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Culture - Patrimoine mondial : l'Unesco place le golfe de Porto sous surveillance

Longtemps considéré comme un distributeur de labels touristiques, le comité du patrimoine mondial de l'Unesco se montre de plus en plus exigeant vis-à-vis des gestionnaires des sites inscrits sur sa liste. En 2009, il n'avait pas hésité à en retirer la vallée de l'Elbe et la ville de Dresde, pour n'avoir pas empêché "la construction d'un pont à quatre voies au coeur de ce paysage culturel". Même si cette décision ne semble pas avoir nui à la fréquentation touristique de la capitale de la Saxe, elle a résonné comme un coup de tonnerre, notamment parmi les pays développés qui se croyaient à l'abri de ce genre de sanction.
Aujourd'hui, ce sont deux dossiers français qui font - entre autres - l'objet de l'attention du comité, qui tient sa 36e session à Saint-Pétersbourg du 24 juin au 6 juillet 2012. Le premier concerne la mise sous surveillance du golfe de Porto (Corse), inscrit en 1983. Ce site naturel, dont la végétation constitue "un remarquable exemple de maquis" et qui abrite également "une riche vie marine", comprend les calanques de Piana (ou Calanche), le golfe de Girolata et la réserve de la Scandola. Sa mise sous surveillance tient à la pression touristique de plus en plus forte qui s'exerce sur la zone, mais aussi et surtout au récent renouvellement d'un permis de prospection pétrolière maritime au large du Var et des Bouches-du-Rhône, autrement dit à moins de 150 kilomètres du site. Pour le comité - qui demande à la France une évaluation préalable de l'impact environnemental de ces travaux -, ces forages, même exploratoires, "pourraient avoir d'importants impacts négatifs irréversibles et non compensables sur la valeur universelle exceptionnelle du bien".
Le second dossier fait déjà l'objet d'un suivi très attentif de la part de l'Unesco, puisqu'il s'agit du mont Saint-Michel. Certes, le comité du patrimoine mondial a obtenu satisfaction avec l'abandon de tous les projets d'éoliennes visibles depuis le mont, ainsi que l'engagement de mettre en place un périmètre d'exclusion (voir notre article ci-contre du 21 mars 2012). Mais la réponse de la France n'a que partiellement convaincu l'Unesco. Le comité a ainsi accueilli "avec satisfaction l'engagement de l'Etat partie à établir une zone d'exclusion des éoliennes", mais il a aussi pris note de "la nécessité de définir une méthode, pas adoptée à ce jour, satisfaisante d'établissement d'une zone d'exclusion" des éoliennes. L'Unesco souhaite que cette zone soit "définie au moyen d'éléments cartographiques irréfutables établis par ordinateur". Mais l'organisation s'inquiète aussi de certains aspects du rétablissement du caractère maritime du mont et des aménagements qui l'accompagnent. La comité du patrimoine estime donc urgent "d'élaborer et d'adopter un plan de gestion du bien, avec une approche basée sur le paysage, et de mettre en place un comité de gestion mieux coordonné".
La France a jusqu'au 1er février 2013 pour répondre sur les plans de gestion du golfe de Porto et du mont Saint-Michel. Elle devra également remettre, à la même date, son rapport sur l'état de conservation du bien et la mise en œuvre des recommandations de l'Unesco pour le site de Porto. Une démarche similaire devra intervenir pour le mont Saint-Michel avant le 1er février 2014.