Décrets sur la mise en œuvre de l'objectif zéro artificialisation nette : l'AMF saisit le Conseil d'Etat

L'Association des maires de France (AMF) a annoncé ce 22 juin qu'elle saisissait le Conseil d'Etat contre deux décrets d'application du principe "zéro artificialisation nette" (ZAN) prévus par la loi Climat et Résilience et parus en mai.

La déclinaison opérationnelle du "zéro artificialisation nette" (ZAN) telle que prévue par la loi Climat et Résilience du 22 août dernier passe toujours mal auprès des collectivités. Nouvel épisode du bras de fer avec l'Etat : l'Association des maires de France (AMF) a annoncé ce 22 juin qu'elle déposait un recours devant le Conseil d’Etat sur les deux décrets du 29 avril dernier, l’un relatif "aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du Sraddet" et l’autre "à la nomenclature de l'artificialisation des sols" (lire notre article du 2 mai). Les élus avaient déjà réitéré un désaccord de fond sur les deux textes lors de l'examen de ceux-ci par le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) le 3 mars dernier (lire la délibération n°22-02-03-02758/02759/02760). Le Sénat, qui a depuis lancé une consultation en ligne sur la mise en application du volet "lutte contre l’artificialisation" de la loi Climat et Résilience, avait de son côté dénoncé un "passage en force" lors de la consultation publique sur les décrets (lire notre article du 15 mars).

"Illégalité potentielle"

"Nous saisissons le Conseil d'Etat pour purger ces textes de toute illégalité potentielle et s'assurer que les futurs schémas et documents d'urbanisme intégreront les objectifs dans des conditions juridiquement sécurisées", a déclaré David Lisnard dans un communiqué. Pour le président de l'AMF et maire (Les Républicains) de Cannes, "l'objectif de lutte contre le réchauffement climatique est une priorité et une urgence. Mais le texte a été conçu de façon technocratique et risque de s'appliquer au détriment de la ruralité. Nous demandons au gouvernement de revenir en profondeur sur ces dispositifs", ajoute l'élu.

L'AMF considère que les deux décrets d'application de la loi, parus le 29 avril, "ont été publiés dans la précipitation, sans étude d'impact (...) dans une approche de re-centralisation rigide". "Ils accentuent les fractures territoriales en opposant les projets entre eux et sont contre-productifs car leur application arithmétique et indifférenciée va à rebours des aménagements vertueux en matière de lutte contre le changement climatique, mais aussi des aménagements indispensables à l'ambition de réindustrialisation du pays, qui ne peuvent être réalisés en zone dense. Ils prescrivent des objectifs, mais ne disent mot par ailleurs des outils juridiques et financiers indispensables au recyclage urbain et à la lutte contre la vacance", ajoute-t-elle.

Risque de fragilisation des documents de planification

"Enfin et surtout, souligne-t-elle, ils fragilisent juridiquement les documents de planification (Scot, PLU), déjà sources de nombreux et lourds contentieux, alors qu’ils sont des leviers indispensables pour mettre en œuvre les stratégies d’aménagement et de développement local." L'association dit espérer que ce recours serve à "clarifier" et "sécuriser les modalités d’application de la loi Climat avant que les régions n’aient intégré les objectifs dans leur Sraddet", à "répondre à la demande de souplesse et de subsidiarité portée par les communes et intercommunalités dans les débats parlementaires" et à "prendre en compte les efforts passés des territoires en termes de consommation d’espaces", ou encore, à "permettre au bloc local de renvoyer sur un quota régional les projets d’envergure nationale et régionale afin qu’ils n’impactent pas directement leurs politiques d’aménagement".

L'AMF avait déjà saisi en mai le Conseil d'Etat contre une autre ordonnance d'application de la loi Climat et Résilience, sur l'érosion côtière, s'inquiétant là encore de la "sécurité juridique" du dispositif (lire notre article du 20 mai).

 

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