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Rénovation urbaine - L'Anru en 2010 : des grues, des avenants et des quartiers anciens dégradés

L'Agence nationale pour la rénovation urbaine a présenté ce 19 janvier un bilan de son activité 2009 et ses perspectives pour 2010. Tour d'horizon des principaux thèmes abordés.

Petit rappel de chiffres tout d'abord : le programme national de rénovation urbaine prévoit toujours, pour la période 2004-2013, la réalisation de 34 milliards de travaux pour lesquels l'agence doit apporter 10 milliards de subventions. Or, l'Observatoire national des zones urbaines sensibles (Onzus) a pointé récemment, dans son rapport 2009, la lenteur de la progression des engagements (voir notre article du 1er décembre). Changement d'échelle en 2009 : Gérard Hamel, le président de l'Anru, et Pierre Sallenave, son directeur, ont annoncé que les engagements de 2009 s'élèveraient au total à 2,1 milliards d'euros contre 1 milliard en 2008. Ainsi, en cumulé, depuis 2004, environ 6 milliards devraient être engagés, soit 60% des subventions programmées. Une augmentation qui s'inscrit dans une chronologie logique du montage d'opération : la quasi-totalité des conventions sont désormais signées (352 conventions au 1er décembre 2009), plus de la moitié des subventions Anru sont désormais engagées.
Reste la phase finale : le paiement. Sur ce point, qui constituait jusqu'à présent l'une des principales critiques que les acteurs locaux adressaient à l'agence, président et directeur, sans surprise, se félicitent des progrès opérés. Ils mettent en avant la réduction des délais de paiement mais affichent surtout le montant total des paiements effectués 2009 : 955 millions d'euros, à comparer aux 618 millions d'euros de 2008. Pourquoi une telle progression ? L'explication la plus évidente est le plan de relance : ses crédits (350 millions d'euros supplémentaires, dont 134 millions versés en 2009) ont permis d'accélérer la réalisation d'opérations presque prêtes, notamment sous la forme d'avances. La moitié des crédits ont échu à l'Ile-de-France. Mais surtout, l'accélération des paiements s'explique simplement par l'arrivée à la réalisation concrète d'un grand nombre de projets. Pierre Sallenave a ainsi souligné que si les cinq dernières années ont été consacrées pour l'essentiel au montage des dossiers, "c'est désormais l'heure de la mise en œuvre opérationnelle". Et après ? Les dirigeants de l'agence ont insisté sur la nécessité de développer la gestion urbaine de proximité, l'encouragement à l'installation d'entreprises, les partenariats avec l'Acsé et le développement des transports afin que les quartiers rénovés ne "retombent pas au point de départ".

 

Les avenants, désormais c'est pour le préfet !

Au-delà de ces chiffres globaux, la principale nouveauté de ce début 2010 est la réorganisation de l'agence qui "élargit la délégation" des préfets. En clair, pour les dossiers dont la convention n'est pas encore signée, rien de neuf. Il faut toujours passer devant le comité des engagements à Paris. La nouveauté est pour ceux qui ont des conventions en cours : les avenants seront désormais du ressort des préfets de département. Objectif affiché ? "Etre plus souple", "plus réactif", "mieux aider les acteurs locaux à monter leurs projets", "répondre au volume d'activité croissant"... Présentant cette réforme, le directeur de l'Anru s'est empressé d'ajouter que cette réorganisation se ferait tout en maintenant les "valeurs" de l'agence, et a cité pour exemple "l'ambition de la rénovation" ou "la relation de confiance entre élus et Anru". Une précision d'importance en effet : la quasi-totalité des conventions font l'objet d'avenants, dont le contenu peut modifier sensiblement la nature du contrat initial. Pierre Sallenave a affirmé qu'il n'était pas question de remettre en cause les contrats en cours d'exécution. Les préfets, agissant en tant qu'ordonnateurs à la place du directeur de l'agence, devraient pouvoir seulement adapter les conventions aux besoins du terrain. Côté paiement, l'agent comptable de l'agence officiera toujours : pas de délégation aux trésoriers payeurs généraux.
Par contre, les collectivités devraient prochainement bénéficier des conseils des trésoreries de région pour "gérer la soutenabilité budgétaire de leurs opérations". Un accord est en passe d'être signé entre l'Anru et Bercy, sans qu'on connaisse la nature précise de cette aide.

 

Quartiers anciens dégradés : des contrats d'une durée de 7 ans

Autre dossier d'actualité ces temps-ci : la requalification des quartiers anciens dégradés. Lors de sa présentation du programme en décembre (voir notre article du 9 décembre 2009), Benoist Apparu avait annoncé "l'engagement des premiers travaux dès le début 2010". Pierre Sallenave nuance et  complète en soulignant que tout dépendra de l'avancement du montage des dossiers. Il devrait y avoir un engagement unique entre Anru, Anah, Etat et collectivités sur des contrats "de 7 ans", avec éventuellement des "clauses de revoyure" - une expression décidément d'actualité - pour que dans le cas où les quartiers prendraient rapidement de la valeur, une part des plus-values foncières soient récupérée par l'Anru et l'Anah. Cette durée de 7 ans est naturelle pour ce type d'opération et ne surprendra donc pas les habitués des politiques de la ville... Mais Benoist Apparu avait omis cette précision lors de sa présentation du 9 décembre : elle aurait en effet été quelque peu gênante, alors qu'il annonçait des enveloppes sur 3 ans (2010-2011-2012), sans expliquer d'ailleurs précisément d'où viendrait l'argent en 2012, alors que les conventions Anru et Anah avec le 1% s'arrêtent fin 2011. Sur le fond, l'Anru "n'interviendra naturellement pas sur l'habitat privé", qui constitue le pré carré de l'Anah, elle s'occupera surtout de "prendre le contrôle du foncier sur un îlot". Sauf que, en centre-ville, le foncier nu est rare et dans les 40 quartiers sélectionnés, le parc social est souvent fort modeste. L'agence pourrait donc intervenir surtout sur les équipements urbains. Or, très clairement, l'Anru a l'intention de contrôler l'utilisation de l'argent qu'elle mettra dans ce programme : pas question de faire pot commun avec l'Anah et de laisser les villes utiliser les crédits comme elles l'entendent.
Terminons avec les serpents de mer : Pierre Sallenave et Gérard Hamel souhaitent "évidemment" un PNRU II, ils rappellent que la convention qui les lie au 1% se termine fin 2011 et donc que "son renouvellement n'est pas d'actualité". Enfin, sur le grand emprunt, l'Anru pourrait être chargée des internats d'excellence et espère qu'un quartier rénovation urbaine sera sur la deuxième liste des éco-quartiers sélectionnés.

 

Hélène Lemesle