Inspection des installations classées en Ile-de-France : des contrôles de terrain qui s'accentuent

La direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports d’Île-de-France (Drieat) a retracé ce 27 septembre le bilan de son action en 2021. Si les contrôles sur le terrain se renforcent, le nombre de sanctions demeure stable. Les déchets restent un sujet particulièrement sensible.

Renforcer la probabilité de l’inspection pour affermir la prise en compte des risques par les industriels, tel est la ligne de conduite que s’est fixée ces dernières années la direction régionale et interdépartementale de l’environnement, de l’aménagement et des transports d’Île-de-France (Drieat) et qui s'était traduite par une activité en nette hausse en 2020, malgré la crise sanitaire (lire notre article). "Notre volonté est d’être plus présent sur le terrain, d’inspecter davantage d’installations", explique Jean-Marc Picard, directeur adjoint de la Drieat, chargé des risques, de l’énergie et de la nature et ce, dans la droite ligne de l’instruction ministérielle du 15 décembre 2020 (voir notre article du 8 janvier 2021). "L’instruction des dossiers avait tendance à prendre le dessus sur le contrôle", précise-t-il, en rappelant que ce sont les deux missions de la petite centaine d’inspecteurs des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) que compte la direction. "Des effectifs en augmentation depuis deux à trois ans – une dizaine de postes supplémentaires ont été créés", indique Felix Boileve, chef de service chargé de la prévention des risques, qui y voit notamment "les suites de Lubrizol".

Des industriels qui rentrent plutôt aisément dans le rang

La tâche ne manque pas. Selon le bilan qu'elle a présenté ce 27 septembre, la région comptait au 31 octobre 2021 1.262 établissements soumis à autorisation, 746 soumis à enregistrement et plus de 10.000 soumis à déclaration. L’an passé, 1.778 inspections ont été conduites : la moitié dans des établissements soumis à autorisation ou enregistrement, l'autre moitié dans des établissements non déclarés ou non soumis. "Un chiffre en augmentation de 40% par rapport à 2018", se félicite Felix Boileve. Une hausse qui ne se retrouve pas dans le nombre de sanctions prises la même année : 190 mises en demeure – "un chiffre stable", note Felix Boileve –, 23 procès-verbaux, 34 amendes administratives ou astreintes et 7 suspensions d’activité. " Les actions administratives suffisent généralement à remettre les installations en conformité, d’autant que nous sommes suivis par les préfets. Les cas qui posent le plus de difficulté sont ceux qui sortent du domaine industriel, et qui concernent le plus souvent de véritables fraudeurs, à l’activité totalement illégale. Là, l’action du parquet est déterminante", enseigne Jean-Marc Picard. En la matière, Felix Boileve avoue ne pas être encore en mesure de se prononcer sur l’apport des pôles interdépartementaux spécialisés en environnement introduits par la loi du 24 décembre 2020 (voir notre article du 6 janvier 2021).

Le fléau des déchets

En 2021, la Drieat a notamment conduit plus de 150 contrôles sur les produits chimiques, au travers d’inspections généralistes ou spécialisées, notamment dans le cadre d’une action de contrôle conduite à l’échelle européenne (voir l’instruction précitée du 15 décembre 2020). La Drieat met néanmoins en relief que près des deux tiers des mises en demeure ont trait aux déchets, qui concentrent l’attention. L’an passé, la Drieat a conduit une action "coup de poing" sur le tri à la source (5 flux et biodéchets) auprès de 24 établissements de restauration rapide et de 4 gestionnaires de centres commerciaux, avec des résultats décevants : "Pour la quasi-totalité des contrôles, les établissements seront sanctionnés", rapporte la Drieat, qui dénonce des déchets triés en salle mais remélangés et constate que le tri des biodéchets est rarement proposé en salle de restauration. Une autre action "coup de poing" a également été conduite auprès de 46 centrales à béton, décidée après qu’aient été constatés en 2020 les rejets illicites d’une centrale parisienne dans la Seine. Cette fois, un seul établissement a été mis en demeure de régulariser sa situation, mais 23 établissements ont dû apporter des précisions pour "clarifier leur conformité".
En janvier dernier, en coopération avec la gendarmerie, la Drieat a inspecté 6 établissements susceptibles de s’adonner au trafic illégal de déchets. Une opération qui se traduira par des suites pénales et ou administratives pour 4 d’entre eux. "Il n’y a rien d’anormal à ce qu’une attention particulière soit portée aux déchets car le risque est élevé par nature. Ce sont des matières qui, par défaut, n’ont pas de valeur, et s’en débarrasser constitue toujours le moyen le moins coûteux", déplore Jean-Marc Picard. Il relève toutefois que "la plupart des décharges sauvages ne relèvent pas de notre action, mais de la police du maire". Des maires qui n'en peuvent mais (voir notre article du 14 janvier). 

Inondations… et sécheresse

Les risques naturels ne sont évidemment pas oubliés. En Île-de-France, le risque inondation reste le plus préoccupant. "Une crue majeure – elles sont lentes, mais durent longtemps dans la région – pourrait affecter jusqu’à 900.000 franciliens en zone inondable et 1.870.000 franciliens hors zone inondable, qui seraient touchés par des problèmes d’électricité, de gaz, de chauffage urbain ou d’assainissement", alerte Felix Boileve. Pour y faire face, le préfet de bassin Seine Normandie a adopté le nouveau plan de gestion des risques d’inondation en mars dernier (voir notre article du 8 avril). La Drieat insiste toujours et encore sur l’importance de la sensibilisation des citoyens. Elle alimente de multiples outils à cette fin : carte des zones d’inondation potentielles et de fragilité des réseaux, données hydrométriques sur l’hydroportail, en complément de vigicrues, etc.

La Drieat alerte également sur le "risque montant de la sécheresse", arguant "d’un étiage particulièrement sévère l’été dernier", même si la région a été plutôt "moins touchée que les autres". "Pas un étiage historique station par station – la région compte 85 stations de relevés hydrométriques –, mais un étiage majeur sur l’ensemble des stations", explique Felix Boileve, qui pointe tout de même "que l’on a relevé le débit le plus bas jamais mesuré dans un tiers des stations". 

 

Le portail Géorisques évolue, un parcours dédié aux collectivités

Le site portail Géorisques va faire peau début octobre, avec la création de deux nouveaux "parcours de consultation" (la partie "Expert" sera conservée mais sa présentation et son contenu seront modifiés). L’un adapté aux particuliers, l’autre dédié aux collectivités qui "contiendra des ressources pour aider les communes à sensibiliser et à préparer les populations face aux risques locaux". Jean-Marc Picard souligne par ailleurs que depuis février dernier, l’ensemble des rapports d’inspection de la Drieat sont rendus publics sur le site. Conformément à la décision du ministère (voir notre article du 8 janvier 2021), anticipant alors les conclusions de la mission organisée sur la "modernisation de la culture du risque en France" (voir notre article du 12 juillet 2021).