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Politique de la ville - Il n'y aura pas de nouveau "plan Marshall" pour les banlieues

Lors de son premier déplacement sur le terrain, lundi, le nouveau ministre délégué à la Ville a assuré qu'il n'y aurait pas de énième plan Marshall pour les banlieues et qu'il souhaitait inscrire son action dans la durée. L'association Ville et Banlieue explique ses attentes sur la nouvelle politique de la ville à mener.

De la continuité... C'est ce que tous les acteurs de la politique de la ville réclament à cor et à cri. Car depuis 35 ans, chaque nouveau gouvernement arrive avec son plan banlieue. Cette fois-ci, le ton est un petit peu différent. Le nouveau ministre délégué à la Ville, François Lamy, a assuré lundi lors de sa première visite de terrain, à Villiers-le-Bel, théâtre d'émeutes en 2007, qu'il n'y aurait pas de "Plan Marshall", s'inscrivant en cela dans la ligne de François Hollande pendant la campagne. "Cela fait des années qu’on nous annonce un 'plan Marshall' — sans que je voie d’ailleurs pourquoi le général Marshall est mêlé à nos aventures de banlieues !", avait ironisé le candidat, le 3 mars, à Dijon.
Le plan Marshall évoqué par Nicolas Sarkozy pendant la campagne de 2007 s'était ensuite traduit en plus modeste "plan Espoir banlieue" doté d'une trentaine de milliards d'euros. Piloté par Fadela Amara, il n'aura jamais vraiment convaincu. Dès son lancement en 2008, un parterre d'élus et de professionnels réunis à l'initiative de la Datar et de la DIV s'étaient montrés pour le moins circonspects, parlant de "travail de plomberie".
Le nouveau ministre, lui, dit ne pas croire à la rupture. "On va regarder ce qui existe et prendre le temps de la concertation, pour voir ce qui marche et ce qui marche moins bien, avant de faire des choix", a-t-il déclaré. De même avec le Programme national de rénovation urbaine (PNRU) : François Lamy souhaite une évaluation avant d'envisager un PNRU 2.
Mais ce proche de Martine Aubry aura fort à faire pour inverser la spirale du déclin des banlieues. De nombreux signaux sont au rouge. "On est dans un archipel d'îles qui n'ont plus de rapport les unes avec les autres", avait alerté Claude Dilain, le sénateur de la Seine-Saint-Denis, lors des 2e Assises de la politique de la ville, en novembre dernier à Amiens. Islamisation mise en lumière par le rapport de l'Institut Montaigne sur l'agglomération de Clichy-Montfermeil, faible participation aux élections locales, taux de pauvreté trois fois plus élevé qu'ailleurs, taux de chômage à 43% chez les jeunes selon l'Onzus...

"Globalement la situation se dégrade"

"A l'exception de la rénovation urbaine qui est une réussite, globalement, la situation se dégrade, c'est le résultat de plusieurs décennies d'échecs et d'une crise qui a plus durement touché les banlieues", estime Camille Vielhescaze, délégué général de l'association Ville et Banlieue, qui constate une baisse de moitié des crédits de la politique de la ville ces quatre dernières années. Baisse due en partie au "désengagement de l'Etat dans la rénovation urbaine".
L'association, qui était montée au créneau pendant la campagne en formulant 120 propositions pour les banlieues, est à l'origine de l'intitulé du ministère de l'Egalité des territoires et du Logement auquel est adossé le ministère délégué à la Ville (elle réclamait un ministère de l'Egalité des territoires et de la Cohésion sociale). Ce grand ministère confié à Cécile Duflot pourrait jouer le rôle de superviseur de la bonne utilisation des crédits au profit des territoires en difficulté. "Nous attendons de voir quels vont être les décrets d'attribution. Ce que l'on souhaiterait, c'est un grand ministère transversal qui réoriente les politiques de droit commun dans tous les territoires qui ont besoin d'un rattrapage, pas seulement les banlieues, et un ministère qui s'occupe plus spécifiquement de celles-ci", explique Camille Vielhescaze.
L'association s'appuie sur un rapport confidentiel de la Cour des comptes qui jette le trouble sur la répartition des dépenses dans l'enseignement. "Un élève de Paris est plus subventionné qu'un élève de la troisième couronne", assure le responsable.
L'association réclame aussi un réinvestissement massif dans le champ social. "On dépense 400 millions d'euros pour la politique de la ville et 40 milliards d'euros pour la rénovation urbaine, il faut un rééquilibrage en faveur du volet humain." "Depuis 2010, les crédits des associations ont chuté de 20%, certaines ont dû fermer, c'est emblématique du degré de qualité du lien social", poursuit Camille Vielhescaze.
Dans ce sombre tableau de la politique de la ville, les maires de banlieue ont deux motifs de satisfaction : le maintien de la Dotation de solidarité urbaine (DSU) et la création du Fonds national de péréquation (FPIC) qui profitera aux communes les plus dévaforisées.

 

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