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Lutte contre le gaspillage alimentaire : le don aux associations habilitées devient la norme

Une ordonnance prise en application de la loi Egalim généralise à la quasi-totalité des opérateurs, y compris privés, de l'agroalimentaire et de la restauration collective le respect d'un certain nombre d'engagements : estimation des quantités de denrées gaspillées, interdiction de rendre les invendus impropres à la consommation, convention avec les associations habilitées d'aide alimentaire (pour les gros opérateurs).

Une ordonnance du 21 octobre 2019 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire généralise à la grande majorité, sinon à la totalité, des opérateurs, y compris privés, de l'industrie agroalimentaire et de la restauration collective le respect d'un certain nombre d'engagements et de règles en la matière. Elle leur fait notamment obligation, dans le délai d'un an à compter de la publication de l'ordonnance, de proposer une convention aux associations habilitées d'aide alimentaire pour le don de denrées consommables et non vendues.

Une double extension

Cette ordonnance est prise en application de l'article 88 de la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (loi Egalim, voir notre article ci-dessous du 7 novembre 2018). Elle n'innove pas véritablement, mais procède essentiellement à une double extension. D'une part, elle étend les dispositions de la loi du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (loi Garot, voir notre article ci-dessous du 3 février 2016) – qui visait principalement les distributeurs – aux secteurs de la restauration collective et de l'agroalimentaire. D'autre part, elle étend à tous les opérateurs privés de la restauration collective l'obligation de lutte contre le gaspillage alimentaire, qui existe déjà pour l'État, les établissements publics et les collectivités territoriales (pour les services de restauration collective dont ils ont la charge)

En pratique, l'ensemble des opérateurs de la restauration collective sont désormais tenus de réaliser un diagnostic préalable à la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire, incluant l'approvisionnement durable. Ce diagnostic préalable comprend, "outre une estimation des quantités de denrées alimentaires gaspillées et de leur coût, une estimation des approvisionnements en produits issus de l'agriculture biologique ou autres produits [...] que les économies liées à la réduction de ce gaspillage leur auraient permis de financer". L'obligation du diagnostic entrera en vigueur dans le délai d'un an à compter de la publication de l'ordonnance.

Interdiction de détruire des denrées consommables

L'ordonnance du 21 octobre étend également à l'ensemble des opérateurs de la restauration collective et de l'industrie agroalimentaire l'interdiction - qui s'applique déjà aux distributeurs - de rendre les invendus alimentaires encore consommables impropres à la consommation (par exemple en les aspergeant de javel). Le non-respect de cette interdiction pourra être sanctionné par une amende de 3.750 euros mais, surtout, celle-ci pourra être assortie d'une peine complémentaire d'affichage ou de diffusion par voie de presse, particulièrement dissuasive pour l'image des entreprises.

En outre, l'ordonnance étend aux opérateurs de la restauration collective, préparant plus de 3.000 repas par jour, et aux entreprises de l'industrie agroalimentaire réalisant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 50 millions d'euros, l'obligation de proposer une convention aux associations habilitées d'aide alimentaire pour le don de denrées consommables et non vendues. Ces conventions devront être proposées dans le délai d'un an à compter de la publication de l'ordonnance. Il est précisé qu'"aucune stipulation contractuelle, conclue entre un opérateur de l'industrie agroalimentaire et un distributeur, ne peut faire obstacle au don de denrées alimentaires, vendues sous la marque de ce distributeur, à une association habilitée".

Enfin, les opérateurs concernés doivent rendre "publics chaque année, par tout moyen de communication, leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire, les procédures de contrôle interne qu'ils mettent en œuvre et les résultats obtenus, qui intègrent le volume des dons alimentaires réalisés".

Un sérieux coup de pouce pour les associations habilitées

À l'issue de la présentation de l'ordonnance au conseil des ministres du 21 octobre, Sibeth Ndiaye, la porte-parole du gouvernement, a expliqué que "ce texte se fonde sur le constat que, chaque année en France, on a plus de 10 millions de tonnes de nourriture qui sont perdues [...]. C'est-à-dire à peu près un cinquième de la production totale d'aliments".

À un moment où les associations d'aide alimentaire s'inquiètent de l'impact des difficultés du fonds européen d'aide aux plus démunis (Fead) sur le dispositif français – récemment pointées par un rapport d'information du Sénat (voir notre article ci-dessous du 29 octobre 2018) –, la mise en œuvre de l'ordonnance du 21 octobre pourrait leur apporter une bouffée d'air et sécuriser leur approvisionnement alors que la demande s'accroît. Ces associations recourent déjà largement à la collecte de denrées issues de la lutte contre le gaspillage alimentaire. La Fédération des banques alimentaires indique ainsi collecter chaque année 113.000 tonnes de denrées alimentaires, dont 73.000 tonnes "sauvées du gaspillage".

Références : ordonnance n°2019-1069 du 21 octobre 2019 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (Journal officiel du 22 octobre 2019).

 

 

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