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Logement au troisième trimestre : les mises en chantier repartent, les permis de construire toujours à la traîne

Le ministère de la Transition écologique publie les résultats de la construction de logements pour le troisième trimestre 2020. La reprise est très marquée pour les mises en chantier. En revanche, les autorisations de logements, bien qu'en progression, ne rattrapent pas le retard accumulé. Face à ces chiffres - qui varient sensiblement d'une région à l'autre -, la "réticence" des maires est évoquée. Sans doute pour ne pas prolonger ce retard, le BTP va continuer à travailler malgré le reconfinement.

Le ministère de la Transition écologique publie les résultats de la construction de logements au 30 septembre 2020, autrement dit pour le troisième trimestre. Sans surprise et de façon quasi mécanique, ces chiffres traduisent un "net rebond", après un second trimestre marqué par la majeure partie de la période de confinement, puis un début de déconfinement et une reprise des chantiers sous fortes contraintes sanitaires. Si la reprise est très marquée pour les mises en chantier, les autorisations de logements (permis de construire) sont certes en progression, mais ne rattrapent pas le retard accumulé.

Un effet de rattrapage : +42% pour les mises en chantier et +43,6% pour les autorisations

Au deuxième trimestre 2020, mises en chantier et autorisations de logements avaient reculé respectivement de 17,8% et 42,7%, suscitant au passage une polémique sur l'instruction des permis de construire par les collectivités. La situation change radicalement au troisième trimestre. Au 30 septembre, en données CVS-CJO (corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables), les mises en chantier progressent sur le trimestre de 42% et les autorisations de logements de 43,6%.

Bien que ces deux chiffres soient très proches, ils recouvrent en réalité des situations très différentes compte tenu du contexte de départ. Les mises en chantier du troisième trimestre, en données CVS-CJO, ont rattrapé et même dépassé de 6% les chiffres de la période décembre 2019-février 2020 (donc juste avant le confinement) et de 9% ceux des douze mois précédant le confinement. En revanche, les autorisations de logements du troisième trimestre affichent toujours un retard de 22% par rapport à la période de décembre 2019 à février 2020 et de 17% par rapport à la moyenne des douze mois précédant le confinement. Or ces autorisations correspondent aux futures mises en chantier de 2021 et 2022.

Sur un an (entre octobre 2019 et septembre 2020), 393.300 logements ont été autorisés à la construction, soit 43.900 de moins qu'au cours des douze mois précédents (-10%), tandis que 386.500 logements ont été mis en chantier, soit 22.900 de moins que dans les douze mois précédents (-5,6%).

Plus des trois quarts des régions affichent un recul sur un an

Dans le détail, la hausse des logements autorisés sur le troisième trimestre (par rapport au second trimestre) est plus prononcée dans le logement individuel (+48,6%) que dans les logements collectifs, y compris en résidence (+39,7%). C'est l'inverse pour les mises en chantier, où la reprise est beaucoup plus forte dans le collectif (+54,5%) – très pénalisé par le confinement – que dans l'individuel (+24,5%) où interviennent de nombreuses entreprises artisanales.

En termes géographiques – et en données brutes sur les douze derniers mois – seules trois régions affichent une progression du nombre d'autorisation de logements : la Bourgogne-Franche-Comté (+8,3%), la Bretagne (+3,6%) et la Normandie (+0,8%), ainsi que l'ensemble des Drom (+3,1%). À l'inverse, plusieurs régions affichent des baisses prononcées, à commencer par la Corse (-40,4%, mais assez peu significatif compte tenu de l'étroitesse du marché) et l'Île-de-France (-23,5%), suivies par la région Paca (-13,6%) et l'Occitanie (-13%).

En matière de mises en chantier – et toujours en données brutes sur les douze derniers mois – seules trois régions affichent une légère tendance positive : Centre-Val de Loire (+7,9%), Bretagne (+1,5%) et Pays de la Loire (+0,9%). À l'inverse, trois régions affichent une baisse de plus de 10% : la Corse (-19,4%), la Normandie (-12,5%) et l'Île-de-France (-10,7%). Toutes les autres régions, y compris l'ensemble des Drom, affichent un recul des mises en chantier compris entre 0 et -10%.

Permis de construire : les maires à nouveau mis en cause

Ces chiffres n'ont pas manqué de susciter des réactions, visant plus particulièrement la question des permis de construire. C'est le cas d'Emmanuelle Wargon. La ministre déléguée en charge du logement a en effet affirmé au Monde : "Nous constations, début 2020, un rythme d’environ 40.000 logements autorisés par mois et, à l’automne, nous sommes 20% au-dessous. Je m’emploie à inverser cette tendance."

Pour sa part, Alexandra François-Cuxac, la présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), estime que les chiffres annoncés "confirment une chute de la construction amorcée depuis trois ans [...]. En trois ans, nous avons [...] perdu 100.000 permis de construire par an, dont 60.000 dans le collectif". Regrettant les obstacles à la construction et les nombreux recours contre les permis de construire, la FPI estime que "tout est prétexte à ne pas accepter l'autre à côté de chez soi. Les maires sont ceux qui doivent accompagner cette acceptation, [mais] par endroit, je sens des élus lassés, fatigués de ce combat". Conclusion : "En matière de logement neuf, l’heure n’est plus aux remises en cause des aides (Pinel et PTZ), ni à la complexification de l’acte de construire. Il faut une mobilisation générale de l’État, des collectivités locales et des opérateurs, pour faire de la construction un levier de la relance. Il nous faut plus de permis de construire, plus de digitalisation et moins de normes."

Dans ce contexte, on comprend mieux les décisions de l'exécutif de ne pas instaurer de reconfinement pour les entreprises du BTP et de prévoir, dans le cadre du volet Logement du plan de relance, une enveloppe de 350 millions d'euros pour encourager les maires bâtisseurs, sous la forme d'une aide aux communes pour densifier le logement. Le cabinet d'Emmanuelle Wargon avait d'ailleurs indiqué, lors de la présentation du plan : "On constate que les collectivités territoriale ont des réticences à délivrer des permis exploitant toutes les possibilités des PLU [plans locaux d'urbanisme, ndlr]. Il faut donc vaincre cette réticence", afin de densifier et de lutter contre l'étalement urbain (voir notre article du 4 septembre 2020).

 

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