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Contrats de ruralité : une nouvelle génération devrait être lancée en 2021

476 contrats de ruralité ont été conclus pour la période 2016-2020. Le dispositif devrait être poursuivi en 2021. Si l'AdCF et l'ANPP appellent à leur renforcement, les deux associations espèrent quelques améliorations, notamment en termes de transparence, de stabilité - y compris financière - et de financement de l'ingénierie.

La prochaine génération de contrats de ruralité devrait être lancée en 2021 pour une durée de six ans. A l'heure actuelle, plus de 450 contrats de ce type ont été conclus pour la période 2016-2020. Et leur bilan est plutôt encourageant, d'après l'Association nationale des pôles d'équilibre territoriaux et ruraux et des pays (ANPP) et l'Assemblée des communautés de France (AdCF), qui vont prochainement publier une étude sur le sujet. "Ils permettent de faire émerger des projets structurants et de coordonner les différents acteurs publics et leur financement", résume ainsi Maxime Goudezeune. Chargé des ruralités et des questions de santé à l'AdCF, il évoque toutefois des conditions de mise en œuvre très tendues pour un dispositif complexe et long à mettre en place.
Ces contrats ont été lancés en 2016 lors du troisième comité interministériel aux ruralités, à la fin du quinquennat Hollande. Objectif : remettre la ruralité au cœur des préoccupations, après les importants coups de pouce donnés aux métropoles avec les contrats de ville et les pactes métropolitains notamment.
200 contrats de ruralité devaient être prêts avant la fin de l'année 2016 pour des signatures avant le 30 juin 2017. Mais ces délais serrés et le succès du dispositif ont amené le gouvernement de l'époque à étendre la période d'élaboration et leur nombre : ce sont au final près de 450 contrats qui avaient été signés à la fin de l’année 2017. Et cela continue cette année.

Donner un nouveau souffle aux contrats de ruralité

Ces contrats de ruralité doivent permettre, à l'instar des contrats de ville, de coordonner les moyens financiers et les actions et projets à conduire sur un territoire, en matière d'accessibilité aux services et aux soins, de développement de l'attractivité, de redynamisation de bourgs-centres, de mobilité, de transition écologique ou encore de cohésion sociale. Ils recensent ainsi les actions, les calendriers prévisionnels de réalisation et les moyens nécessaires pour mettre en œuvre le projet de territoire. Ils sont conclus pour une durée de six ans - avec une clause de révision à mi-parcours - entre l'Etat (représenté par le préfet de département) et les présidents de pôle d'équilibre territorial rural (PETR) ou d'établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Plusieurs contrats peuvent être signés sur un même département.
La démarche est plébiscitée par nombre de territoires ruraux, ont assuré de concert l'ANPP et l'AdCF dans un communiqué du 9 juillet, rappelant qu'elle offre "un cadre souple et partenarial à une programmation pluriannuelle" et vient conforter "les projets de territoire des PETR, pays et intercommunalités issus des évolutions de l’organisation territoriale après l’Acte III de la décentralisation".
Mais si les deux associations appellent à leur renforcement, elles estiment aussi que le dispositif est perfectible. Et c'est dans cette perspective d'amélioration qu'elles ont participé le 10 juillet 2018 à un groupe de travail intitulé "vers une évolution des contrats de ruralité", organisé par le directeur de cabinet de Julien Denormandie, secrétaire d'Etat à la cohésion des territoires. La réunion, rassemblant des membres du cabinet du ministre Jacques Mézard, des représentants des administrations centrales et déconcentrées, des acteurs du développement local et des associations de collectivités, a permis d'acter la nécessité de donner un nouveau souffle aux contrats de ruralité et de discuter des différents scénarios envisageables, relate l'AdCF sur son site internet.

Une forte appétence des territoires

Parmi les critiques à l'encontre du dispositif : la diversité des territoires concernés. "Les types de territoires qui portent un contrat de ruralités sont très variables", explique Maxime Goudezeune : "Quasiment tous les PETR sont porteurs d'un contrat et des EPCI en ont signé, mais la maîtrise d'ouvrage peut aussi être réalisée par un pays, qui ne peut pas être signataire directement, et des EPCI hors pays et PETR ont décidé de se regrouper pour porter un contrat…". Même diagnostic de la part de Michael Restier, directeur de l'ANPP, qui insiste lui aussi sur la question des périmètres.
Cette forte appétence des territoires a logiquement amené à une subdivision plus importante des financements, qui étaient déjà considérés comme faibles. En 2017, 216 millions d'euros du Fonds de soutien à l'investissement local (FSIL) ont été dédiés aux contrats de ruralité. Ces fonds sont cumulables avec d'autres financements, en particulier la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR).
"La demande était très forte car le contexte financier des collectivités n'était pas très bon, avec certains projets de territoires retardés ou supprimés, et parfois le contrat a servi de support pour distribuer de la subvention", constate Maxime Goudezeune.
Au-delà de cette diversité des territoires signataires, l'AdCF note une certaine hétérogénéité des méthodes de contractualisation. "Certains préfets sont allés chercher les territoires et les ont accompagnés dans la démarche, d'autres ont fonctionné à partir d'appels à projets, parfois il y a eu des dysfonctionnements dans la communication, certains territoires n'étaient pas prêts...", détaille Maxime Goudezeune. Une hétérogénéité des méthodes qui a parfois amené à des insatisfactions ou à des frustrations. Certains, à l'instar de Michel Fournier, vice-président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), questionnant même les critères d'éligibilité des contrats. Ce qui pousse le responsable AdCF à demander plus de stabilité dans le dispositif et une plus grande transparence sur son fonctionnement concernant les critères de choix des projets et les décisions de revirement éventuelles. De son côté, Michael Restier considère qu'il "faudrait accompagner les préfets par un guide méthodologique, tant sur la concertation à opérer, que le suivi et l'évaluation des contrats de ruralité".

Un financement de l'ingénierie passé de 15 à 10% des crédits attribués

Autre problème des contrats de ruralité : le financement de l'ingénierie. Initialement, l'appui à l'ingénierie était possible à hauteur de 15% des crédits attribués mais ce financement a rapidement été remis en cause jusqu’à ce qu’un compromis soit trouvé avec 10% des subventions, non reconductibles, pouvant être alloués à la seule ingénierie d’étude. Une réduction du financement de l'ingénierie que Michael Restier déplore, estimant que "l'ingénierie, est indispensable à l'animation des projets de territoires", en termes d'études, de coordination et de pilotage. Le financement d'un poste de chargé du pilotage du contrat semble incontournable pour que le dispositif puisse être pérenne.
Enfin, la multiplication d'autres contrats, tels que les contrats de transition écologique, rend moins lisible la volonté gouvernementale de coordonner, au travers d'un seul contrat pluriannuel, l'ensemble des actions publiques. "Il faudrait davantage de cohérence d'ensemble", estime ainsi Michael Restier.
Malgré ces quelques vœux d'amélioration, la perspective de voir le dispositif des contrats de ruralité se pérenniser réjouit les responsables de l'ANPP et de l'AdCF. "Nous sommes convaincus de l'immense potentiel de développement dans le rural, affirme Maxime Goudezeune, il faut l'organiser, et donc accompagner des dispositifs comme ceux-là, qui ont notamment permis de renouer des contacts et un lien de confiance entre les collectivités et les services de l'Etat."