Lutte contre les fraudes aux aides publiques : la loi est publiée
Plusieurs mesures de la loi "Cazenave" du 30 juin 2025 concernent le champ de la rénovation énergétique, particulièrement sujet à des montages frauduleux, pour accroître les contrôles, obliger à la transparence concernant les prestations des sous-traitants ou renforcer l'interdiction du démarchage abusif.

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La loi visant à donner un coup d’arrêt aux pratiques frauduleuses, principalement dans les secteurs de la rénovation et de l’efficacité énergétiques, a été publiée ce 1er juillet. Porté par l’ancien ministre des Comptes publics, le député EPR Thomas Cazenave, ce texte est passé de 4 à 35 articles, au cours de son examen, intégrant notamment au passage la proposition de loi du sénateur Pierre-Jean Verzelen, permettant d’interdire le démarchage téléphonique non consenti dans tous les secteurs (à partir du 11 août 2026) - voir nos articles ci-dessous.
Non conformité partielle
Quatre articles, sans lien avec le texte initial, ont toutefois été censurés par le Conseil constitutionnel (en partie pour l'article 20), au titre de la jurisprudence des cavaliers législatifs. C’est le cas de l’article 3 qui visait à exclure les indus de revenu de solidarité active (RSA) obtenus frauduleusement de toute remise de dette, rééchelonnement ou effacement. De l’article 6, qui imposait que les réponses au droit de communication bancaire prennent la forme de flux dématérialisés. De article 12, qui prévoyait la criminalisation de l’escroquerie aux finances publiques en bande organisée. Ou encore du 1° de l'article 20, qui prévoyait de nouveaux cas dans lesquels l'autorité administrative peut refuser l'enregistrement de la déclaration d'activité d'un organisme de formation professionnelle.
Les Sages ont en revanche déclarés conformes à la Constitution l’article 1er (qui insère un nouvel article L. 115-3 au sein du code des relations entre le public et l’administration, permettant en cas de suspicion de fraude, la suspension de l'octroi ou du versement d'aides publiques), l’article 11 (paragraphe II - sur le droit d’accès de l'inspection générale de l'administration à tous les renseignements, documents, informations et données personnelles détenus par certaines administrations et personnes publiques), et 32 (qui insère deux nouveaux articles L. 322-11-1 et L. 432-15-1 au sein du code de l'énergie afin notamment de permettre à des agents d’Enedis et GrDF de constater par procès-verbal la dégradation des dispositifs de comptage des utilisateurs raccordés à leur réseau).
Fluidifier les échanges d’informations
Les différentes administrations pourront échanger plus facilement des informations entre elles, y compris avec les collectivités ou les organismes d’agrément. Les pouvoirs d’enquête et de sanction de la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) sont en outre globalement accrus, et entre autres de sorte à mieux détecter les fraudes aux compteurs communicants Linky et Gazpar, avec des contrôles à distance facilités.
En cas d’indice sérieux de manquements ou de manœuvres frauduleuses, l’administration pourra suspendre l’octroi ou le versement d’une aide pour une durée de trois mois, renouvelable une fois. Le texte relève par ailleurs les taux de pénalités applicables aux sommes à restituer par les fraudeurs de 80 à 100% (et de 40 à 50%, en cas de manquement délibéré). Des mécanismes de blocage préventif sont également prévus pour les paiements accordés aux centres de formation frauduleux ou pour l’octroi de certificats d’économies d’énergie (CEE). On relève aussi la création d'une sanction (amende de 7.500 euros) pour défaut d'immatriculation au registre national des entreprises (RNE).
Fraudes à la rénovation énergétique
Autre apport du texte : la sécurisation des contrôles et des sanctions en matière de CEE, le cas échéant via des contrôles visuels à distance (CVAD), et la possibilité de les pondérer en fonction du temps de retour minimal sur l'investissement, en plus du reste à charge minimal. Le texte renforce en outre l'information contractuelle du consommateur concernant la sous-traitance et la détention de labels conditionnant l'accès à des aides publiques, comme le label Reconnu garant de l'environnement (RGE), qui est indispensable pour bénéficier de MaPrimeRénov’. Un dispositif de suspension à titre conservatoire du label RGE ou de l'agrément "Mon Accompagnateur Rénov" aux mains de la DGCCRF est prévu pour une durée de six mois renouvelable une fois. Le texte y ajoute un délai de carence interdisant à l’entreprise frauduleuse dont le label a été retiré par l'organisme de qualification de recandidater à un label ou signe de qualité pour une durée allant jusqu'à cinq ans. Le consommateur conservera néanmoins le bénéfice de l'aide si l'entreprise a perdu son label en cours de travaux. Y figure également l’obligation des sites internet proposant des travaux de rénovation énergétique d'inclure un lien vers la plateforme France Rénov’ (sous peine d’amende). Le texte donne aussi une existence légale à l'annuaire des diagnostiqueurs. Et concernant la sous-traitance des travaux, il prévoit la limitation à deux du nombre de rangs de sous-traitance dans les chantiers aidés à partir de 2027.
Références : LOI n° 2025-594 du 30 juin 2025 contre toutes les fraudes aux aides publiques ; Décision n° 2025-887 DC du 26 juin 2025, JO du 1er juillet 2025, textes n°1 et 4. |