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Habitat - Une instruction détaille les plans d'action SRU... et les contraintes pour les récalcitrants

Une instruction du gouvernement, datée du 30 juin 2015, demande aux préfets d'utiliser "tous les outils offerts par la loi" pour mettre dans le rang les communes ne respectant pas la loi SRU : préemption du foncier, mobilisation du foncier public, délivrance directe des permis de construire, mise en place de dispositifs d'intermédiation locative... Les préfets doivent également - et rapidement - lister les communes "carencées volontaires" pour signer avec elles des contrats de mixité sociale avant la fin de 2015.

Après la carotte, le bâton... Il y a quinze jours, un décret du 24 juin 2015 mettait en place le dispositif d'aide aux communes participant à l'effort de construction de logements, soit un coup de pouce de 2.000 euros par logement pour les 1.200 "maires bâtisseurs" (voir notre article ci-contre du 29 juin 2015). Tonalité très différente avec l'instruction du gouvernement du 30 juin 2015 relative au renforcement de l'application des obligations pour les communes soumises à l'article L.302-5 du Code de la construction et de l'habitation à l'issue du bilan de la quatrième période triennale 2011-2013.

"La réalité des chiffres est insatisfaisante"

Il s'agit en l'occurrence de présenter les outils d'incitation "forte" - pour ne pas dire de contrainte - qui doivent conduire à développer le logement social dans les communes ne respectant pas les obligations de logements sociaux prévues par la loi SRU, qu'elles aient ou non fait l'objet d'un arrêté de carence. L'instruction détaille également les outils mobilisables par les communes, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les établissements publics fonciers (EPF), les bailleurs sociaux et les services de l'Etat pour favoriser le développement de l'offre de logements sociaux dans les communes déficitaires.
L'instruction, d'une cinquantaine de pages, est précédée d'une lettre du Premier ministre aux préfets. Manuel Valls y rappelle que "la réalité des chiffres est insatisfaisante : si les 1.022 communes soumises à l'obligation SRU se sont en majorité engagées dans des actions utiles pour combler leur retard, la minorité de celles qui résistent à la loi reste considérable : plus de 220 communes ont été déclarées en carence au titre de ce bilan" 2011-2013 (voir notre article ci-contre du 16 avril 2015).

"Faire preuve de la plus grande fermeté"

Le Premier ministre invite donc les préfets à utiliser "tous les outils que vous offre la loi". Cette dernière leur recommande néanmoins d'"engager autant que possible une démarche partenariale avec les communes à travers des contrats de mixité sociale" et propose pour cela des outils d'accompagnement. Pour les communes qui n'entreraient pas dans ce processus, Manuel Valls "demande dès à présent de faire preuve de la plus grande fermeté pour faire respecter la loi", en utilisant tout l'arsenal disponible : préemption du foncier, mobilisation du foncier public - une circulaire du Premier ministre du 6 juillet 2015 se consacre à ce sujet (voir notre article ci-contre dans notre édition du jour) -, mise en compatibilité des documents d'urbanisme, délivrance directe des permis de construire, financement de la construction de logements sociaux et mise en place de dispositifs d'intermédiation locative.

Un plan d'action à décliner selon les caractéristiques des communes

L'instruction proprement dite rappelle le rôle du délégué interministériel à la mixité sociale (en l'occurence Thierry Repentin, également président de la Commission nationale de l'aménagement, de l'urbanisme et du foncier) et invite chaque préfet à "élaborer dans son département un plan d'actions, qu'il conviendra de décliner selon les caractéristiques des communes". Ce plan d'action doit comprendre, a minima, un certain nombre d'éléments. Il s'agit en premier lieu de mesures d'ordre général applicables à l'ensemble des communes déficitaires, qu'elles aient ou non fait l'objet d'un arrêté de carence. Ces mesures consistent notamment en la mobilisation des bailleurs sociaux et des associations de maîtrise d'ouvrage d'insertion, "mais également des promoteurs privés qui pourront être des acteurs déterminants de la production, au travers d'opérations mixtes". L'objectif est de les inciter à prioriser leurs actions vers les communes concernées.
L'instruction précise aussi que ces communes doivent constituer une priorité géographique pour la programmation des opérations de logements sociaux. Elle souligne enfin la nécessité d'"approfondir" le travail de mobilisation du foncier public et de procéder à "une vérification systématique" de la compatibilité des documents d'urbanisme.

Des mesures spécifiques pour les communes carencées volontaires...

Le second volet du plan concerne les mesures spécifiques applicables à l'ensemble des communes carencées. Il s'agit en premier lieu, pour les communes carencées volontaires, de signer un contrat de mixité sociale. Les préfets doivent faire remonter la liste des communes carencées volontaires d'ici le 27 juillet (pour l'Ile-de-France et Paca) ou début septembre pour les autres régions. Les contrats de mixité sociale devront ensuite être signés avant la fin de 2015.
Le contrat précisera notamment "les moyens que la commune s'engage à mobiliser pour atteindre ses objectifs, et notamment la liste des outils et des actions à déployer" : modification des documents d'urbanisme, exercice du droit de préemption, intervention d'un établissement public foncier (EPF)... Au final, le contrat de mixité sociale doit "proposer un cadre opérationnel d'actions pour la commune lui permettant d'engager une démarche volontaire pour atteindre en 2025 ses obligations légales".

...et des mesures contraignantes pour les communes carencées récalcitrantes

Vis-à-vis des communes carencées qui ne veulent pas signer de contrat de mixité sociale ou qui ne respectent pas les engagements de ce dernier, le ton se durcit, puisque les préfets sont invités à "faire émerger des opérations en utilisant tous les outils que la loi permet de mobiliser".
Ceux-ci comprennent notamment la délégation du droit de préemption urbain, la signature d'une convention avec l'EPF (local ou d'Etat) présent sur le territoire ou avec un autre délégataire du droit de préemption, la mise en compatibilité d'office des documents d'urbanisme (via la déclaration de projet et la procédure intégrée pour le logement), l'identification de secteurs dans lesquels l'Etat entend reprendre l'instruction et la signature des permis de construire pour les opérateurs du logement, ou encore l'inscription d'une partie du financement des logements sociaux réalisés comme dépenses obligatoires sur le budget de la commune carencée.
L'instruction du 30 juin invite également les préfets à réserver une part du contingent de logements sociaux en vue d'une attribution à des ménages bénéficiaires du Dalo.

Une série d'outils mis à disposition

Les copieuses annexes de l'instruction proposent une série de documents opérationnels, comme une présentation du contenu et du cadre des plans d'actions départementaux, le recensement des outils prévus par la réglementation et leurs conditions de mise en œuvre (outils fonciers, de planification et de programmation...), un exemple de convention entre le préfet et un bailleur social pour réaliser du logement social en commune carencée, le cadre et le contenu du contrat de mixité sociale, les conditions juridiques relatives à la possibilité de prendre de nouveaux arrêtés de carence ou des arrêtés modificatifs, ou encore un tableau comparatif sur l'évolution des documents de planification pour la réalisation de projets de logements.
En bref, tout un arsenal pour passer outre aux réticences de certaines communes carencées.

Références : instruction du gouvernement du 30 juin 2015 relative au renforcement de l'application des obligations pour les communes soumises à l'article L.302-5 du CCH à l'issue du bilan de la quatrième période triennale 2011-2013

 

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