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Modes de garde / Emploi - Les crèches et les maternelles responsables du chômage ?

France Stratégie publie une étude intitulée "le temps partiel, une réserve d'emplois ?". A priori, un sujet très classique, mais qui, par le rapprochement de certaines données, prend une tournure iconoclaste qui ne devrait pas manquer de faire réagir. L'étude part pourtant d'un constat déjà connu : l'écart important entre la part du travail à temps partiel en France et celle constatée dans le reste de l'Europe.

Un déficit de 2,8 millions d'emplois

La France compte en effet 4,7 millions de personnes en emploi à temps partiel, soit 12% de la population en âge de travailler. Ce taux est inférieur de sept points à celui constaté dans les pays affichant le plus fort taux d'emploi global. En d'autres termes, le fait de compter une part plus importante de travail à temps partiel ne serait pas sans lien avec un bon niveau général de l'emploi.
En France, le taux d'emploi - rapport entre les effectifs en emploi et la population en âge de travailler - est de 64,2% (chiffre 2014), soit près de dix points de moins que celui des pays de l'Union européenne les plus performants en matière d'emploi : Royaume-Uni (71,9%), Danemark (72,8%) Allemagne (73,8%) et Suède (74,9%).
En convertissant cet écart de taux en nombre d'emplois, la France accuserait ainsi un déficit de près de 2,8 millions d'emplois. Pour les hommes, ce déficit est de 1,5 million d'emplois, à parts égales entre temps plein et temps partiel. Mais pour les femmes - qui représentent un taux d'emploi à temps partiel cinq à six fois supérieur à celui des hommes (quel que soit le pays) -, la France affiche un déficit de 2,5 millions d'emplois à temps partiel, compensé par un "excédent" de 1,2 million d'emplois à temps plein. En termes d'âge, le déficit d'emploi à temps partiel se concentre surtout chez les jeunes (15-24 ans) et chez les seniors (50-64 ans).

Un goût de retour en arrière

Reste à expliquer les raisons de cette situation particulière de la France. Pour France Stratégie - et sans que cela comporte un jugement de valeur - l'origine tient à "des politiques publiques qui ont privilégié l'emploi à temps plein". Chez les femmes, le taux d'emploi à temps plein atteint ainsi 43% contre 37% dans les sept autres pays retenus pour la comparaison. A l'inverse, le taux d'emploi à temps partiel des femmes est de 19% en France contre 31% dans les pays de l'échantillon.
France Stratégie avance plusieurs raisons : "Depuis plusieurs décennies, la France a mis en œuvre des politiques publiques qui ont aidé les femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale. D'importants investissements ont été réalisés en faveur de l'école - notamment l'école maternelle où les enfants peuvent dans certains cas être scolarisés dès l'âge de 2 ans - et en faveur des structures de garde d'enfants. Les rythmes scolaires sont en outre compatibles avec une activité des mères à temps plein, alors qu'en Allemagne près des trois quarts des écoles n'accueillent les enfants que le matin."
Certes, il existe une pluralité de causes et France Stratégie de dit pas que l'offre de modes de garde et de scolarisation précoce - qui permet aux femmes de travailler à temps plein - est directement responsable du déficit d'emplois en France. Mais, dès lors que le manque d'emplois à temps partiel serait responsable du déficit global d'emplois, il est difficile de ne pas faire le lien...
Certes également, l'étude n'idéalise pas l'emploi à temps partiel, en rappelant que la France - et sans doute une bonne part des autres pays - "se caractérise par une part importante du travail à temps partiel subi chez les femmes". Mais il n'empêche que la lecture de l'étude laisse comme un goût de retour en arrière...

 

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