Face au Covid-19, l'État centralise et renforce l'aide alimentaire

La secrétaire d'État Christelle Dubos a présenté plusieurs mesures qui vont bouleverser, au moins temporairement, le champ de l'aide alimentaire. Les préfets sont chargés de "coordonner la poursuite des activités de distribution alimentaire" avec, notamment, les collectivités locales. Toutes les associations et non plus les seules associations habilitées au titre de l’aide alimentaire peuvent intervenir sur les dons et la collecte. 

Dans un communiqué du 31 mars, Christelle Dubos annonce une prise en main de fait, par l'État, de l'aide alimentaire. Face à une situation sanitaire exceptionnelle et "parce que le maintien de l’aide alimentaire est une priorité pour nos concitoyens les plus précaires face à la crise épidémique", la secrétaire d'État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé explique qu'"à la demande du président de la République et en coordination avec les associations de lutte contre la précarité, le ministère des Solidarités et de la Santé met en œuvre les mesures nécessaires pour que la solidarité nationale continue de protéger nos concitoyens les plus vulnérables".

Les préfets en première ligne et un allègement des règles

En pratique, Christelle Dubos détaille plusieurs mesures qui vont bouleverser, au moins temporairement, le secteur. Tout d'abord, le gouvernement charge les préfets, avec l’appui des commissaires à la lutte contre la pauvreté, "de coordonner la poursuite des activités de distribution alimentaire avec les collectivités locales" – en particulier les CCAS –, les agences régionales de santé, les associations et acteurs privés (grande distribution, agro-alimentaire, agriculteurs) pouvant apporter leur concours. Cette place donnée aux collectivités reconnaît les actions menées par un grand nombre d'entre elles en la matière, et cela bien avant la crise actuelle, comme le reconnaît un récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l'aide alimentaire.

Autre mesure à caractère exceptionnel : alors que l'aide alimentaire est, en temps normal, strictement encadrée pour garantir la sécurité des produits et le respect des bonnes pratiques, Christelle Dubos annonce que "les dons et la collecte de denrées alimentaires sont élargis à titre exceptionnel à toutes les associations et non plus aux seules associations habilitées au titre de l’aide alimentaire. Les contrôles seront levés tant que durera l’épidémie".

Pour autant, elle rappelle que 'l’ensemble des structures mobilisées devront veiller au respect strict des consignes sanitaires et de sécurité, pour protéger autant les bénéficiaires que les bénévoles et le personnel". Il est, par exemple, envisageable de modifier les créneaux d'ouverture des accueils ou, si possible, de s'installer dans des locaux plus grands pour favoriser la prise de distance. De même, il est possible de préparer des colis à l'avance pour limiter la présence sur place. Et, bien entendu, les actions de distribution entrent dans les dérogations au confinement.

Appel aux volontaires et mobilisation des stocks inutilisés

Pour faciliter la mise en œuvre de l'aide alimentaire, perturbée par le confinement malgré le dévouement de nombreux bénévoles, le gouvernement en appelle aussi "à la mobilisation bénévole des Français". Le site jeveuxaider.gouv.fr permet ainsi toute personne de se porter volontaire pour intégrer la réserve civique et participer aux distributions d’aide alimentaire proche de chez elle. Il est également prévu de mobiliser la réserve sociale, constituée d'étudiants en travail social (voir notre article ci-dessous du 25 mars 2020), pour soutenir l’activité des associations et des structures sociales.

Autre volet pour sécuriser l'aide alimentaire : la mise à disposition – toujours sous la coordination de l'État au niveau national et déconcentré – des stocks de nouveau donateurs potentiels, dont l'activité s'est arrêtée (Crous, restaurateurs, cuisines centrales, entreprises...). Là aussi, nombre de collectivités avaient anticipé la mesure, par le biais des stocks de leurs cantines scolaires. Par ailleurs, Christelle Dubos précise que "les moyens habituellement mobilisés par l’État via le Fead [fonds européen d'aide aux plus démunis, ndlr] et les crédits pour les épiceries sociales sont évidemment maintenus pendant la crise (30% des volumes de l’aide alimentaire)".

Dernières mesures annoncées par Christelle Dubos : l'ouverture aux associations d'aide alimentaire des dispositifs de soutien à l'activité des entreprises, une surveillance accrue des lieux de stockage demandée aux préfets (après quelques affaires lamentables de vols dans ces entrepôts) et, enfin, le rappel que les CAF peuvent débloquer, sur leurs fonds d'action sociale, des aides financières individuelles d'urgence pour les familles qui en font la demande.

 

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