Service public de gestion des déchets : Intercommunalités de France propose de faire payer davantage les producteurs

L'association d'élus a publié ce 8 février un état des lieux du financement du service public de gestion des déchets, dont les intercommunalités ont la compétence exclusive. Pour rééquilibrer un système qu'elle estime aujourd'hui fragilisé, elle préconise notamment de faire évoluer la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) afin de la faire peser davantage sur les metteurs sur le marché.

Premier poste de dépenses de protection de l'environnement en France, la gestion des 39 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés (DMA) a représenté un coût de 10,9 milliards d'euros pour les collectivités en 2020. Compétence exclusive des intercommunalités, le service public de gestion des déchets (SGPD) a vu ses obligations renforcées pour faire face aux enjeux environnementaux. Dernière en date, après la mise en place du geste unique de tri au 1er janvier 2023, les intercommunalités doivent désormais proposer des solutions de tri à la source des biodéchets sur l'ensemble du territoire.

Pour prendre la mesure des évolutions qui interrogent le modèle de financement de ce service, Intercommunalités de France a publié ce 8 février un nouveau Focus. Cet état des lieux revient d'abord sur le cadre d'action des intercommunalités pour la prévention et la gestion des déchets avant d'aborder les défis à relever et le modèle de financement qui "fait face à un déséquilibre croissant et est de plus en plus questionné par les citoyens", souligne l'association d'élus. Face à une hausse croissante du coût du SPGD - en 2020, son coût complet s'élevait en moyenne à 137 euros par habitant et, en déduisant les recettes, le coût aidé, correspondant au reste à financer pour la collectivité, était de 118 euros -, Intercommunalités de France présente plusieurs propositions visant à sécuriser son financement.

Revoir la répartition des coûts

La première a pour objet de rééquilibrer la répartition des coûts entre producteurs, consommateurs et contribuables, en accroissant la part des contributions des metteurs sur le marché, responsables du choix des matériaux d’emballages. "Aujourd’hui, seules les filières REP 'emballages' et 'papiers' ont un objectif de prise en charge des coûts (respectivement de 80% et 50%), constate l'association. Il s’agirait ainsi de tendre vers une prise en charge à 100 % des coûts nets pour les déchets sous REP, tout en s’assurant déjà du respect de l’esprit de la législation en vigueur actuellement". Intercommunalités de France préconise ainsi de "supprimer les restrictions réglementaires au taux de 80% qui est actuellement conditionné sans motivation légale à l’atteinte de performances données", de "réviser la restriction légale existante qui se concentre sur les 'coûts de référence d’un service de gestion des déchets optimisé'" et de "fixer des objectifs et une trajectoire pour les autres filières REP".

TGAP à réajuster

L'association préconise également une révision des paramètres de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Selon elle, la pénalisation du traitement par enfouissement ou incinération est "particulièrement problématique pour les collectivités qui ne disposent pas de leviers d’action pour influer sur la réemployabilité / la recyclabilité des produits ou encore sur l’acte d’achat". Le volume incompressible de déchets qui doivent aujourd'hui être dirigés vers ces exutoires pourrait ainsi faire l’objet d’un tarif de base révisé, estime-t-elle. Elle propose également un retour des recettes de la hausse du produit de la TGAP vers le financement d’actions vertueuses dans lesquelles s’engagent les collectivités dans le traitement des déchets et suggère en outre "une TGAP appliquée non sur l’aval – qui pèse sur la collectivité ayant la charge de gérer la fin de vie d’un déchet – mais sur l’amont, sur les producteurs de ces futurs déchets non valorisables".

Faciliter la tarification incitative

Il faudrait par ailleurs faciliter la diffusion de la tarification incitative (taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative ou Teomi) partout où son étude d’impact y est favorable, estime Intercommunalités de France. La refonte de la carte intercommunale en 2017 a en effet marqué un relatif retour en arrière, observe l'association, du fait de l’intégration d’intercommunalités de plus petites tailles à des ensembles plus urbains où la tarification incitative est généralement perçue comme plus complexe à mettre en œuvre – c'est surtout le cas dans les milieux urbains denses et les territoires touristiques.

Afin de faciliter la mise en œuvre de la Teomi, l'association suggère d'autoriser de manière pérenne la coexistence de plusieurs modes de tarification des déchets dans une même intercommunalité (a minima, de deux modes, l’un classique et l’autre incitatif). "Cette possibilité existe déjà depuis plusieurs années à titre transitoire, que ce soit pour permettre l’expérimentation de la taxe incitative (art. 1522 bis du code général des impôts, pour une durée récemment portée à 7 ans) ou pour tenir compte de la fusion d’intercommunalités aux régimes différents (art. 1639 A bis du CGI et art. L. 2333- 76 CGCT, pour une durée portée là aussi à 7 ans)", rappelle-t-elle. Autres propositions : autoriser une capacité de zonage de la Teom en fonction de l’importance du service rendu (art.1636 B undecies du CGI) ; faciliter l’accès aux données nécessaires à la mise en place de la Teomi sur simple demande de la collectivité et garantir l’accès pérenne à ces informations ; permettre des modes de calcul (levées / volumes) différents sur un même territoire.