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Le Sénat veut conforter les missions locales

La commission des finances du Sénat appelle, dans un rapport de contrôle budgétaire, à "stabiliser" les moyens structurels alloués par l’État aux missions locales et à conforter leur rôle central dans l’accompagnement des jeunes.

Acteurs "plus que jamais indispensables" de l’insertion des jeunes, a fortiori dans cette période de crise, les missions locales gagneraient à être davantage confortées, tant dans leur financement, leur pilotage que leur place dans le service public de l’emploi. Tel est le message de la commission des finances du Sénat, qui a fait le point sur l’évolution des moyens de ces structures dans un rapport de contrôle budgétaire mis en ligne le 12 octobre. Alors que les missions locales changent d’échelle par le doublement des objectifs d’entrées en garantie jeunes et la hausse de 25% en Pace – objectifs fixés – en 2021, les rapporteurs spéciaux, Emmanuel Capus et Sophie Taillé-Polian, formulent neuf recommandations.

Hausse des crédits de 42% depuis 2015

Les sénateurs rappellent la très forte hausse de l’activité des missions locales ces dernières années, qui s’est accompagnée d’une progression des crédits de l’ordre de 42,6% entre 2015 et 2020. Cependant, l’évolution de cette enveloppe est tirée "essentiellement par la dynamique des entrées en garantie jeunes et des besoins d’accompagnement que celle-ci implique". Ainsi, les crédits dits "CPO", à savoir  les subventions de fonctionnement, "diminuent de 14,3 millions d’euros entre les lois de finances initiales (LFI) 2018 et 2021 si l’on neutralise l’effet de périmètre lié au financement de la mise en œuvre de la nouvelle obligation de formation et du plan de relance", analysent les rapporteurs. En conséquence, ils recommandent de "stabiliser à périmètre constant les moyens structurels alloués par l’État aux missions locales", mais aussi de "dresser dès que possible un bilan de l’utilisation par les missions locales des moyens supplémentaires" et de prévoir une évolution "progressive" de l’enveloppe annuelle allouée par l’État dans le cadre de la prochaine convention pluriannuelle d’objectifs qui sera établie en 2022.

Un reproche relativisé par l’Union nationale des missions locales (UNML), à l’aune du projet de loi de finances 2022 qui ne fait plus apparaître la distinction entre ces deux types de dépenses. "Les missions locales n'ont jamais eu autant de crédits qu'en 2020 et 2021. C'est historique. Il y a eu des recrutements supplémentaires, ainsi que des financements pour agrandir nos locaux, souligne Sandrine Aboubadra Pauly, sa déléguée générale. Cette hausse des moyens est intégrée dans l'enveloppe liée à l’augmentation des entrées en Pacea et en garantie jeunes et à la mise en oeuvre de l'obligation de formation".

Pas un "Pôle emploi Jeunes"

Au-delà de ce point, d’autres constats et préconisations des sénateurs vont en revanche dans le sens de l’UNML. Considérant que les missions locales ne sont pas un simple "Pôle emploi jeunes" mais visent "l’autonomie" et "l’émancipation des jeunes", la commission des finances appelle à "élargir la liste des indicateurs utilisés pour le dispositif de financement à la performance des missions locales mis en place par l’État en intégrant des indicateurs liés à la levée des freins périphériques à l’emploi (santé, logement, mobilité)". Ce financement à la performance devant représenter 10% du budget "CPO", prévu à partir de 2019 (lire notre article) n’a pas été appliqué en raison de la crise. "Cela fait partie des sujets en discussion dans le cadre du projet de revenu d'engagement pour les jeunes du gouvernement", souligne à Localtis Sandrine Aboubadra-Pauly, dans l’attente de clarifications du gouvernement.

Dans le même registre, "l’approche élargie de l’évaluation des résultats des missions locales implique aussi de repenser la mesure des sorties dites positives", ajoutent les sénateurs. "Aussi, pour un jeune ayant suivi avec succès une formation pré-qualifiante lors de son Pacea, l’accès à une formation qualifiante de nature à lui permettre d’accéder à un emploi stable et de qualité doit assurément être considéré comme une sortie 'positive' de l’accompagnement en mission locale", écrivent-ils.

Un rôle central

Fortes de ces spécificités, les missions locales ne sont pourtant pas confortées dans leur rôle. Preuve en est le plan 1 jeune 1 solution, qui s’appuie aussi sur Pôle emploi pour développer la prestation AIJ (accompagnement intensif des jeunes) assorti d’une aide financière exceptionnelle. Or "Pôle emploi ne parvient que difficilement à jouer le rôle d’accompagnement global en faveur des jeunes", attaquent les rapporteurs. Par ailleurs, le circuit d’attribution de cette aide s’avère symptomatique de "l’empilement" des dispositifs. "Pôle emploi, après avoir vérifié l’éligibilité du jeune, renvoie à la mission locale le soin de poser un diagnostic sur la situation sociale et financière du jeune et de proposer le montant de l’aide, qui est ensuite versée par Pôle emploi", illustre le rapport qui appelle en conséquence à confier la prise en charge des jeunes rencontrant des difficultés aux seules missions locales.

Autre recommandation des sénateurs : envisager "la réinstauration d’une instance publique nationale d’animation et de pilotage du réseau", suite à la suppression du délégué ministériel aux missions locales en 2018, faite "sans évaluation préalable". Si l’UNML a pris le relais en termes d’animation du réseau, ce système "n’est pas exempt de limites dans la mesure où toutes les missions locales n’y sont pas forcément adhérentes", écrivent les sénateurs.

1.000 événements lors de la semaine nationale des missions locales

Lors de la semaine nationale des missions locales qui se déroule du 13 au 22 octobre, pas moins de 1.000 événements (contre 700 lors de l’édition précédente) seront organisés dans les structures afin de mieux être identifiées par les publics comme les partenaires. "On a mis l'accent sur la démarche globale d’accompagnement des missions locales afin de montrer la diversité des domaines et des publics visés par nos interventions", souligne Sandrine Aboubadra Pauly, déléguée générale de l’UNML.