Les réductions d’impôts sur les dons aux associations reconnues d’utilité publique seront préservées, quid des autres associations d’intérêt général ?
Déjà fragilisées par la baisse des subventions, les associations craignent de perdre des dons en cas de coup de rabot sur les réductions d’impôts. Les "mesures de reconfiguration" ne toucheront pas les associations reconnues d'utilité publique, a promis ce 8 juillet le Premier ministre. Qu’en sera-t-il pour les associations d’intérêt général qui n’ont pas la reconnaissance d’utilité publique ?

© Recherches et solidarités et missbutterflies CC BY-SA 2.0
Plusieurs associations manifestent depuis quelques jours leur vive inquiétude, alors qu’une revue de dépense transmise à Bercy par l’Inspection générale des finances (IGF) et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (Igéser) proposerait de revenir sur certains avantages fiscaux dont bénéficient les donateurs aux associations, avec à la clé 450 millions d'euros d'économies. "Les associations de lutte contre la pauvreté, qui sont toutes des associations reconnues d'utilité publique, et les associations reconnues d'utilité publique ne seront en aucun cas touchées par des mesures de reconfiguration", a assuré ce 8 juillet 2025 le Premier ministre, en marge d’un déplacement à Chartres.
François Bayrou doit présenter mardi prochain son plan de redressement des finances publiques. Les dépenses fiscales de l’État à destination des associations ont été chiffrées à 4,7 milliards d’euros au titre de 2025, dont 2 milliards pour les réductions d’impôt des particuliers et 1,7 milliard pour celles des entreprises, dans le dernier "jaune budgétaire" sur le soutien de l’État aux associations (voir notre article). L’annonce de ce jour est-elle de nature à rassurer l’ensemble des associations recevant actuellement des dons ?
Les associations d’intérêt général n’ont pas toutes la reconnaissance d’utilité publique
Si le Premier ministre a pris soin de préciser que les associations "reconnues d’utilité publique" seront préservées, est-ce que cela implique que les "mesures de reconfiguration" pourraient concerner les associations n’ayant pas cette reconnaissance ?
Actuellement, les dons des particuliers aux organismes "d'intérêt général ou reconnu d'utilité publique établis en France" ouvrent droit à une réduction d’impôt (66% du montant versé, dans la limite de 20% du revenu imposable), de même que les dons aux organismes "d'aide aux personnes en difficulté ou aux victimes de violence" (75% dans la limite de 1.000 euros par an, puis 66% dans la limite de 20% du revenu imposable). Dans le cadre du mécénat d'entreprise, les réductions d’impôt sont de 40 à 60% des dons réalisés aux organismes d’intérêt général. Or, la liste des organismes éligibles est bien plus longue que les seules associations reconnues d’utilité publique qui n’étaient qu’au nombre de 2.000 en 2018 (voir notre article) - alors que quelque 1,5 million d’associations sont actives en France, même si toutes ne sont pas d’intérêt général. Pour recevoir un don, l’organisme doit remplir trois conditions qui garantissent l’intérêt général : avoir un but non lucratif, avoir un objet social et une gestion désintéressée et ne pas fonctionner au profit d'un cercle restreint de personnes.
"La stabilité fiscale de la générosité est essentielle à la préservation de la capacité d'agir des associations et fondations d'intérêt général", affirme la Coalition Générosité, collectif rassemblant une dizaine d’organisations à but non lucratif dont France générosités, le Mouvement associatif, l’Admical et l’Association française des fundraisers, dans un communiqué du 4 juillet 2025. "Des pans entiers du secteur associatif sont déjà dans une situation financière très fragile, les acteurs ont subi des baisses de subvention", selon Delphine Rouilleault, présidente du collectif Alerte, qui regroupe 37 associations de lutte contre la pauvreté. À l’issue de la rencontre du 3 juillet des associations avec le Premier ministre (voir notre article), Delphine Rouilleault restait inquiète, considérant que François Bayrou s’était engagé à soutenir les associations mais sans exclure totalement de donner suite aux propositions du rapport de l’IGF et de l’Igéser.
Plus de la moitié des associations employeuses en difficulté financière
Selon le baromètre "Opinion des responsables associatifs" publié le 7 juillet 2025 par Recherches & Solidarités (R&S), 53% des associations employeuses jugent leur situation financière difficile (40%) ou très difficile (13%). Les associations d’éducation populaire, avec ou sans salarié, sont celles qui se déclarent le plus en difficulté sur le plan financier (58%), suivies des associations de solidarité internationale (51%) et de celles des secteurs sanitaire et social (48%).
"Les plus petites associations, souvent sans salarié, cumulent les difficultés sur le bénévolat", selon R&S, qui souligne que les associations sportives sont particulièrement fragilisées par la raréfaction des bénévoles. Quant aux grandes associations (plus de 500.000 euros de budget), elles "déclarent davantage de tensions financières, ainsi que des inquiétudes croissantes quant à l’évolution des politiques publiques et leurs relations avec les collectivités et l’État" (voir graphique ci-dessus). "La proportion d’associations en grande difficulté́ est plus importante parmi les employeurs", alerte encore R&S, qui ajoute que les associations situées en territoire rural et en quartier politique de la ville "souffrent davantage".