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Dépendance - Pour l'Irdes, les politiques d'aide aux aidants restent à construire

L'Irdes (Institut de recherche et documentation en économie de la santé) publie une comparaison des politiques d'aide aux aidants des personnes âgées dépendantes en Europe. Intitulée "Comment pérenniser une ressource en voie de raréfaction ?", cette étude est issue d'un groupe de travail mis sur pied dans le cadre du programme européen Interlinks. Elle porte sur six pays : l'Allemagne, l'Angleterre, la France, l'Italie, les Pays-Bas et la Suède.
Les résultats montrent une très nette constance du rôle des aidants familiaux dans la prise en charge des personnes dépendantes, quel que soit le système sanitaire et social du pays considéré. Dans tous les cas, la part informelle représente environ 85% de l'aide aux personnes âgées dépendantes (chiffre tiré de l'enquête Share). Le plus surprenant est que cette part informelle demeure très importante, même lorsque l'aide professionnelle est aisément accessible, comme en Suède ou aux Pays-Bas. Si cette part reste ainsi à peu près constante, son contenu varie fortement d'un pays à l'autre. Ainsi, dans les Etats où l'aide professionnelle est facilement accessible, l'aide informelle se concentre "sur les taches domestiques les plus simples et le maintien de la participation sociale [des] aînés, en laissant aux professionnels les tâches les plus lourdes". La mise en place de politiques sophistiquées de prise en charge de la dépendance n'engendre donc pas "d'effet d'éviction des solidarités familiales par les solidarités publiques". A l'inverse, dans les pays moins avancés dans la prise en charge de la dépendance, les aidants assurent des tâches lourdes, même si - dans le cas de la France - la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) en 2002 a fait évoluer les choses.

Une dimension sociale, mais aussi économique

En revanche, "les premiers résultats montrent qu'à l'exception des pays scandinaves et des Pays-Bas, il n'y a pas de véritable politique d'aide aux aidants répondant aux besoins et attentes des aidants tout en s'insérant dans la politique globale d'aide aux personnes âgées en perte d'autonomie". Néanmoins, la nécessité de soutenir les aidants s'est progressivement imposée partout à partir du milieu des années 2000.
Après avoir exposé les politiques mises en oeuvre dans les différents pays de l'échantillon, l'étude de l'Irdes en tire un certain nombre d'enseignements pour la France. Ceux-ci portent en premier lieu sur la nécessité de renforcer les actions en faveur des aidants. Sur ce point, l'étude a le mérite de rappeler que la question n'a pas seulement une dimension sociale, mais aussi économique. En effet, "au-delà d'une certaine intensité, l'aide s'accompagne d'effets délétères sur le bien-être des aidants et peut entraîner une diminution de la participation des aidants au marché du travail". Dans cet esprit, l'étude relève également que les mesures de conciliation entre aide et travail sont encore insuffisamment développées. Or, selon l'Irdes, "de ce point de vue, la France apparaît en position difficile en raison d'un marché de l'emploi tendu, de relations sociales au sein des entreprises dégradées, du peu de flexibilité de l'organisation du travail qui fait que les seniors, depuis plus de trente ans, constituent une variable d'ajustement du taux d'emploi et que l'égalité des genres piétine". Enfin, l'étude constate que la politique est aujourd'hui centrée sur les aidants d'Alzheimer, maladie "promue cause nationale depuis dix ans et soutenue par un discours compassionnel". Or ces orientations tendent à détourner la réflexion sur les autres dimensions de l'aide (logement) et sur les autres publics concernés par une politique globale d'aide aux aidants.
En dépit de ces constats, la conclusion de l'Irdes se montre un peu plus optimiste que les prémices. L'étude estime en effet que la récente note de prospective de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur l'aide aux aidants (voir notre article ci-contre du 19 avril 2012) ou celle, plus ancienne, du Centre d'analyse stratégique (voir notre article ci-contre du 1er septembre 2010) "témoignent d'une prise de conscience salutaire en France de l'importance d'une politique d'aide aux aidants des personnes âgées dépendantes". 

 

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