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Développement des territoires - Le Sénat demande de conforter les services publics pour accompagner le renouveau rural

La "diagonale aride" qui coupait la France en deux, du Sud-Ouest au Nord-Est, est en train de se résorber. C'est ce que constate le Sénat dans un rapport présenté le 16 juillet sur "le nouvel espace rural français". Aujourd'hui, seuls cinq départements du Nord-Est et du Centre continuent de perdre des habitants (Haute-Marne, Nièvre, Creuse, Ardennes et Allier), quand ils étaient trente il y a dix ans. Finis le "désert français", dépeint en 1947 par le sociologue Jean-François Gravier, et l'exode rural des Trente Glorieuses : les campagnes se repeuplent. "Depuis 1975, la France connaît une dynamique démographique de retour vers la ruralité" et la tendance s'accélère. La population des communes de plus de 2.000 habitants a progressé en moyenne de 1,3% par an entre 1999 et 2006 contre 0,5% entre 1990 et 1999. Illustration de ce renouveau, la Haute-Garonne qui affiche la plus forte croissance entre 1999 et 2006 (+1,6% par an). Qui sont ces "néo-ruraux" mus par un "désir de campagne" ? Essentiellement de jeunes familles, des retraités ou encore une nouvelle génération d'entrepreneurs ruraux (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprises et certaines professions intellectuelles), expliquent les sénateurs (UMP) Jean François-Poncet et Claude Belot. "Le temps n'est plus où l'on se proposait de mettre les villes à la campagne, soulignent-ils, la France possède désormais des ressorts propres de développement."

 

Un socle de services publics indispensable

L'arrivée de nouvelles populations a permis le développement d'une économie de services, avec en particulier un "boom" des emplois d'aide au maintien à domicile pour les personnes âgées. Les besoins dans ce domaine sont estimés à 400.000 emplois pour les sept ans à venir. Cette "économie résidentielle" est sur le point de dépasser, en nombre d'emplois, le secteur productif. Mais ce dernier n'est pas en reste. De nouvelles activités émergent comme le tourisme agraire, les énergies vertes et le télétravail (même si avec 7% de télétravailleurs, la France accuse encore un retard important).
La question se pose à présent de maintenir le cap de cette "exception territoriale française", dans une perspective de développement durable. En pleine réforme des cartes hospitalière, judiciaire, militaire et sans doute demain, territoriale, le rapport identifie trois défis à venir : la fracture territoriale, la fracture numérique et l'offre de soins. "Un socle de services publics de base est indispensable pour attirer puis maintenir une population sur un territoire", soulignent les rapporteurs. Ils invitent à prendre exemple sur des initiatives mises en place localement pour contrer la pénurie de soins comme la maison de garde médicale de La Rochefoucauld, en Charente, qui réunit 25 médecins libéraux, ou les neuf projets de maisons de santé rurale pluridisciplinaires. Ils déplorent en revanche l'orientation prise par la politique régionale européenne qui ne profite que "très accessoirement aux espaces ruraux". La politique de développement rural apparaît ainsi "comme excessivement complexe, difficilement lisible et délicate à appliquer". Pour sa part, le fléchage des crédits de la politique de cohésion sur la compétitivité "met l'accent sur des domaines pour lesquels les territoires les moins développés comptent a priori peu d'atouts". Un handicap accentué encore par la volonté du gouvernement français de donner la priorité de ces crédits aux zones urbaines en difficulté. Le rapport plaide pour une véritable politique européenne dédiée aux territoires ruraux.

 

Michel Tendil