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Energie - Tarification progressive de l'énergie : les députés reprendront l'examen en fin de semaine

Les députés se sont séparés dans la nuit du 1er au 2 octobre sans achever l'examen de la proposition de loi PS "visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre". Ils reprendront leurs travaux sur le texte en fin de semaine, probablement jeudi 4 octobre, après les débats sur le Traité budgétaire européen.
La discussion sur la proposition de loi en séance publique a commencé le 26 septembre. Son auteur, François Brottes (PS, Isère), également rapporteur et président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée, a affirmé que le texte, qui prévoit notamment la création d'un bonus-malus sur la consommation des énergies de réseau (électricité, gaz, chaleur) et l'extension des tarifs sociaux à 4 millions de ménages constituait une "révolution" en permettant de "rémunérer l'économie d'énergie". Il considère aussi sa proposition de loi comme "le premier étage d'une fusée", "l'amorce de la transition énergétique". Le bonus-malus sera selon lui "opérationnel d'ici deux ans" : "Le projet de loi sur la transition énergétique aura été voté entre-temps. Il fournira aux classes moyennes et aux ménages moins favorisés une boîte à outils pour financer, accompagner, soutenir la réhabilitation thermique des bâtiments". La ministre de l'Écologie, Delphine Batho, a apporté, au nom du gouvernement, "son total soutien à la proposition de loi", comparant le bonus-malus à celui mis en place dans l'assurance automobile pour récompenser "les conducteurs les plus prudents". Le texte "s'inscrit dans la perspective que nous voulons ouvrir résolument, celle d'une nouvelle politique énergétique pour la France", a aussi défendu la ministre. "Il s'agit de rompre avec le tout-pétrole pour les transports et avec le tout-nucléaire pour la production d'électricité."

"Usine à gaz législative"

Mais la proposition de loi a rencontré un tir de barrage de la part des députés UMP, centristes et du Front de gauche. L'UMP a déploré de manière générale "une usine à gaz législative" et "une coquille vide". Le député centriste Bertrand Pancher (Union des Démocrates et Indépendants) a lui dénoncé une "loi injuste et inapplicable". Les députés du Front de gauche, en particulier André Chassaigne le président de groupe, a attaqué un texte qui "ouvre la boîte de pandore" car il met selon lui en péril le principe de péréquation tarifaire tel qu'issu du Conseil national de la résistance (CNR). Le risque à ses yeux est "de détruire tout simplement le cadre actuel des tarifs réglementés, de l'égalité tarifaire, et de la péréquation avec l'introduction d'une différenciation des prix sur le territoire national, dont les critères et les bases sont plus que contestables". Delphine Batho et François Brottes ont au contraire estimé que ce principe de la péréquation tarifaire n'était nullement remis en cause.
Plus de 400 amendements ont été déposés sur le texte. 66 ont déjà été rejetés, dont 60 provenant de l'UMP et un du gouvernement. Celui-ci a voulu revenir, en vain, sur un amendement adopté en commission et qui introduit le critère de l'âge au motif que les personnes âgées ont besoin de plus se chauffer. "Il y a un problème juridique qui pourrait entraîner une faille dans le texte", a argumenté Delphine Batho. Les amendements défendus par l'UMP consistaient notamment à prendre en compte une série de nouveaux critères: télétravail, assistantes maternelles, garde alternée...

Cinq amendements adoptés

Cinq amendements, dont quatre rédactionnels, ont été adoptés lors de la discussion du 1er octobre. L'amendement non rédactionnel a été soutenu par les groupes socialiste et écologiste, mais aussi par le groupe UMP. Il crée un nouvel article (1er A) faisant de la lutte contre la précarité énergétique le cinquième grand objectif de la politique énergétique française (avec la sécurité d'approvisionnement, le maintien d'un prix de l'énergie compétitif, la préservation de la santé humaine et de l'environnement, et l'accès de tous à l'énergie). Denis Baupin (EELV, Paris), à l'origine de l'amendement, souhaitait également intégrer la réduction des consommations d'énergie dans les objectifs, mais n'a pas obtenu gain de cause.
Les débats ont été particulièrement vifs sur l'article 1er du texte qui crée le dispositif de bonus-malus. Huit amendements de suppression ont été déposés, mais aucun n'a été adopté. Pour Lionel Tardy (UMP, Haute-Savoie), "le dispositif proposé est inapplicable, attentatoire aux libertés et n'atteindra pas les objectifs fixés". Il institue selon lui "une véritable double peine". " Il faudra d'une part payer le malus, et d'autre part les travaux pour ceux qui ne bénéficient pas du tarif social. Les classes moyennes, et en particulier les classes moyennes inférieures, seront directement impactées". Au nom du groupe GDR, André Chassaigne (Puy-de-Dôme) souligne également que "toutes les interrogations posées prouvent à quel point cet article sera inapplicable, en raison même de sa complexité". " Dans ma circonscription, a-t-il illustré, certaines communes subissent des différences d'altitude très importantes (…). Cibler au niveau de la commune, partout sur notre territoire, paraît difficile à mettre en œuvre. Mais comment faire autrement, sans verser dans une terrible complexité ?"
François Brottes s'est défendu en évoquant " quelques ajustements" sur "le plan administratif" : "Nous avons aujourd'hui des dispositions faciles à mettre en œuvre, même si elles réclament un peu de temps parce qu'il faut collecter l'information et calculer les volumes de base pour l'ensemble de nos concitoyens. Rien de compliqué, donc, rien d'intrusif et aucune fuite de données. En tout état de cause, comme on rentre dans une logique où l'on se donne du temps, on pourra tout à fait, au fil de la réflexion, notamment après l'étude d'impact sur la base du cadre qu'aura voté le Parlement, connaître, avant que la ministre nous présente son projet de loi sur la transition énergétique, l'ensemble des dispositions. À ce moment-là, on pourra éventuellement voir, à la marge, si le dispositif nécessite quelques ajustements complémentaires avant d'être mis en œuvre."