Jeunes en situation de handicap : une insertion plus difficile, dans tous les milieux sociaux
S’ils sont porteurs d’un handicap, les jeunes sortent plus souvent du système scolaire sans diplôme, accèdent peu aux études supérieures et rencontrent davantage de difficultés à travailler et à exercer des postes à responsabilité… Et ce, quelle que soit leur origine sociale. Le haut-commissariat au Plan / France Stratégie met pourtant en évidence des différences dans les parcours scolaires, les enfants de familles favorisées étant sur-représentés en milieu ordinaire. Pour le haut-commissaire au Plan, Clément Beaune, ces différences plaident pour une amplification de la politique inclusive.

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Si les origines sociales pèsent particulièrement lourd dans les trajectoires des jeunes en France, un autre facteur a un impact déterminant sur les parcours : le fait de vivre, ou pas, avec un handicap. C'est ce que démontre le haut-commissariat au Plan / France Stratégie dans une analyse intitulé "Jeunes en situation de handicap : une mobilité sociale entravée", publiée ce 22 mai 2025.
Pour les jeunes en situation de handicap, le risque est en effet plus grand de sortir du système scolaire sans diplôme : 3,7 fois plus pour un jeune favorisé et 2,1 fois plus pour un jeune défavorisé. Ainsi, "en cas de handicap, une origine sociale élevée protège moins contre l'échec scolaire et l'exclusion du marché du travail". Et, globalement, "très peu de jeunes handicapés poursuivent leurs études au-delà de l'enseignement secondaire". "Même si leur nombre croît fortement depuis dix ans, ils ne représentaient que 2% de l'ensemble des étudiants à la rentrée 2022-2023", soulignent les auteurs.
Moins de diplômes entraîne moins d'insertion dans le monde du travail : les jeunes ayant un handicap sont "quatre fois plus nombreux à n'avoir jamais travaillé́" et, lorsqu’ils travaillent, accèdent moins souvent à des emplois de cadre ou de profession intermédiaire.
Le handicap sur-représenté dans les milieux défavorisés
Tout en précisant que l’étude se fonde sur des données antérieures à l'accélération de l'école inclusive, le haut-commissariat au Plan / France Stratégie s'intéresse aux conditions de scolarisation de ces enfants et aux "facteurs multiples" qui expliquent ces moindres chances de réussite. En la matière, les différences liées à l'origine sociale sont loin d'être négligeables. "Les jeunes handicapés grandissent plus souvent dans des familles aux conditions de vie difficiles", est-il d'abord mis en évidence. Parmi les élèves en situation de handicap nés en 2005 et scolarisés en milieu ordinaire, 51% ont une origine sociale "défavorisée" (jusqu’à 62% pour les enfants ayant des troubles intellectuels et cognitifs), contre 38% pour l’ensemble des enfants nés en 2005 et scolarisés au CP en 2011.
Ainsi, non seulement "les troubles qui perturbent le plus l'apprentissage sont plus fréquents au bas de l'échelle sociale", mais "à trouble identique, les parcours scolaires diffèrent selon l'origine sociale". Diverses données illustrent le fait que les enfants issus de milieux favorisés sont davantage scolarisés en milieu ordinaire, avec moins de redoublement, alors que les enfants d'origine défavorisée fréquentent plus souvent les dispositifs spécialisés (Ulis, Segpa) et les établissements sociaux et médicosociaux (ESMS). "Cette scolarisation différenciée peut s'expliquer par des ressources inégales des parents", les plus favorisés étant "mieux armés pour négocier avec les acteurs du système éducatif", selon les auteurs. "La scolarisation dans l'enseignement spécialisé" serait, pour le haut-commissariat au Plan / France Stratégie, "un désavantage supplémentaire pour les élèves de milieu modeste", les études "[tendant] à montrer que les compétences académiques sont plus élevées lorsque les élèves handicapés sont scolarisés dans des classes inclusives".
Au regard de ces données, la politique inclusive est "plus nécessaire que jamais", conclut Clément Beaune, haut-commissaire au Plan, qui appelle à "amplifier" ce mouvement et à "intensifier également la mobilisation à l'étape d’après, celle de la carrière professionnelle". Les effets sur les parcours de la scolarisation d'un plus grand nombre d'enfants en milieu ordinaire (470.000 en 2023 contre 150.000 en 2005) devront en tout cas être mesurés.