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Le Sénat préconise une "deuxième génération" de contrats de ruralité

Rien ne garantit l'avenir des contrats de ruralité qui arrivent à échéance en 2020. À l'approche du débat budgétaire, le sénateur du Cantal Bernard Delcros formule dix propositions pour permettre une "deuxième génération" de ces contrats qu'il souhaite "plus ciblés, plus lisibles dans la durée et plus efficaces".

À la veille du débat budgétaire pour 2020, le Sénat monte au créneau pour sauvegarder les "contrats de ruralité". Car ces derniers arrivent à terme l’an prochain et, pour l’heure, rien ne garantit leur reconduction.
Lancés tambour battant à la fin du précédent quinquennat, ces contrats ont suscité un vif engouement poussant le nouveau gouvernement à poursuivre la vague de signatures. Sur 200 contrats envisagés à l’origine, on en compte près de 500 aujourd’hui à travers la France (485 au 1er octobre 2018).

Pendant rural des contrats de ville pour les quartiers, ils s’inspirent des contrats territoriaux de développement rural, défendus en 2015 par le sénateur Bernard Delcros (UDI, Cantal), le même qui, aujourd’hui, dans un rapport d’information pour la commission des finances publié le 24 juillet, entend assurer leur pérennité à travers dix propositions. Constatant les effets bénéfiques des contrats (ils ont notamment facilité l’élaboration de "stratégies de territoire"), dans la foulée d’une évaluation récente de l’Assemblée des communautés de France (ADCF) et de l’Association nationale des pôles territoriaux et des pays (ANPP), le sénateur veut donc tout d’abord s’assurer de leur reconduction après 2020 pour cinq ans. Ce qui collerait avec la future mandature municipale. "Je souhaite que la deuxième génération propose des contrats plus ciblés, plus lisibles dans la durée et plus efficaces", a plaidé Bernard Delcros lors de l’examen de son rapport par la commission des finances, le 17 juillet.

Revoir le mode de financement

Ce qui passe d'abord par des financements. Or selon le rapport, les contrats "ont fait l’objet d’une réforme inadéquate de leur financement" et ils ne bénéficient plus de crédits dédiés. En effet, à l’origine, l’ancien ministre Jean-Michel Baylet s’était montré généreux, prévoyant une enveloppe de 216 millions d’euros pour les contrats de ruralité en 2017 au sein de la nouvelle dotation de soutien à l’investissement local (Dsil), aux côtés des contrats État-métropoles et des "grandes priorités d’investissement". Cette enveloppe a d’abord été répartie par région en fonction de critères démographiques. Mais la répartition infrarégionale a été laissée au bon vouloir des préfets, avec de grandes variations d’une région à une autre. Tout ceci a entraîné un "manque de lisibilité pour les collectivités bénéficiaires".

Mais ce n’est pas tout. En 2018, il a été décidé de transférer les contrats de la mission "cohésion des territoires" (programme 112) vers les "relations avec les collectivités" (au programme 119). Ce transfert manque de "cohérence", sachant que la mission cohésion des territoires finance par ailleurs les CPER (contrats de plan État-régions) et les contrats de villes, fait observer le sénateur. De plus, les crédits de la Dsil ont fortement diminué, passant de 615 millions d’euros en 2018 à 570 en 2919, et ils ne prévoient plus de fléchage spécifique pour les contrats de ruralité qui se trouvent par exemple en concurrence avec le plan Action cœur de ville. "J’y vois un risque de recul du fait rural dans le champ des priorités nationales, car la Dsil n’offre pas les garanties d’une enveloppe fléchée", a dénoncé le sénateur lors de l’examen en commission de son rapport, le 17 juillet. Il souhaite le retour des contrats dans le programmes 112 tout en les finançant via le Fnadt (fonds national d’aménagement et de développement du territoire) "qui présente des atouts par rapports à la Dsil : souplesse, financement de l’ingénierie territoriale, de projets associant collectivités locales et acteurs privés, etc." Ce qu'il avait proposé dès 2016 !

Inquiétude avec les futurs contrats de cohésion territoriale

L’autre inquiétude du sénateur vient de l'avènement des contrats de cohésion territoriale prévus par la loi créant l’Agence nationale de la cohésion des territoires publiée le 23 juillet. Sur ce point, il diverge de l’ADCF qui, elle, voit d'un bon oeil l’instauration d’un contrat unique. "Dans le cadre de la mise en place de l’Agence nationale de la cohésion des territoires, le maintien de ces contrats [de ruralité] n’est à ce jour pas confirmé, s’est ainsi inquiété Bernard Delcros devant la commission des finances. Les nouveaux contrats de cohésion territoriale pourraient avoir vocation, à terme, à se substituer à plusieurs types de contrats entre l’État et les collectivités territoriales. Si tel était le cas, la ruralité serait diluée dans d’autres enjeux nationaux." Il demande donc de bien distinguer les deux types de contrats. Il propose aussi la création d’un poste de "chef de projet" des contrats, qui serait financé à 80% par l’État dans les intercommunalités de moins de 60.000 habitants.

Le sénateur entend aussi améliorer le contenu des contrats de ruralité, en instaurant notamment une "clause de revoyure". Il constate par exemple que sur les six priorités de départ, l’accès aux services publics et à la revitalisation des centres bourgs se taillent la part du lion, alors que la transition énergétique ne recouvre que 8% des crédits engagés. "Il s’agira donc que la prochaine génération de contrats de ruralité prenne davantage en compte les thématiques qui constituent les 'parents pauvres' de la première génération des contrats, d’autant qu’il s’agit de thématiques pour lesquelles l’action au niveau local est susceptible de produire un 'effet levier' déterminant", souligne-t-il.