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Insertion - Pour le CNLE, les jeunes sont "les grands oubliés" du pacte de responsabilité

Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) rend public l'avis, adopté lors de sa réunion du 5 mai, sur le rapport 2014 de suivi du programme national de réforme (PNR). Ce document de 120 pages, remis chaque année à la Commission européenne, retrace la mise en œuvre des engagements pris par la France pour rétablir ses équilibres fondamentaux. Sa dernière édition, remise en mai 2014, est bien sûr fortement marquée par les orientations du pacte de responsabilité et de solidarité, annoncé par le chef de l'Etat à la fin de 2013 et détaillé par Manuel Valls en avril dernier.

Gel de prestations : "Une régression sociale inacceptable"

Dans son avis, le CNLE considère comme "une régression sociale inacceptable" le gel de certaines prestations destinées aux plus modestes, dans le cadre du plan d'économies de 50 milliards d'euros sur la dépense publique, à réaliser entre 2015 et 2017. Certes, le Conseil prend acte des atténuations finalement apportées par le Premier ministre sur le RSA - maintien de la revalorisation du RSA socle de 10% au-delà de l'inflation, sur la période 2013-2017 - et d'autres minima sociaux (voir notre article ci-contre du 28 avril 2014). Mais il constate que "le gel des aides au logement, initialement annoncé jusqu'à octobre 2014, serait finalement poursuivi jusqu'à octobre 2015", ce qui aurait un impact négatif sur l'objectif de réduction du taux de pauvreté auquel la France a souscrit. En revanche, l'avis a été adopté avant l'annonce par Manuel Valls d'une mesure permettant d'exonérer environ 650.000 ménages modestes de l'impôt sur le revenu.
Par ailleurs, le CNLE estime que "les politiques publiques doivent également soutenir le retour à l'emploi des plus exclus, en fixant avec les partenaires sociaux des objectifs d'embauche et de formation adaptés". Il propose que cette question "fasse l'objet d'une négociation interprofessionnelle, comme cela a été le cas pour la formation professionnelle". Comme il l'a déjà fait il y a quelques mois (voir notre article ci-contre du 16 octobre 2013), le CNLE se prononce à nouveau en faveur d'une réforme du RSA activité et de sa fusion avec la prime pour l'emploi (PPE).

Satisfecit sur la loi Alur

Le CNLE se montre très critique sur la politique en faveur des jeunes, "premières victimes de la crise économique" et qui "sont largement exclus de notre système de protection sociale et risquent la marginalisation lorsqu'ils ne bénéficient pas de la solidarité familiale". Pour le Conseil, les jeunes de moins de 25 ans sont ainsi "les grands oubliés" du pacte de responsabilité et de solidarité.
Le Conseil demande donc que la garantie jeunes - expérimentée depuis l'automne 2013 mais qui ne semble plus guère figurer au rang des priorités - soit ouverte "rapidement et beaucoup plus largement" aux jeunes en difficulté d'insertion.
Sur le logement - qualifié de "levier essentiel de réduction de la pauvreté" -, le CNLE s'inquiète de l'écart entre l'objectif toujours affiché de production annuelle de 500.000 logements et un résultat récurrent autour de 330.000 logements. En revanche, il se félicite des dispositions de la loi Alur du 24 mars 2014 (pour un accès au logement et un urbanisme rénové). Ce satisfecit vise notamment "la tentative d'encadrement des loyers", mesure "réclamée depuis de nombreuses années et [qui] pourrait significativement contribuer à réduire la précarisation des ménages dans les années à venir". L'avis évoque aussi les mesures de simplification du Dalo (droit au logement opposable) et l'amélioration de la domiciliation des personnes en situation de précarité.
Enfin, le CNLE demande que l'ensemble des mesures programmées dans le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté soient intégrées au pacte de responsabilité et de solidarité, et qu'elles figurent au rang des engagements du gouvernement faisant l'objet d'un suivi dans le PNR. Après avoir lui-même pérennisé la présence en son sein de personnes en situation de précarité (voir notre article ci-contre du 19 décembre 2013), le Conseil propose que celles-ci soient également auditionnées dans le cadre de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.


Jean-Noël Escudié / PCA