taux de réponse négative de 95% au 115. Pourtant, selon un communiqué de la Fnars du 5 décembre, "dans ce département et malgré la crise, l'Etat a diminué les capacités d'accueil mobilisées cet hiver". La situation est telle que "le 115 de Haute-Garonne a pris la décision d'un mouvement de grève de deux heures lundi 8 décembre après-midi, comme ultime alerte face au silence gouvernemental sur la crise de l'hébergement".
D'autres grandes villes sont également en sérieuse difficulté. Ainsi, plus de 500 personnes restent sans solution à Lille malgré leur demande au 115.
 Ces chiffres sont de 490 personnes en moyenne à Lyon, de 100 à Bordeaux (62% de refus) ou encore de 200 dans le Val-d'Oise. Mais la Fnars signale aussi que "cette situation dramatique touche également des territoires moins urbains, jusque-là moins tendus, comme l'Oise, la Charente ou encore la Saône-et-Loire".

Paris épargnée par la crise ?

Paris, qui n'est pas citée dans le communiqué de la Fnars, semble mieux s'en tirer. Il est vrai que le dispositif est rodé depuis plusieurs années. Dans un communiqué du 8 décembre, la mairie indique ainsi qu'elle met trois bâtiments supplémentaires à la disposition de l'Etat - pour une capacité de 150 personnes - et qu'elle est prête à mobiliser mille places supplémentaires dans douze gymnases et six salles de mairies d'arrondissement.
La ville va également renforcer son unité d'assistance aux sans-abri, afin d'accroître la présence des maraudes, tandis qu'un nouveau restaurant solidaire va ouvrir ses portes et que les espaces solidarité insertion (ESI) vont étendre leurs horaires et renforcer leur capacité d'accueil.

Accès durable au logement c/ hébergement d'urgence

Face à cette situation, la hausse de 5% des crédits du programme "Hébergement", prévue dans le projet de loi de finances pour 2015, et la rallonge de 100 millions d'euros prévue au titre du PLFR 2014 - récemment annoncées par Sylvia Pinel (voir notre article ci-contre du 3 décembre 2014) - risquent de ne pas suffire.
Au-delà de la réponse à l'urgence immédiate, cette nouvelle crise pose à nouveau la question de la course-poursuite entre l'hébergement d'urgence et l'accès au logement durable. A plusieurs reprises, le gouvernement a annoncé - avec d'ailleurs l'accord de principe des associations - vouloir abandonner la "gestion au thermomètre". En contrepartie, l'objectif était de développer des solutions durable d'accès au logement, avec un accompagnement social : mise en œuvre du droit au logement opposable (Dalo), résidences sociales, pensions de familles, programmes de logements très sociaux... Des résultats encourageants ont d'ailleurs été obtenus (voir notre article ci-contre du 24 novembre 2014).
Mais la difficulté vient de la contradiction - au moins dans le discours, sinon dans les actes - entre l'affirmation du temps long de l'accès durable au logement et la réalité du temps court, voire très court, de la réponse à l'urgence de la demande d'hébergement. Comme le suggèrent les associations, l'accès au logement durable risque de devoir cohabiter, sans doute pour de longues années, avec la "gestion au thermomètre" de l'hébergement d'urgence.

 

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