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Accès aux soins - Maisons de santé : des résultats prometteurs, mais perfectibles

A la demande de la Caisse nationale d'assurance maladie, l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) a procédé à une "évaluation exploratoire" des maisons de santé pluridisciplinaires. L'étude a porté sur une dizaine de maisons de santé des régions Bourgogne et Franche-Comté. Celles-ci regroupent dans un même lieu, et dans le cadre d'un exercice libéral, des professionnels de santé, médicaux et paramédicaux. Reconnues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les maisons de santé font l'objet d'une expérimentation - portant sur la rémunération par l'assurance des professionnels de santé qui y exercent - dans six régions tests : Bourgogne, Bretagne, Franche-Comté, Ile-de-France, Lorraine et Rhône-Alpes. Ces structures constituent l'une des réponses possibles aux difficultés de couverture sanitaire des zones rurales ou de certaines zones urbaines.
Au-delà des avantages inhérents au principe même des maisons de santé - comme le regroupement sur un même lieu d'une offre pluridisciplinaire de professionnels libéraux -, l'étude de l'Irdes relève également une plus grande accessibilité horaire de ces structures : ouverture moyenne 5,5 jours par semaine et 11h30 par jour. L'une des neuf maisons étudiées est même ouverte 7 jours sur 7, durant toute l'année. Le nombre de jours d'ouverture se situe ainsi entre 254 et 358 jours par an, soit une amplitude très nettement supérieure à celle d'un médecin généraliste isolé. Pourtant, les professionnels exerçant en maison de santé travaillent plutôt moins (temps de travail clinique moyen de 40 heures par semaine pour un généraliste) que leurs collègues.
Les neuf maisons de santé étudiées sont très hétérogènes en termes de taille (de 200 à 800 m2), de composition (de 2 à 9 généralistes et 3 à 17 professionnels de santé non-généralistes) et de niveau d'équipement. En dépit de cette hétérogénéité, l'Irdes relève cependant que "la collaboration entre les professionnels est bien observable au sein des maisons de santé, notamment entre les médecins et les infirmières". Ceci permet de proposer "une gamme d'offre de soins étendue par rapport à un cabinet classique de médecine générale". Les maisons de santé réalisent ainsi des actes techniques comme les sutures de plaies, les actes de petite chirurgie, les pansements lourds, les poses de plâtres et autres immobilisations, ou encore la pose de dispositifs contraceptifs. La plupart d'entre elles proposent aussi - grâce à la présence d'infirmières et de diététiciennes - des actions de santé publique : éducation thérapeutique, consultations de dépistage des facteurs de risque, actions de prévention (prévention des chutes des personnes âgées par exemple), séances de vaccination... Une analyse réalisée par l'Irdes montre ainsi que les patients diabétiques de type 2 sont mieux suivis lorsque leur généraliste exerce au sein d'une maison de santé pluridisciplinaire.
Conséquence prévisible : le nombre d'actes par patient est légèrement plus élevé dans les maisons de santé qu'en pratique isolée, avec au final une dépense totale et une dépense de médecine générale supérieures de 2% à celles de l'échantillon témoin. Ce chiffre recouvre toutefois des écarts importants et ne prend pas en compte les effets induits de la prévention. L'Irdes observe également que les maisons de santé présentent une grande disparité de projet et de financement. Deux ont été financées exclusivement par les professionnels de santé qui y exercent. Elles ont une taille importante et se situent dans un environnement concurrentiel. En revanche, cinq autres ont bénéficié d'un financement partiel ou total des collectivités territoriales concernées. De taille plus modeste, elles visent avant tout à maintenir une présence médicale sur le territoire. Pour renforcer encore la transversalité et la coopération entre professionnels, l'Irdes estime que "des gains d'efficience supposent à la fois un investissement plus important de la part de ces structures dans l'organisation (utilisation plus poussée du système d'information, formalisation de procédures collectives et notamment de coopération interprofessionnelle), mais également la réalisation de tâches supplémentaires comme l'éducation thérapeutique".

 

Jean-Noël Escudié / PCA