Administration territoriale - Les directions départementales de l'Etat à l'aube de nouveaux changements
"Il est, sauf exception, très difficile aujourd'hui pour un service territorial de l'Etat de bien remplir ses missions." C'est le constat sévère de deux hauts fonctionnaires, Jean-Marc Rebière et Jean-Pierre Weiss, auteurs d'un rapport sur la stratégie de l'organisation à cinq ans de l'administration territoriale de l'Etat, remis au Premier ministre, le 3 juillet. Un rapport amené à compléter celui sur la réforme des sous-préfectures commandé, lui, par le ministre de l'Intérieur et dont la publication est imminente.
Les auteurs ne sont pas tendres avec les expériences passées, notamment celles menées dans le cadre de la Réate (réforme de l'administration territoriale de l'Etat) de 2010, dont ils disent n'avoir "pas trouvé d'estimation disponible des baisses de dépenses qu'elle aurait engendré". Bien plus, la création des directions départementales interministérielles et des directions régionales pâtissent de "nombre de difficultés de fonctionnement […] toujours pas résolues", constatent-ils. Ils disent avoir découvert une administration "déstabilisée", "en perte d'identité professionnelle", et des agents marqués par "une profonde résignation"…
Jean-Marc Rebière et Jean-Pierre Weiss proposent tout d'abord à l'Etat de prendre des "engagements de service public" au 1er janvier 2014. Ces engagements seraient issus d'un travail piloté par le secrétariat général à la modernisation de l'action publique (SGMAP) et validé par le comité interministériel pour la modernisation de l'action publique. Ils concerneraient aussi bien les administrations territoriales que les collectivités territoriales en charge de ces services. L'expérience renouvelée chaque année permettrait de "mieux identifier les évolutions nécessaires des missions propres de l'Etat, dont les contrôles et évaluations, et celles qu'il partage avec les collectivités territoriales".
Le rapport, mené en trois mois, aboutit par ailleurs à trois scénarios plus ou moins audacieux, devant conduire à des baisses d'effectifs annuelles de 1% en moyenne pour les structures départementales et de 2% pour les structures régionales et centrales sur la durée du quinquennat.
Les rapporteurs visent en particulier les directions départementales de la cohésion sociale (DDCS) en situation de "grande fragilité", en raison d'une dispersion des missions et des doublons avec les départements. Dans le premier scénario, ils proposent ni plus ni moins que de les supprimer. Les missions actuellement dévolues aux DDCS (pas moins de neuf) seraient transférées dans d'autres directions. Le volet social du logement serait intégré au sein des directions départementales des territoires ; la jeunesse et les sports aux directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ; les missions relatives à la politique de la ville passeraient aux préfectures de département, etc. En revanche, les directions départementales de la protection des populations seraient maintenues mais amenées à changer de nom, en raison des confusions que celui-ci induit. Elles seraient transformées en directions départementales "de la consommation et de l'alimentation".
Le deuxième scénario privilégie tout au contraire la "stabilité maximale de structures", tant départementales que régionales… Les DDCS seraient même "exonérées des efforts à venir de réduction d'effectifs", "certaines frontières avec les ARS (Agences régionales de santé, NDLR) pourraient être redessinées à leur profit".
Enfin, le troisième scénario ressemble au premier mais pousse plus loin la régionalisation. Les services des DDCS pourraient être transformés en unités territoriales des directions régionales correspondantes.
Alors que le deuxième scénario serait opérationnel dès 2014, les deux autres nécessiteraient une année de plus.