Commande publique - Modalités de mise en oeuvre de la subrogation par l'assureur en cas de dommage ouvrage
Le Conseil d'Etat, par un arrêt du 3 octobre 2008, a été amené à trancher une question inédite relative aux modalités de mise en oeuvre de la subrogation de l'assureur suite à un dommage ouvrage. Pour rappel, la subrogation est un mode de transmission des créances permettant au titulaire d'un droit (le subrogeant) de transmettre au bénéficiaire de la subrogation (le subrogataire) le droit de créance qu'il détient sur son propre débiteur (le subrogé). Le subrogataire devient ainsi le créancier du subrogé au lieu et place du subrogeant et peut exercer les actions que le titulaire lui transmet contre son propre débiteur.
La décision du Conseil d'Etat est inédite puisqu'il s'agit de déterminer à quel moment l'assureur est en droit de se substituer à son client pour obtenir le paiement de la créance : avant ou après le paiement des indemnités dues à l'assuré ? Dans cette affaire, la commune de Cocherene, qui avait souscrit une police d'assurance "dommage ouvrage" auprès de la société d'assurance Albingia ne parvient pas à obtenir le versement de ses indemnités suite à l'apparition de désordres importants sur l'ouvrage. Elle saisit donc le tribunal de grande instance afin d'en obtenir le paiement auprès de sa société d'assurance. La société d'assurance justifiait son refus par le fait qu'elle souhaitait, au préalable, obtenir du tribunal administratif une condamnation solidaire de la société responsable de la mission d'entreprise générale et de l'architecte à lui payer l'intégralité des sommes qui seraient mises à sa charge en qualité d'assureur de la commune.
Les juges de la Haute Juridiction ont tout d'abord rappelé que l'article L.121-12 du Code des assurances précise clairement que ce n'est qu'après avoir versé l'indemnité à l'assuré que la société d'assurance est en droit de s'y substituer afin d'engager des actions envers les auteurs du dommage. Le Conseil d'Etat apporte également une précision importante sur le mode de preuve du paiement de cette indemnité. Selon la cour administrative d'appel, seule la quittance subrogative, remise par l'assuré indemnisé, permet à la compagnie d'assurance de prouver qu'elle a bien effectué ce versement. Le Conseil d'Etat a quant à lui considéré que "l'assureur qui demande à bénéficier de la subrogation [peut] justifier par tout moyen du paiement d'une indemnité à son assuré", précisant en outre que "cette preuve doit être apportée au plus tard à la date de clôture de l'instruction". La requête présentée par l'assureur a en définitive été rejetée puisque celui-ci n'a pas démontré, ni même prétendu, avoir versé à la commune une quelconque indemnité.
L'Apasp
Référence : Conseil d'Etat, 3 octobre 2008, Société Albingia, 291414
Article L. 121-12 du code des assurances : "L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur faits, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur."