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Social / Emploi - Insertion des jeunes : le revenu contractualisé d'autonomie, ça ne marche pas

Le Crédoc publie les résultats d'une étude sur le bilan du revenu contractualisé d'autonomie (RCA), commandée par le ministère des Droits des femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Celle-ci a été réalisée sous la forme de 150 entretiens (70 jeunes et 80 acteurs) menés auprès de huit missions locales.
Le RCA a été mis en place, à titre expérimental, entre 2011 et 2013 (sur le détail du dispositif, voir nos articles ci-contre du 28 septembre 2010 et du 3 février 2011). Il s'agissait alors de "mesurer les effets de l'allocation d'un revenu garanti pendant une durée déterminée, sur le parcours d'insertion professionnelle d'un jeune". Le public visé était double : d'une part, les jeunes de 18 à 22 ans peu qualifiés en grande difficulté d'insertion ; d'autre part, les jeunes de 18 à 23 ans, à la recherche d'un emploi stable, titulaires au minimum d'un diplôme de niveau licence, inscrits à Pôle emploi depuis au moins six mois et ne pouvant bénéficier d'une indemnisation.

Pas d'avantages démontrés sur le Civis

Le verdict du Crédoc est sans appel : le RCA n'a pas de "véritable effet de levier sur l'insertion des jeunes". Plus précisément, "l'évaluation qualitative menée par le Crédoc a permis d'expliquer l'absence de plus-value du RCA par rapport au Civis [contrat d'insertion dans la vie sociale, Ndlr] sur l'insertion professionnelle des jeunes". Ces résultats confirment l'approche quantitative du Crest (Centre de recherche en économie et statistique). Celle-ci montrait que seul un jeune sur quatre avait accédé à un emploi durable (CDI ou CDD de plus de six mois) entre un et vingt-cinq mois après leur entrée dans le dispositif, soit un résultat plutôt inférieur à celui du Civis (contrat d'insertion dans la vie sociale).
Une analyse plus poussée montre que "malgré une forte adhésion au dispositif par les jeunes et les acteurs, le caractère automatique de l'allocation n'a pas permis aux conseillers des missions locales de faire 'levier' sur la construction et la mise en œuvre de projets d'insertion dans le cadre de l'accompagnement". En fait, l'étude montre que le RCA semble avoir eu un effet positif sur des jeunes déjà engagés dans une démarche d'insertion (ceux que le Crédoc dénomme les jeunes "dynamisés" et "sécurisés"). En revanche, il n'a pas eu d'effet sur les jeunes "autonomes" (qui connaissent un parcours ascendant, mais dont les progrès sont déconnectés du dispositif) ni, à l'inverse, sur les jeunes "instables" (parcours en dents-de-scie) ou "désaffiliés" (en rupture avec les institutions).

Un effet paradoxal sur le niveau de vie des jeunes

De même, les effets de l'allocation liée au RCA (250 euros mensuels la première année, puis montant dégressif la seconde) sur le niveau de vie des jeunes ont été limités. De façon paradoxale, le RCA n'a eu "pratiquement aucun effet pour les jeunes les plus précaires". Seuls les jeunes "ayant des contraintes financières relativement modérées" ont vu une amélioration significative de leur niveau de vie. Selon le Crédoc, il s'agit souvent de jeunes hébergés chez leurs parents, mais qui ne disposent pas de ressources financières propres.
Dans l'hypothèse où le RCA serait prolongé - ce qui n'est plus vraiment à l'ordre du jour -, le Crédoc formule quelques propositions : éviter l'automaticité du versement du RCA (contrairement au Civis), préciser la notion de contrepartie à l'attribution de l'allocation, renforcer le caractère incitatif de l'allocation dans une logique de "bonus-malus"...
Si le sort du RCA est aujourd'hui scellé, c'est en grande partie parce qu'il est remplacé par une autre expérimentation : celle de la "garantie jeunes" (voir entre autres notre article ci-contre du 7 octobre 2013). Mais les résultats de l'évaluation du RCA n'en perdent pas pour autant leur intérêt. Les deux prestations possèdent en effet plusieurs traits communs...

 

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