PLF 2020 : la hausse des crédits pour les chômeurs en fin de droits, prélude à une hausse des allocataires du RSA ?

Les crédits du programme 102 (Accès et retour à l'emploi) de la mission Travail et Emploi prévoient une enveloppe de 2,235 milliards d'euros – en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP) – pour le financement de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), prestation de solidarité destinée aux demandeurs d'emplois ayant épuisé leurs droits à l'assurance chômage. On peut y ajouter 21,6 millions d'euros pour l'ASS-formation et 40,5 millions pour l'ASS des bénéficiaires de l'Accre (aide aux chômeurs créant ou reprenant une entreprise). Selon les indications du projet annuel de performance, "il est prévu un effectif de 386.600 allocataires effectivement mandatés sur l’exercice, pour une durée moyenne de 365 jours".

L'enveloppe inscrite pour 2020 correspond à une hausse de 241 millions d'euros sur l'année antérieure, soit une progression de l'ordre de 12%. Une telle augmentation ne manque pas de surprendre, alors que la situation de l'emploi a tendance à s'améliorer. Le nombre de bénéficiaires de l'ASS recule d'ailleurs régulièrement depuis quatre ans. D'une moyenne de 427.500 en 2016, ce chiffre est passé à 339.500 en juin 2019, selon les séries statistiques de Pôle emploi, soit un recul de près de 21%. Comparée au chiffre constaté de juin 2019, la hausse du nombre de bénéficiaires de l'ASS budgétee pour 2020 serait donc de l'ordre de 14%.

Pour expliquer une telle évolution, le ministère du Travail invoque une sous-budgétisation au PLF 2019, mais celle-ci ne semble pas avérée dans la mesure où la tendance actuelle correspond bien à la moyenne initialement envisagée pour 2019 (339.300 bénéficiaires). La hausse des bénéficiaires prévue au PLF 2020 anticipe plus vraisemblablement les effets de la réforme de l'assurance chômage, qui entre progressivement en vigueur entre le 1er novembre 2019 et le 1er avril 2020. Selon un document de travail de l'Unedic publié par Le Monde le mois dernier, le durcissement des règles pourrait toucher, à des degrés divers, environ 40% des allocataires, soit un million de personnes.

Pour les départements, le problème est que l'ASS constitue le dernier filet de sécurité avant le basculement dans le RSA. Même s'il n'y a pas de causalité mécanique – un bénéficiaire de l'ASS a plus de chance de retrouver du travail si la situation de l'emploi continue de s'améliorer – une progression du nombre de bénéficiaires de l'ASS aurait forcément un impact à terme sur celui des allocataires du RSA. Celui-ci serait alors d'autant plus sensible qu'après une année de baisse en 2017, le nombre de ces allocataires s'est stabilisé en 2018, selon le dernier numéro de la lettre "RSA Conjoncture" de la Cnaf.