Plan Logement d’abord 2 : une continuité dans les ambitions, mais encore "beaucoup de flou"

Le ministre du Logement a présenté ce 20 juin 2023 le volet 2 du plan Logement d’abord, pour la période 2023-2027. Si les moyens augmentent, le gouvernement affiche plutôt une continuité sur les objectifs, avec l’ambition de sortir de nouveau de l’ordre de 400.000 personnes de la rue, en développant les pensions de famille, l’intermédiation locative et le logement très social. Les associations et l’Union sociale pour l’habitat estiment que ce plan tant attendu est encore trop flou.

La continuité. C’est le mot qu’a employé le ministre du Logement pour présenter ce jour, aux associations, le plan Logement d’abord 2. Continuité sur l’ambition : sortir au moins 400.000 personnes de la rue dans le cadre de ce nouveau plan, après 440.000 personnes qui ont accédé à un logement avec le premier plan, soit un total de plus de 800.000 personnes entre 2017 et 2027.

Et continuité dans la méthodologie, avec le fait de s’appuyer sur des territoires d’accélération mobilisant collectivités et associations. Continuité enfin dans les "outils" de ce Logement d’abord. Par rapport au premier plan qui visait à permettre aux personnes sans domicile d’accéder à un logement stable, les chiffres concernant les différents dispositifs restent en effet sensiblement les mêmes : le développement des pensions de famille avec un même objectif d’ouvrir 10.000 places (quelque 7.200 ont été finalement ouvertes sur la période précédente), de l’intermédiation locative avec un objectif de création de 30.000 places (après 42.000 places créées) et 100.000 logements très sociaux (PLAI et PLAI + : 122.000 personnes sans domicile ont eu un accès à un logement très social entre 2017 et 2022). En nouveauté par rapport au premier volet du plan, les résidences sociales, comprenant les foyers de jeunes travailleurs (FJT), sont intégrées dans la stratégie de Logement d’abord.

Une rallonge de 160 millions d’euros sur la période 2023-2027

"La pension de famille et l’intermédiation locative permettent un accès plus rapide à un logement durable. Notre priorité, c’est de nous inscrire dans une logique de parcours", affirme Olivier Klein. Pour sécuriser cet accès au logement et éviter des retours à la rue, le ministre insiste sur l’importance de "l’accompagnement social avant, pendant et après" et assure que ce nouveau volet du plan permet de "[s’en] donner les moyens". Ainsi, 5 millions d’euros seront dédiés à l’accompagnement des personnes en résidence sociale et les équipes de prévention des expulsions locatives mises en place pendant la période hivernale seront pérennisées.

Comme annoncé par la Première ministre lors de la restitution du Conseil national de la refondation (CNR) sur le logement (voir notre article), la rallonge budgétaire sera en tout de 160 millions d’euros sur la période 2023-2027, correspondant à une hausse de 44 millions d’euros en 2023 puis de 29 millions d’euros chaque année entre 2024 et 2027. Au total, le ministre du Logement annonce un budget de 500 millions d’euros pour ce plan Logement d’abord 2023-2027, ce qui serait le double par rapport au premier volet.

Encore "beaucoup de flou", pour les associations et l’USH

Les associations ont exprimé leur satisfaction sur la poursuite de la dynamique, mais restent dans l’attente de précisions sur la manière d’affecter les crédits annoncés. "Nous sommes tous extrêmement mobilisés", affirme Nathalie Latour, directrice générale de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), ne cachant cependant pas "une profonde inquiétude" au sujet de l’hébergement social. "Vous êtes en train de baisser le nombre de places et les subventions aux associations", interpelle-t-elle, face au ministre. Les moyens annoncés pour ce nouveau plan sont insuffisants, notamment s’ils comprennent la couverture de l’inflation, estime quant à lui Manuel Domergue, directeur des études de la fondation Abbé-Pierre. Il y a en outre "beaucoup de flou", selon lui, dans ce nouveau plan. L’inflation est prise en charge par ailleurs, lui répond-on.

Mais ce "flou" est relevé également par les acteurs du logement d’insertion (Fapil, Soliha, Unafo et Unhaj), qui estiment que les objectifs de ce nouveau volet sont "trop timorés". Ce collectif salue toutefois dans son communiqué la reconnaissance, dans le cadre du nouveau plan, du "rôle du logement d’insertion (pensions de famille, IML, mais aussi les résidences sociales et l’habitat jeunes...) comme levier central de cette politique".

"À ce stade, l'Union sociale pour l'habitat n'est pas en mesure de qualifier la crédibilité du dispositif financier annoncé", tranche l’USH dans un communiqué où elle "regrette le flou et le manque d'ambition" de ce deuxième plan. "À quoi rime d'afficher à grands renforts de communication un plan Logement d'abord 2, alors même que le financement de la construction de logements très sociaux est remis en question par la fin programmée des financements apportés par Action Logement au fonds national des aides à la pierre", interroge Emmanuelle Cosse, présidente de l’USH.

"Il y aura du PLAI en dehors du plan Logement d’abord", met en avant Olivier Klein devant la presse, sans pour autant pouvoir encore préciser les chiffres. Ces derniers seront précisés, selon le ministre, dans le cadre des prochaines lois de finances et dans le pacte de confiance avec l’USH.

Absence des associations d’élus

Le ministre du Logement revendique par ailleurs "un niveau exceptionnel" du nombre de places d’hébergement social, qui dépasse les 200.000. "Aujourd’hui le nombre de places n’a pas baissé", ajoute Sylvain Mathieu, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal). L’objectif est bien de "pousser au maximum toutes les possibilités que nous avons d’optimiser ces places" et de développer la politique du Logement d’abord "pour sortir les personnes de la rue le plus vite possible", poursuit-il. Pour Olivier Klein, c’est l’objectif collectif de "desserrement" de l’hébergement social, qui passe par le travail d’accompagnement social et administratif des "sas" (voir à ce sujet notre article).

L’absence des associations d’élus à cette réunion a été remarquée, le ministre du Logement assurant toutefois à la presse que les échanges sont réguliers avec les collectivités et que les élus, y compris les maires, "sont très mobilisés sur cette politique""On ne peut pas être dans un jeu de ping-pong entre les uns et les autres, à se renvoyer des responsabilités", conclut l’ancien maire de Clichy-sous-Bois, estimant que "les compétences sont assez claires" et que c’est "la mise en œuvre collective" qui compte.