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Les contrats de relance, un travail de mise en cohérence des outils existants

Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) doivent être signés d'ici le 30 juin 2021. Lors d'un webinaire organisé le 29 avril par l'Association des petites villes de France (APVF), les acteurs concernés, EPCI ou PETR, ont évoqué les caractéristiques et exigences de ces CRTE qui ont vocation à regrouper l'ensemble des contrats signés entre l'État et les collectivités. En présence du préfet Jérôme Gutton, délégué interministériel aux CRTE, les élus de deux territoires - la communauté de communes Touraine-Est Vallées, et d'un PETR, celui du Perche et d'Eure-et-Loir - ont témoigné de la façon dont s'élaborent ces nouveaux contrats.

Près de 845 contrats de relance et de transition écologique (CRTE) pourraient être signés. "C'est quelque chose d'assez inouï, tout le territoire national pourra être couvert, la collection des contrats de l'État n'a jamais recouvert l'ensemble du territoire, à l'exception des contrats de plan État-région." C'est avec enthousiasme que le préfet Jérôme Gutton, délégué interministériel aux CRTE, a fait le point sur l'avancée de ces contrats, "un très grand chantier, un travail de bénédictins", à l'occasion d'un webinaire organisé le 29 avril 2021 par l'Association des petites villes de France (APVF).

Ces contrats ont vocation à regrouper l'ensemble des contrats et programmes signés entre l'État et les collectivités, leur permettant de définir et mettre en œuvre leur projet de territoire tout au long de la nouvelle mandature. Intégrant les budgets dédiés à la relance, ils doivent être signés d'ici le 30 juin 2021. Les trois quarts seront conclus à l'échelle des EPCI, et un quart à celle des pays ou des pôles d'équilibre territorial et rural (PETR). Il y aura quelques exceptions avec des CRTE portés par des métropoles ou de très grandes agglomérations.

Ces CRTE constituent une nouvelle approche de la relation entre l'État et les collectivités, une relation contractuelle, avec un contrat unique, ce qui correspond à une demande de longue date de l'APVF. Ils ne bénéficient en revanche pas de financement dédié. "Il n'y a pas de crédits supplémentaires pour les CRTE, a ainsi fait remarquer Vincent Morette, président de la communauté de communes Touraine-Est Vallées, durant le webinaire. Il s'agit juste d'un fléchage de crédits existants" tels que, entre autres, la DSIL, la DETR, les différentes enveloppes ministérielles et les crédits France Relance. Une remarque confirmée par le préfet. "Il s'agit de crédits de droit commun, il n'y a pas d'enveloppe spécifique", a ainsi souligné Jérôme Gutton, précisant toutefois "que depuis 1945, on n'a pas jamais eu autant de moyens sur la table". "Il faut commencer par consommer ce qui est sur la table", a-t-il insisté, sans s'empêcher d'aller chercher d'autres crédits, auprès des différents ministères - Culture, Travail, Santé…

Pas d'usine à gaz

Le webinaire a été l'occasion de donner un premier aperçu de l'élaboration des CRTE au sein d'un EPCI, la communauté de communes Touraine-Est Vallées, et d'un PETR, celui du Perche et d'Eure-et-Loir. Concernant le diagnostic, la communauté de communes Touraine-Est Vallées a rapidement décidé de ne rien produire de supplémentaire mais plutôt de s'appuyer sur les documents existants, tels que le contrat de ruralité, le plan climat-air-énergie territorial (PCAET), les éléments issus de la démarche de Territoires d'industrie, le programme local de l'habitat (PLH), le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI), le projet éducatif… "Il n'est pas nécessaire de refaire des études complémentaires, a assuré Vincent Morette. Généralement on a tout ce qu'il faut pour faire un diagnostic ; il est hors de question de créer une usine à gaz." Reste que de l'avis du préfet Gutton, tous les territoires ne sont pas au même niveau dans ce domaine. Certains vont d'ailleurs pouvoir bénéficier d'un accompagnement sur mesure de la part de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et/ou de ses partenaires. Accompagnement dont Julien Megdoud, chargé de mission à l'ANCT, a rappelé les axes principaux : des ressources en ingénierie (observatoire des territoires), une ingénierie en matière de commerces via les équipes de l'Epareca que l'ANCT a accueillies, des cofinancements ou financements à 100% dans le cadre de marchés à lots, un accompagnement pour favoriser la participation citoyenne ou mettre en place des outils de pilotage et de suivi… Au total, 510 territoires seront accompagnés sur les 837 contrats définis pour le moment. Les marchés d'ingénierie seront mobilisés pour une centaine d'entre eux pour les phases amont de diagnostics et de concertation. 300 territoires se verront quant à eux verser une subvention de 20.000 euros pour des études ou le recrutement de chefs de projet.

