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Patrimoine - Eoliennes : après le mont Saint-Michel et Vézelay, Arc-et-Sénans ?

Après une période d'accalmie, une nouvelle affaire de projet d'implantation d'éoliennes à proximité d'un monument exceptionnel agite les défenseurs du patrimoine.
Il est vrai que l'affaire ne concerne pas n'importe quel site, puisqu'il s'agit de la Saline royale d'Arc-et-Sénans, le chef d'œuvre de l'architecte utopiste Claude Nicolas Ledoux, construit entre 1774 et 1779 et inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco en 1982.

Huit éoliennes à 7,5 kilomètres

Selon l'association "Le vent tourne", le projet en cause consiste en l'implantation de huit éoliennes dont les plus proches se situeraient à 7,5 kilomètres de la Saline royale et donc parfaitement visibles du site. Les éoliennes seraient implantées sur trois communes différentes, appartenant aux communautés de communes du Val Saint-Vitois et du canton de Quingey : Lombard (trois éoliennes), Quingey (trois) et Byans-sur-Doubs (deux).
Comme d'habitude dans ce genre de dossier, Energies des deux Vallées - le porteur du projet - fait valoir une capacité unitaire théorique de 2,5 mégawatts, ce qui permettrait de produire environ 50 GWh d'électricité par an, soit l'équivalent de la consommation d'une ville de 20.000 habitants (deux fois plus que la population des deux communautés de communes). Au-delà de ces arguments économiques - sans oublier "environ 200.000 euros par an de retombées fiscales" durant trente ans -, Energies des deux Vallées fait également valoir, sur son site de présentation du projet, des arguments qui paraissent pour le moins spécieux. Ainsi, "les éoliennes, implantées au plus proche à 7,5 Km, ne seront perceptibles que de manière marginale depuis l'enceinte intérieure de la Saline Royale d'Arc-et-Sénans ouverte au public et n'interféreront pas avec les vues emblématiques de la Saline qui sont soit internes au site, soit aériennes". Autrement dit, à l'intérieur des bâtiments de la Saline et en tournant le dos à la fenêtre, on ne verra pas les éoliennes !...

La menace d'un déclassement de l'Unesco

Bien entendu, l'association "Le vent tourne" ne l'entend pas de cette oreille. Elle fait valoir notamment l'impact de la Saline, qui amène plus de 120.000 visiteurs par an. Mais surtout, l'argument principal est celui d'un possible retrait de l'inscription au patrimoine mondial.
L'Unesco se montre désormais beaucoup réactive sur le respect des sites inscrits et n'entend pas se laisser imposer, par les Etats ou les collectivités, des constructions qui remettent en cause le respect de ces sites exceptionnels. L'Unesco n'a, par exemple, pas hésité à déclasser le centre historique de la ville de Dresde, pour la construction d'un pont à quatre voies, et a obtenu gain de cause sur le projet de parc éolien près du mont Saint-Michel (alors que les éoliennes envisagées se trouvaient à plus de 15 Km du mont).
Malgré cette menace potentielle, le projet - dont les prémices remontent à 2008 - a obtenu toutes les autorisations officielles. La zone de développement éolien (ZDE) a ainsi été approuvée en janvier 2013, avec l'avis favorable de la commission départementale des sites et paysages, ce qui peut sembler surprenant compte tenu des instruction données par le ministère de la Culture de mieux prendre en compte la présence du patrimoine dans les projets de parcs éoliens.
La réaction du ministère de la Culture est donc attendue avec intérêt, d'autant plus que la visite sur le site d'un expert de la direction régionale des affaires culturelles est programmée.

 

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