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Paysage - Eoliennes et patrimoine : le vent tourne !

Plusieurs décisions et initiatives récentes donnent à penser que le rapport de forces entre les promoteurs des éoliennes et les défenseurs du patrimoine est en train d'évoluer. Deux avis défavorables ont ainsi été émis sur deux projets de parcs éoliens de cinq et huit appareils qui doivent être implantés respectivement à 8,5 kilomètres et à 12 à 15 kilomètres du centre de Provins (Seine-et-Marne), inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco pour ses remparts et son ensemble architectural exceptionnel.
En novembre dernier, c'est la préfète de la région Bourgogne qui - s'appuyant notamment sur un avis défavorable du responsable du service territorial de l'architecture et du patrimoine (Stap) - avait rejeté le permis de construire d'un parc de neuf éoliennes qui devaient être implantées à moins de 5.000 mètres de l'abbaye de Fontenay, également inscrite au patrimoine mondial. Parmi les considérants de l'arrêté, on relèvera notamment "que le lieu d'implantation de l'abbaye de Fontenay correspond à la recherche par les moines cisterciens d'un lieu autarcique et isolé, propice au recueillement au fond d'un vallon, à l'intérieur d'un massif boisé" et que le classement par l'Unesco "traduit la valeur exceptionnelle de ce lieu sacré et qu'il ne doit pas être remis en cause par l'implantation à sa proximité d'éléments en contradiction avec l'esprit des lieux".
Mais le dossier le plus emblématique reste bien sûr celui des projets d'éoliennes dans la baie du mont Saint-Michel, le comité du patrimoine mondial ayant très clairement laissé entendre qu'il était prêt à déclasser le site si ce projet voyait le jour (voir notre article ci-contre du 30 juin 2011).

Le ministre de la Culture change de ton

De leur côté, les associations de défense du patrimoine restent également très mobilisées. Ce 27 janvier à Toulouse, par exemple, une quarantaine d'associations organisent une manifestation intitulée "Non au massacre de la région Midi-Pyrénées par 800 éoliennes". Elles protestent contre le schéma régional climat-air-énergie (SRCAE), élaboré par la région et qui prévoit l'implantation de 800 éoliennes à l'horizon 2020, dont une partie dans des parcs naturels. Bon nombre de ces éoliennes doivent être installées dans l'Aveyron, l'un des quatre départements à avoir bénéficié, le 28 juin dernier, de l'inscription des Causses et des Cévennes au patrimoine mondial (voir notre article ci-contre du même jour).
Ces prises de position ne doivent rien au hasard. Après avoir longtemps semblé passif sur le sujet, le ministre de la Culture - qui a eu le sentiment d'avoir été quelque peu trompé par les explications fournies dans le dossier du mont Saint-Michel - a adopté une attitude beaucoup plus ferme. Lors de la réunion des préfets de région, le 15 décembre dernier, Frédéric Mitterrand s'est ainsi dit "souvent très inquiet de voir à quel point notre cadre de vie se dégrade, que ce soit par le biais de champs d'éoliennes anarchiques, visibles à des kilomètres à la ronde - alors que beaucoup de schémas départementaux cohérents avaient été établis avec les services territoriaux d'architecture et du patrimoine -, ou par des abords de ville dénaturés et bardés d'enseignes et de constructions sans ambition esthétique" (voir notre article ci-contre du 19 décembre 2011). Il a donc fait "solennellement appel" aux préfets pour qu'ils tiennent compte de la préservation des paysages dans l'ensemble des décisions qu'ils sont amenés à prendre. Lors de ses voeux à la presse, le 17 janvier, Frédéric Mitterrand a rappelé qu'"a [sa] demande, les schémas régionaux éoliens seront ainsi désormais soumis aux commissions régionales du patrimoine et des sites, qui en mesureront l'impact visuel". Il a également indiqué qu'il travaillait "ardemment" à l'étape suivante : faire en sorte "que ce passage par nos commissions soit suivi d'avis obligatoire".

 

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