Pénurie de foncier à urbaniser : de Toulouse à Bourg-en-Bresse, les 20 villes les plus touchées, selon une étude

Dans la dernière édition de son baromètre sur l'attractivité des métropoles et des agglomérations, le cabinet de conseil en immobilier professionnel Arthur Loyd estime à 113.000 hectares le manque de foncier à urbaniser d'ici à 2030, du fait de la mise en place de l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN). 20 villes vont être particulièrement touchées, à commencer par Toulouse, Bordeaux et Nantes.

Quelles vont être les conséquences de la sobriété foncière imposée par l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) sur les métropoles et les agglomérations ? Pour le cabinet de conseil en immobilier professionnel Arthur Loyd, 113.000 hectares vont manquer en France d'ici 2030 pour répondre aux besoins de logement et de développement des territoires. Et selon des chiffres extraits de la septième édition de son baromètre sur l'attractivité des métropoles et des agglomérations, ce sont justement les territoires les plus dynamiques en termes de croissance démographique et/ou de progression de l'emploi qui vont pâtir le plus de la rareté du foncier.

20 villes sont particulièrement touchées. Ces 20 pôles correspondant aux bassins d'emploi Insee (7% du territoire) vont concentrer à eux seuls 25% du nombre total d'hectares manquants en France, estime l'étude. On trouve en tête de liste Toulouse, Bordeaux et Nantes, puis Rennes, Lyon, Dax, Caen, Rouen, Tours et Montpellier. Les dix autres villes sous forte tension foncière sont Aix-en-Provence, La Teste-de-Buch (Gironde), Orléans, Bayonne, Clermont-Ferrand, Pau, Perpignan, Auch, Le Mans et Bourg-en-Bresse.

Marche haute pour les nouveaux arrivants

"Le législateur a 'sifflé la fin de la partie' pour les territoires à faible densité urbaine, mais aussi pour les pôles fortement attractifs pour les Français, comme le Grand-Ouest, les littoraux et le couloir rhodanien, analyse Cevan Torossian, directeur du département Etudes & Recherche d'Arthur Loyd. La sobriété foncière va avoir des effets insidieux sur l’aménagement du territoire, en favorisant les initiés, au détriment des nouveaux arrivants : les acteurs déjà présents sur un territoire donné, bénéficiant déjà de sites construits ou artificialisés, dont la valeur va très probablement augmenter. À l’inverse, la marche sera beaucoup plus haute pour les nouveaux arrivants dans un territoire, qui subiront le surcoût lié à la raréfaction du foncier. Ce raisonnement s’applique autant pour la PME/PMI en plein essor, que pour les ménages avec la question du logement."

Alors que selon l'Insee, le nombre de ménages devrait continuer de croître, passant de près de 30 millions en 2018 à 34 millions en 2050, de nouveaux besoins en logements, services et équipements vont apparaître, dans un contexte de rareté foncière. "L’augmentation des coûts de l’immobilier va représenter une problématique durable pour les Français, alors que le logement est d’ores et déjà le premier poste de dépenses des ménages", souligne Cevan Torossian.

Frein à la réindustrialisation ?

Autre sujet de premier ordre, pour Arthur Loyd : le besoin de foncier lié à la réindustrialisation, alors que 12,8 milliards d'euros ont été investis au premier semestre 2023 dans les filières vertes. Selon l'étude, les territoires localisés hors des métropoles, qui seront demain les premiers touchés par les contraintes de sobriété foncière, concentrent aujourd’hui les trois quarts du volume total investi. Tous secteurs confondus, 22.000 hectares devraient être nécessaires pour permettre la réindustrialisation du pays, selon le rapport remis par le préfet Rollon Mouchel-Blaisot en juillet dernier.

"Il ne s’agit pas seulement de l'espace nécessaire à la construction d’une usine telle qu’une gigafactory de batteries. Les usines dépendent de tout un écosystème : logements, établissements scolaires, de santé, commerces, infrastructures de transport, plateformes logistiques…", commente Cevan Torossian. Selon l'expert, "il faudra privilégier le recyclage urbain au sens large : la reconversion de friches, la transformation d’immeubles obsolètes, etc. En d’autres termes, la reconstruction de la ville sur elle-même. Mais attention : même en augmentant le volume du recyclage urbain, le compte n’y est pas ! Ces pratiques complexes ont par ailleurs pour point commun d’être plus coûteuses et plus longues à mettre en œuvre. Et il ne faut rien attendre du projet de loi 'relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement' : en prévoyant de nouvelles mesures d’exception à la règle, il ajoutera de la complexité et va à l’encontre de la logique de simplification. Or, il faudrait réduire la complexité administrative pour faciliter la construction d’usines comme de logements ; et une pause sur le ZAN fait partie des solutions."