Définir les orientations stratégiques et champs d'action

Le diagnostic ainsi établi permet de formaliser les forces, faiblesses, opportunités et menaces pour chacun des trois axes proposés par l'État pour construire les CRTE (attractivité et compétitivité, cohésion sociale, transition écologique). Sur la transition écologique, la communauté de communes Touraine-Est Vallées a par exemple identifié comme atouts la présence d'espaces agricoles (56% du territoire) et d'espaces naturels (22%), mais aussi une consommation d'énergie moindre (1,9 tonne d'équivalent pétrole par habitant) qu'au niveau du département d'Indre-et-Loire (2,1 en moyenne), ou encore la présence de 27 exploitations agricoles engagées dans l'agriculture écologique. Au rang des faiblesses : 72% de déplacements en voiture, 73% des actifs travaillant en dehors du territoire… Le document liste aussi les opportunités (quatre gares TER desservant le territoire, le tri déchet, le schéma directeur vélo, la production d'énergie renouvelable) et, à l'inverse, les menaces (deux fois plus d'espaces artificialisés que dans le reste du département hors métropole, 18% du territoire couvert par un plan de prévention des risques inondations, davantage d'émissions de GES que de séquestration ou encore une viticulture et une agriculture sensibles au changement climatique). Il définit ensuite les orientations stratégiques (pour la transition écologique : faire preuve d'exemplarité et de volontarisme environnemental, diversifier les modes de déplacements, gérer les ressources avec responsabilité) et les champs d'action (réduire la consommation énergétique, développer les énergies renouvelables, préserver la biodiversité, etc.).

Les CRTE, porteurs de nouveaux projets ?

Pour le PETR du Perche et d'Eure-et-Loir (61 communes, 42.500 habitants), c'est moins la question du diagnostic et du plan d'attaque qui a été difficile à élaborer que la cohérence à mettre en œuvre entre tous les contrats existants sur le territoire. "Nous avons toute la collection des contrats inventés par l'État depuis cinq ans, les territoires d'industrie, le programme Petites Villes de demain, les contrats de ruralité ; la difficulté principale pour le CRTE vient de la nécessaire cohérence qu'il faut donner à tous ces contrats", a fait remarquer Harold Huwart, maire de Nogent-le-Rotrou et président de la communauté de communes du Perche. Autres questions : la possibilité à travers ces CRTE de porter des thématiques et des projets nouveaux et d'innover, mais aussi l'appréciation des moyens disponibles pour réaliser les projets et obtenir la garantie des aides sur la durée.

Harold Huwart a aussi fait part de sa crainte de se voir imposer une vision du territoire pour flécher les financements, vision qui ne correspondrait pas à celle constatée et souhaitée par les élus locaux. "Nous avons des priorités politiques que nous avons l'intention de faire valoir", a-t-il insisté.

Les structures porteuses de CRTE ont aussi mis en place des instances de dialogue, comités de pilotage notamment, rassemblant les différents acteurs concernés et incluant les maires. "Les maires peuvent signer les contrats, a assuré Pierre Jarlier, Président d'Honneur de l'APVF, et ce d'autant qu'ils sont maîtres d'ouvrage de projets inscrits au contrat." Confirmation par le préfet Gutton, pour qui "les maires doivent nécessairement être associés, tout comme les chambres consulaires, voire des associations ou tout acteur important sur le territoire". Et "il y aura une annexe financière qui évoluera chaque année, a également précisé Jérôme Gutton, il faut être pragmatique et accepter de ne pas réaliser du premier coup la copie parfaite : elle pourra être complétée, amendée, améliorée tout au long de la période".