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Bâtiment - Rénovation énergétique : faut-il créer un fonds d'investissement public-privé ?

Pour lever le principal obstacle à la rénovation énergétique des bâtiments, à savoir son financement, un groupe de travail constitué de professionnels de l'immobilier et de l'énergie a publié le 18 février une série de propositions intéressant notamment les collectivités.

Neuf mois. C'est le temps qu'il a fallu au groupe de travail dédié aux financements innovants de l'efficacité énergétique pour rendre ses travaux. Très attendus, ils donnent lieu à un site dédié et ont mobilisé plus d'une centaine de participants missionnés dans le cadre du plan Bâtiment durable que préside Philippe Pelletier. Le groupe part du constat que ces moyens de financement sont "complémentaires des outils incitatifs innovants" - crédit d'impôt, éco-prêt à taux zéro - et ne sont pas forcément nouvellement créés mais mobilisés et importés de secteurs autres que l'efficacité énergétique. Autre constat : pour "mettre en mouvement les acteurs", il faut réveiller le marché, lui "donner un cap". En clair, nulle solution miracle : aussi innovants soient-ils, les dispositifs de financement ne fonctionneront que si "une trajectoire claire, tant en termes de flux de rénovations que de stocks de bâtiments rénovés et à rénover" est affirmée, notamment à travers les schémas locaux (plans Climat-Energie territoriaux) et des stratégies patrimoniales "permettant d'organiser concrètement la montée en rythme et en qualité des rénovations". En outre, le secteur du bâtiment étant réputé "à forte inertie", il préconise que les changements s'opèrent "dans la continuité de l'existant", sous peine de "déstabiliser la filière et d'affaiblir les initiatives privées ou publiques locales qui émergent actuellement après des années de gestation".

Un fonds d'investissement public-privé

Le groupe préconise la création d'un fonds d'investissement public-privé. "Compte tenu de l'éparpillement des initiatives, de la multiplication des labels, du flou concernant les systèmes de comptage d'économies, il est nécessaire de regrouper l'ensemble des possibilités de financements innovants dans le cadre de la rénovation énergétique en un seul endroit et créer les conditions de l'amorçage", indique le rapport. L'idée, très ambitieuse, serait de créer un véhicule de refinancement "d'échelle nationale ou internationale" en vue d'accélérer les circuits de financements. "Porté et garanti par la puissance publique" mais sans peser sur son endettement public, il devra être doté de suffisamment de capitaux "pour accueillir plusieurs milliards d'euros de dette" et serait noté au plan national et international. Son capital pourrait être abondé au départ par les énergéticiens et des fonds issus de la Banque européenne d'investissement (BEI). Et son modèle s'inspirer de l'expérience de la banque KfW - ou Kreditanstalt für Wiederaufbau, pour "Etablissement de crédit pour la reconstruction" - soit l'une des quinze premières banques d'Allemagne. Pour étudier sa préfiguration, le rapport suggère qu'une étude soit confiée à la CDC Climat, en articulation avec les acteurs du secteur et du plan Bâtiment durable. Quant aux prochains fonds du Feder 2014-2020, ce rapport suggère qu'ils soient mobilisés et affectés à des circuits "proches des projets", par exemple ceux portés par des sociétés d'économie (SEM) ou sociétés publiques locales (SPL).

Les nombreux visages du tiers-financement
 

Passant en revue le modèle du tiers-financement, ses intérêts (lever les barrières de trésorerie, créer de la confiance financière), son potentiel dans le temps (des années à se mettre en place, nécessité de maintenir en parallèle le système classique de subventions) mais aussi ses limites, le groupe fait le point sur les formes variées qu'il prend actuellement quand il est porté par des acteurs publics. Premier modèle : les SEM, "qui jouent le rôle d'avant-garde et assument les coûts liés à la création de modèles économiques innovants". La SEM Energies Posit'if récemment créée en Ile-de-France est ainsi citée. Autre modèle : les SPL (où il n'y a aucun actionnaire privé), avec l'exemple de la SPL Oser créée en décembre dernier en Rhône-Alpes. La troisième piste, actuellement à l'étude en région Picardie et Nord-Pas-de-Calais, consiste à créer des services publics de l'efficacité énergétique (SPEE) qui "pourraient accompagner le développement d'une offre intégrant un financement" et, ainsi, permettre l'amorçage de la rénovation selon une logique de paiements lissés dans le temps, à l'instar des pratiques de financement des réseaux de distribution d'eau potable, d'assainissement ou de télécommunications.

Potentiel de la densification

Selon ce rapport, les projets de densification des bâtiments représentent une piste incontournable en vue d'accélérer les rénovations énergétiques. A condition d'orienter la "valeur économique", "les flux financiers" générés par la création de ces nouvelles surfaces - qui le sont soit par densification horizontale (parcellaire), soit par densification verticale (surélévation) - vers des travaux d'amélioration de l'efficacité énergétique. Reste qu'en France, les projets de surélévation sont bien trop rares, et ce même chez les bailleurs sociaux, du moins en comparaison avec les pratiques de nos voisins européens. Le rapport expose donc plusieurs mesures favorisant la réalisation de telles opérations.

 

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