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Commande publique - Mapa : précisions sur le régime du référé contractuel

Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat est venu préciser le régime d'annulation des marchés publics dans le cadre d'un référé contractuel. Prévu aux articles L. 551-13 et suivants du Code de justice administrative (CJA), le référé contractuel permet aux candidats évincés d'obtenir l'annulation d'un marché déjà signé en raison de la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence par le pouvoir adjudicateur. Ce recours n'est toutefois pas ouvert aux requérants qui auraient déjà formé un référé précontractuel, sauf si le marché litigieux a été signé avant la fin du délai du standstill.

En l'espèce, le syndicat intercommunal à vocation multiple (Sivom) Morillon, Samoëns, Sixt-Fer-à-Cheval, Verchaix avait attribué le lot de travaux de rénovation du réseau d'eau potable et d'assainissement au groupement d'entreprises Sassi, Benedetti-Guelpa, Socco.
Le 10 mai 2016, le Sivom a notifié à la société Decremps BTP le rejet de son offre. Cette dernière a alors saisi le juge du référé précontractuel, l'après-midi du 23 mai 2016, en vue de l'annulation de la procédure de passation du marché à procédure adaptée (Mapa) en cause.
Toutefois, le marché a été signé dans la matinée du 23 mai. Cet évènement est donc de nature à fermer la voie du référé précontractuel. La société a alors décidé de transformer la nature de son recours et de présenter un référé contractuel. Cependant, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête. Il a en effet jugé qu'elle était irrecevable puisque le Sivom avait observé un délai de treize jours entre la notification du choix du titulaire à la société requérante et la signature du marché. Le délai de "standstill" applicable aux Mapa (onze jours) avait donc bien été respecté et la société ne pouvait transformer son référé précontractuel en référé contractuel, faute de ne pas avoir présenté le premier en temps utile.
La société évincée a alors saisi le Conseil d'Etat d'un recours en cassation en vue d'obtenir l'annulation de cette ordonnance.

Point de départ du délai de "standstill" en Mapa

Les juges du Palais Royal ont tout d'abord rappelé que le Sivom n'était pas obligé de notifier le choix de l'attributaire aux candidats évincés. Cette notification ne saurait donc être considérée comme le point de départ du délai de "standstill". L'article 40-1 du cCde des marchés publics (CMP) prévoit que pour faire courir le délai de "standstill" en Mapa le pouvoir adjudicateur doit publier au Journal officiel de l'Union européenne (JOUE) un avis relatif à son intention de conclure un marché.
En l'espèce, le Sivom n'a rien publié de tel et c'est donc à tort que le juge a rejeté le référé contractuel de la société requérante. En effet, l'absence de publication de cet avis n'a pas déclenché le délai de "standstill" et, bien qu'un délai de treize jours ait été observé par le Sivom, la signature du marché a empêché le référé précontractuel d'aboutir. En vertu de l'article L. 551-15 du CJA, le référé contractuel de la société était bien recevable. Le Conseil d'Etat a donc annulé l'ordonnance litigieuse.

Annulation sous conditions

Tranchant l'affaire sur le fond, la Haute Juridiction administrative n'a toutefois pas fait droit à la demande d'annulation du marché présentée par la société requérante. En effet, l'article L. 551-18 du CJA encadre le pouvoir d'annulation du juge du référé contractuel. Quand le contrat a été signé avant l'expiration du délai de "standstill", le juge ne pourra procéder à l'annulation seulement si deux conditions sont réunies : "la méconnaissance de ces obligations a privé le demandeur de son droit d'exercer le recours prévu par les articles L. 551-1 et L. 551-5, et les obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles sa passation est soumise ont été méconnues d'une manière affectant les chances de l'auteur du recours d'obtenir le contrat."
En l'espèce, la première condition était bien remplie puisque l'absence de publication d'un avis relatif à son intention de conclure un marché a empêché la société évincée de présenter un référé précontractuel. En revanche, le Conseil d'Etat a estimé que la deuxième condition n'était pas remplie, la société requérante n'apportant aucun élément à ce sujet. Le Mapa n'a donc pas été annulé.

L'Apasp

Référence : CE, 23 janvier 2017, n°401400
 

 

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