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Enfance - La défenseure des enfant "découvre" qu'elle va disparaître

Près d'une semaine après le Conseil des ministres qui a adopté le projet de loi organique et le projet de loi relatifs au défenseur des droits (voir notre article ci-contre du 10 septembre 2009), la défenseure des enfants "découvre avec stupeur" que sa fonction va disparaître, absorbée dans le champ de compétence du futur défenseur des droits. Dans un communiqué indigné, Dominique Versini - qui fut également, de 2002 à 2004, secrétaire d'Etat chargée de la lutte contre l'exclusion et la précarité dans le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin - "conteste à la fois la méthode, qui relève de la maltraitance institutionnelle, ainsi que les deux projets de lois qui posent de nombreuses interrogations". Cette découverte tardive peut sembler surprenante. La création du défenseur des droits figurait en effet dans le rapport du comité Balladur sur la réforme constitutionnelle, remis au président de la République en octobre 2007. L'objectif était précisément de lutter contre la "dilution des responsabilités" résultant de la multiplication des contrôleurs, la défenseure des enfants étant nommément citée. Cette proposition a été reprise à l'article 41 de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, qui crée le défenseur des droits. Certes, cet article ne définit pas précisément le champ d'intervention de cette future autorité indépendante, mais l'étendue de la mission et des pouvoirs qui lui sont confiés promettait, à tout le moins, un sérieux empiètement sur le territoire des autres médiateurs, défenseurs et contrôleurs. Pour expliquer une réaction aussi tardive, Dominique Versini fait valoir qu'elle "n'a été à aucun moment ni consultée ni auditionnée, malgré les demandes de rendez-vous qu'elle a formulées [...]". Dans ces conditions, elle "exprime son total désaccord sur le fait qu'ait été décidé arbitrairement et sans aucune concertation de dissoudre certaines autorités indépendantes et d'aménager une simple articulation avec d'autres". Une allusion directe au fait que le défenseur des droits va absorber les compétences du médiateur de la République, du défenseur des enfants et de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), tandis que seront maintenus le contrôleur général des lieux de privation de liberté, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).
Au-delà de cette question de périmètre et des querelles de susceptibilité, il est vrai que le défenseur des enfants représente une institution particulière, qui aura peut-être du mal à se retrouver dans celle, plus juridique, du défenseur des droits. On voit assez mal un austère conseiller d'Etat (bien que Dominique Versini ait elle-même été nommée au Conseil d'Etat après son passage au gouvernement) animer des groupes thématiques "Parole aux jeunes" à travers toute la France. Cette incarnation risque d'être d'autant plus délicate que le projet de loi organique ne prévoit pas - contrairement à plusieurs exemples étrangers -la création de défenseurs adjoints, dont l'un aurait pu être plus spécifiquement chargé des enfants. Le projet de texte prévoit certes deux collèges de trois personnalités qualifiées chacun, qui seront obligatoirement consultés sur le traitement des réclamations en matière respectivement de déontologie de la sécurité et de protection de l'enfance. Mais leur positionnement et leur visibilité seront nécessairement très différents de ceux du défenseur des enfants.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

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